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Billet de blog 2 mars 2012

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L'affaire du MIT : Quelles évolutions pour la gestion de la crise ?

La Turquie est en pleine période de transition. Le 9 février 2012 un procureur spécial à convoqué des agents du MIT (Milli İstihbarat Teşkilatı – Organisation nationale de renseignements, dénomination des services secrets turcs) pour les interroger sur des contacts qu'ils ont eu avec le PKK (organisation reconnue comme terroriste par la communauté internationale). Cela a créé une crise politique au sein de l'AKP au pouvoir et du gouvernement même. Le mouvement de Fethullah Gulen qui est influent dans la police s'immisce dans les affaires politiques menées par le gouvernement contre le PKK, c'est ainsi que l'annonce de la convocation a été perçue par le premier ministre turc. D'emblée le gouvernement a pris la défense de ses agents. Suite à ces événements troublants, le parlement turc a adopté une loi controversée, proposée par le gouvernement, et visant à protéger les agents du MIT de toute poursuite judiciaire, pour des activités relevant de leurs fonctions.

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La Turquie est en pleine période de transition. Le 9 février 2012 un procureur spécial à convoqué des agents du MIT (Milli İstihbarat Teşkilatı – Organisation nationale de renseignements, dénomination des services secrets turcs) pour les interroger sur des contacts qu'ils ont eu avec le PKK (organisation reconnue comme terroriste par la communauté internationale). Cela a créé une crise politique au sein de l'AKP au pouvoir et du gouvernement même. Le mouvement de Fethullah Gulen qui est influent dans la police s'immisce dans les affaires politiques menées par le gouvernement contre le PKK, c'est ainsi que l'annonce de la convocation a été perçue par le premier ministre turc. D'emblée le gouvernement a pris la défense de ses agents. Suite à ces événements troublants, le parlement turc a adopté une loi controversée, proposée par le gouvernement, et visant à protéger les agents du MIT de toute poursuite judiciaire, pour des activités relevant de leurs fonctions.

D'un coté la Turquie poursuit les organisations criminelles et juge les « intouchables » et criminels d'hier, et de l'autre côté elle permet à une grande fraction de l'état de ne pas être poursuivie. Les enquêtes menées concernant l'affaire Ergenekon, le KCK (organisation urbaine du PKK), les personnes disparues, les tentatives de coup d'état peuvent-elles aboutir sans mener une enquête approfondie sur les agents du MIT ? Comment les poursuites judiciaires entamées il y a cinq ans vont-elles se poursuivre ? Pourquoi le système judiciaire turc ne parvient pas à se stabiliser ? Peut-on dire que le système judiciaire est mené par le mouvement Gulen ? Pourquoi associe t-on le système judiciaire turc au kémalisme ou au mouvement Gulen et non pas au droit ? Est-ce qu'on arrête des gens arbitrairement ? Existe-il un mécanisme pour empêcher cela ?

Interrogé par Le journal Taraf, avocat en droit pénal depuis plus de 20 ans et ayant écrit de nombreux ouvrages, Ahmet Gundel tente de répondre à quelques une de ses questions. Selon Ahmet Gundel qui connaît bien le système judiciaire turc, il existe bel et bien des gens qui pensent comme l’AKP mais cela ne signifie pas forcément qu'ils sont en contact avec le gouvernement car parmi ceux-ci on retrouve des personnes proches du MHP (Parti d'action nationaliste) ainsi que des sociaux démocrates. Gundel s'est exprimé sur la problématique de la manière suivante : « La modification du fonctionnement du HSYK (Haut Conseil des juges et des procureurs) a fait en sorte que les procureurs généraux ont été choisis parmi les plus conservateurs. Durant les cinq dernières années ceux-ci ont enquêté sur des dossiers importants. La majorité d'entre eux sont plutôt conservateurs mais le mouvement Gülen n'est pas aussi présent qu'on le pense. D'ailleurs les tribunaux spéciaux ne peuvent pas mener des enquêtes avec seulement quelques procureurs. Les dossiers sont analysés par au moins 15 ou 20 procureurs et juges. Nous ne pouvons pas certifier qu'aucun d'entre-eux n'en fait partie mais dire que la majorité d'entre-eux fait partie de du mouvement de Fethullah Gulen me semble exagéré. Ceux-ci sont des procureurs spéciaux qui ont 10-15 ou 20 ans d'expérience dans le métier. Les procureurs et juges ont été engagés bien avant l'arrivée de l'AKP au pouvoir. Ceux qui viennent d'arriver ne sont pas encore actif en tant que procureurs spéciaux car ils ne sont pas encore prêts pour effectuer cette tâche. Parmi les procureurs qui travaillent depuis 15-20 ans il y a bien évidemment des sympathisants du mouvement Gülen. Bien que je n’entretienne pas de bonnes relations avec le mouvement Gulen, j'estime que tant que les gens ne se mêlent pas à des actions violentes, ils ont le droit de vivre pleinement leur foi et de penser librement. »

Gundel attire l'attention sur le problème existant concernant cette loi qui pourrait, dans les années à venir, être utilisée à mauvais escient par d'autres dirigeants. Gundel dit que le premier ministre turc doit dorénavant donner son accord pour qu'une enquête puisse s'ouvrir sur les agents du MIT. Selon Gundel, dans une période où la Turquie met en lumière les coups d’État et les organisations criminelles, celle loi n'aidera pas l'évolution des enquêtes menées. Gundel ajoute que si la Turquie continue à promulguer des lois pareilles, l’État de droit pourrait se transformer en un état des juges et des procureurs. Gundel reconnaît toutefois qu'au niveau démocratique la Turquie a énormément évolué ces cinq dernières années. Il insiste sur le fait que la Turquie devrait continuer à évoluer dans le sens de l'Union Européenne afin d'adopter les standards européens pour enfin atteindre les objectifs démocratiques fixés.

Le Courrier

Le courrier turc est un blog consacré à l'actualité de la Turquie. Il se propose de vous faire découvrir les débats politiques, économiques et sociaux en Turquie avec les analyses des experts et des intellectuels turcs ou étrangers. Ainsi il veut contribuer à la réflexion sur ce pays en France, qui reste bien souvent l'otage d'une lecture simpliste et anachronique.

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