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Billet de blog 14 décembre 2011

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« Inception », PKK et le mouvement Gülen

Je suis depuis un moment les propos dénigrants Gülen dans les médias kurdes. La télévision, les journaux et les sites internet proches du PKK, affichent sans répit leur inimité vis-à-vis de Gülen auprès des lecteurs et des téléspectateurs.

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Je suis depuis un moment les propos dénigrants Gülen dans les médias kurdes. La télévision, les journaux et les sites internet proches du PKK, affichent sans répit leur inimité vis-à-vis de Gülen auprès des lecteurs et des téléspectateurs.

Même si ces émissions (notamment leur virulence et surtout leur profusion) se cantonnaient aux limites de la seule critique cela n’aurait ma foi qu’une importance mineure. Mais là, on dirait que le PKK met de côté la question kurde pour concentrer tous ses efforts à combattre le mouvement Gülen. Les dirigeants de l’organisation ont proclamé Gülen « ennemi numéro un du peuple kurde » les personnes et les organismes proches de la confrérie sont visés par la liste du PKK. Il suffit de voir le reportage de Murat Karayılan, le dirigeant du PKK diffusé le 5 novembre par l’Agence Firat Haber au sujet du mouvement Gülen, qui rapporte les faits de manière tout à fait disproportionnée. Karayılan, y déclare qu’il tient en main un dossier fort compromettant concernant Fethullah Gülen et qu’il souhaite dévoiler ces documents à la télévision et aux journaux de Turquie. Ce dossier s’appelle « L’Ergenekon Vert ».

Le PKK n’a jamais jusqu’à présent évoqué l’existence d’un tel dossier en rapport avec l’affaire Ergenekon (état profond turc ultranationaliste), et encore moins exprimé l’intention de le dévoiler aux médias ( Ergenekon est responsable de milliers de meurtres perpétrés contre des inconnus, de disparition de détenus, de l’exode forcé de villages entiers dans les années 1990). En outre, étant donné que Kandil (la région se situe au nord de l’Irak, peuplée par les militants du PKK) a eu une approche plutôt « frileuse » dans ses questionnements au sujet d’Ergenekon, il a été obligé de marquer une certaine distance entre cette affaire et la politique kurde.

L’inimitié vis-à-vis de Gülen affichée dans les médias me fait penser à la Turquie des années 1990 et les médias du 28 février (coup d’État). Des vidéos de Gülen qu’auraient récupérés les services de renseignement apparaissaient chaque soir à la une des informations télévisées et faisaient la une des journaux. Le PKK agit comme s’il avait hérité de l’ancienne inimitié qu’entretenaient les anciens dirigeants étatiques ou les cadres issus de la bureaucratie militaire vis-à-vis de Gülen. Le jargon employé dans les programmes diffusés rappelle celui employé dans les médias du 28 février, d’OdaTV (ultranationaliste) et du Parti Travailliste. Ils emploient exactement les mêmes termes et les mêmes concepts.

Bien sûr ce qui me préoccupe surtout, c’est de savoir la manière dont évoluera l’intimité qui s’étend de « l’État Profond (Derin devlet) » ou bien de l’establishment au mouvement kurde…

Je pense qu’une telle hostilité du mouvement séparatiste kurde envers Gülen a été rapportée de l’extérieur. Je suis la question kurde depuis des années et pourtant je ne parviens pas à comprendre comment le mouvement Gülen est devenu du jour au lendemain l’ennemi numéro un de la cause kurde. Il est possible que cette hostilité opposant les deux parties soit le résultat d’un processus de politisation accrue et de gain d’influence du PKK dans les villes. Mais tout de même pas au point de relayer la question kurde au second plan.

Cette situation me fait penser au film de Cristopher Nolan, Inception. Un film dans lequel Léonardo Di Caprio joue le premier rôle. Ce film raconte l’histoire d’un espion ou voleur qui s’immisce dans les rêves des gens afin de leur voler leurs pensées ou leurs secrets les plus profondément enfouis. Cette partie du récit suffit déjà à trouver le film étrange, c’est-à-dire l’idée de « voler des pensées » au lieu de les inoculer…En essayant de s’immiscer dans les pensées de l’Héritier d’une grande entreprise concurrente, un conflit père-fils est volontairement orchestré dans le but de détruire complètement cette entreprise. L’héritier refuse de liquider l’entreprise afin de garantir son indépendance.

L’Hostilité du mouvement kurde envers Gülen et son mouvement ressemble davantage à cette « inoculation d’idées » évoquée plus haut. Lorsqu’une pensée est ainsi inoculée, elle se diffuse et se développe immanquablement, surtout si le milieu y est propice…

L’Hostilité envers Gülen a glissé d’une entité à une autre, en même temps que s’opère un glissement de ceux qui mènent l’enquête Ergenekon. L’Etat-Profond, et le statuquo et les juntes ou les milices qui en dépendent –qu’elles soient de sensibilité de gauche ou de droite – s’efforcent depuis ces 5 dernières années d’imposer l’hostilité envers Gülen au mouvement kurde. Du côté kurde, les effets d’une telle politique se font franchement sentir, et cette fois ils semblent plutôt irréversibles. Après une petite enquête, il s’avère que toutes les sources dénigrant Gülen dans les médias kurdes proviennent des entités évoquées un peu plus haut.

En ce sens les diffusions des médias européens appartenant à l’organisation sont particulièrement éloquentes. Il s’agit d’une copie pure et simple des médias du 28 février (médias contrôlés par l’armée). Ces diffusions témoignent de l’acharnement avec lequel l’hostilité envers Gülen est entretenue.

En guise de conclusion, je finirai par ces quelques mots, chers aux activistes politiques kurdes : « Laissez les Kurdes aux Kurdes ». En effet, vous avez sans doute raison, mais je me dois de vous rappeler une chose : cette hostilité que vous entretenez envers Gülen, croyez-moi ou non, elle ne vous appartient pas, elle vous a été rapportée de l’extérieur.

Kurtuluş Tayiz / Taraf

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