Là où j'habite, la capitale des Gaules, la chaleur bien poisseuse a supplanté le peu de Printemps que l'on a eu. Une habitude. Mais l'une de celle, contrairement aux précédentes (on devrait, parait-il se faire une raison du changement climatique !) qui cumule de surcroît un tel... climat de haine, que même mon border line de Collie, Charly, hésite à s'éclater dans le jardin public situé à côté de chez moi. J'ai bien senti qu'il raccourcissait ses temps de pause au dehors. Comme si, imperceptiblement, il sentait mieux que moi la tension extrême qui règne dans le pays ? Faut dire que je partage son point de vue silencieux. Depuis la dissolution imposée par le maître des horloges de nos vies, pas un jour ne s'est passé sans que les fusils, chargés à bloc, n'aient été sortis à la moindre occasion ? Ca flingue de tous côtés. A droite, à gauche, de gauche à droite, sans parler de l'extrême centre réactionnaire de not' divin et de l'extrême droite tout court qui en jouit, de bas en haut et inversement ! Et qu'ainsi au sifflement des balles par les uns et les autres nourris, j'en viens à me demander pourquoi je m'astreindrais à raison garder ? C'est terrible. Comment prendre un tant soit peu de recul face à cette montée d'adrénaline nauséeuse ? Où des voix officielles jusqu'au coeur des misères sociales, expriment en clarté, consciemment pour les premières et peut-être inconsciemment pour les seconde (là, je reste humble, hein ! je ne les connais pas vraiment), qu'une "préférence nationale" serait l'issue à tous nos maux, individuels et collectifs ? Evidence assumée et portée par une tripotée d'irresponsables politiques et médiatiques, à commencer par l'empereur lui-même, que la guerre est préférable à la paix. Je comprends que mon chien, qui est noir avec quelque tâches blanches, commence à flipper, même si c'est dans le monde canin, une des races la plus sociable qui existe.
La peur, car il n'est question que de ça aujourd'hui, règne en maîtresse absolue. Peur de l'étranger, puis bientôt peur du voisin ou de la voisine, et pour finir en apothéose, peur à l'intérieur même de nos cercles intimes, car le discours ambiant instruit l'idée qu'il faudra à terme, se méfier de tout le monde. Une mécanique de la pensée totalitaire dont on sait, ou je le présume pour mes contemporains, qu'elle a toujours débouché sur la guerre totale. J'en suis là de mes réflexions. Je lis, j'écoute le plus possible pour sentir le pouls d'une société qui m'échappe complètement, tout en dépensant mon énergie à être le plus présent là où il faut l'être (contre le fascisme, contre les guerres, contre le mépris social, l'autorité violente, le sort réservé à une jeunesse qui n'a plus d'espoirs, le passage à tabac de toutes les minorités, etc...). Dans laquelle il faudrait que j'hésite à exprimer le fond de mes sentiments et de mes doutes, parce qu'ils seraient immédiatement interprétés comme une utopie désuète pour les uns, un pris parti pour les autres (à l'échelle de l'inconséquence macabre des médias mainstream, public comme privé, je serais islamo gauchiste, anti sémite, terroriste, et j'en passe) ; les deux m'assignant de fait, un ordre partagé, que je me taise. Injonction, j'ai soixante cinq balais, qui m'a toujours poussé au contraire à l'ouvrir. Mais j'avoue que ça devient compliqué d'exprimer ce que l'on sent, ce que l'on veut, y compris avec des potos, parce que la pression est tellement énorme, qu'on hésite désormais à parler avec la tête et le coeur. A contrario, l'usine à bonheur individuelle, fait les trois huit, ayant validé une bonne fois pour toute que les digues contre la crétinerie nationaliste, valaient bien qu'on les supprime pour atteindre la félicité du chacun pour soi, et en l'état dans notre pays, que le sang pur prévale sur toutes autres considérations humaines. La création du nouveau Front Populaire, dans l'urgence de l'histoire sombre qui se répète, est une bouffée d'air. Que dis-je, une nécessité, une obligation, une honnêteté intellectuelle et politique face à ... l'Histoire. Je vais évidemment voter pour lui. Mais je l'assigne, dans toutes ses composantes, à bien mesurer les enjeux de la période. Il ne suffira pas, et je le souhaite ardemment, qu'il soit majoritaire à l'Assemblée Nationale, il lui faudra trancher définitivement entre la vie et la mort. Je m'explique. Que les socialistes qui auront fait leur auto critique, jusqu'aux écologistes qui ne savent jamais s'ils sont de droite ou de gauche, en passant par le parti Communiste (je précise que j'ai milité avec beaucoup de leurs militants et militantes) qui a une peur intrinsèque de disparaître, jusqu'à la France Insoumise traversée comme les autres par des courants et des opportunités individuelles ; réalisent enfin qu'une Union contre le fascisme ne se résument pas, jamais, à leur nombril. Qu'ils acceptent, tous et toutes, qu'il y a matière à imaginer un autre monde possible (ça, c'est ma fibre altermondialiste). Et qu'ainsi si d'aventures heureuses ils étaient majoritaires à l'Assemblée Nationale, je me répète, qu'ils n'oublient pas que c'est grâce toujours à "ciels" qui, quotidiennement ont à souffrir en permanence des discriminations, sociale ou religieuse, qu'ils se doivent de les représenter.
Fort de cette synthèse qui n'a aucune vocation à prétendre détenir la "vérité", et parce que je suffoque du trop plein de mauvaises fois, d'hypocrisie et de cynisme qui traverse mon pays, je vais aujourd'hui passer deux jours chez des amis à la campagne (un luxe pour l'urbain que je suis), parce que j'en ai besoin. Parce qu'il me faut recharger mes batteries, singulièrement à plat, pour vivre ne serait-ce que quelques moments de bonheur. Lesquels dans la période, n'ont pas voix au chapitre. Et revenir ainsi ce prochain dimanche, plus convaincu que jamais, que le bordel ambiant peut être vaincu.
Bonne journée à toutes et tous.