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Billet de blog 17 janvier 2015

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Un article moraliste sur Charlie

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Suis-je Charlie ? Qui se dit Charlie ? Qui n'est pas Charlie ? Que de polémiques stériles sur lesquelles il ne m'importe pas de revenir ici et maintenant. Ce qui nous intéresse aujourd'hui, c'est la question du pourquoi. Je vous préviens, on est pas prêts d'arriver à une réponse claire. Du mobile du crime. Ici, le crime est un attentat. Un attentat se compose de meurtres. Mais un attentat, à la différence d'un homicide, devra toujours être analysée comme un fait social par opposition à l'acte d'un individu isolé. Un crime éminemment social, qui déborde de la simple sphère privée. Il ne suffit pourtant pas que le crime soit médiatisé dans la société pour qu'il devienne un attentat. Un tueur en série, sur lequel on pourra réaliser des biopics, commet bien des crimes et peut être médiatisé. Ce n'est pas pour autant qu’Émile Louis est un terroriste. Simplement un pervers violeur sexuel psychopathe dégueulasse.

                                                                                                                         Chui même po un terroriste, biloute !

L'attentat est une violence politique spectaculaire

Qui décide qui est terroriste ? Et d'abord, qu'est-ce que le terrorisme ? Beaucoup de juristes se sont cassés les dents pour trouver une définition opérationnelle du terrorisme. Mes cours de droit commencent à dater, mais je crois pouvoir dire sans trop de risques qu'on peut utiliser la méthode dite du faisceau d'indices pour identifier juridiquement un attentat. En gros, on liste une série de caractéristiques, de critères qui font que certains crimes seront des attentats terroristes par l'empirie, par l'étude des cas connus d'attentats. La violence. Le crime. L'onde de choc sociale. Mais surtout, le caractère indiscutable de fait politique de l'acte terroriste, l'attentat. Le fait que l'attentat relève d'une dimension politique (au moins) double : dans la démarche des commanditaires et/ou auteurs de l'attentat et dans la réponse apportées par les autorités politiques subissant l'attentat sur leur territoire. Ici, ce qui nous intéresse, c'est bien la question de la réponse politique à apporter à cet attentat. Pour résumer, et parce qu'on se contentera de cette définition partielle pour notre réflexion, l'attentat terroriste est une violence politique spectaculaire.

De l'évidence d'être Charlie

Puisque nous parlons de politique, nous parlons nécessairement d'agir non pas directement sur la réalité sociale et matérielle mais bien sur des représentations. Il nous faut donc appliquer une grille de lecture de la société française nécessairement partisane mais qui se veut pouvoir devenir majoritaire : nous entendons donc contribuer à ce débat de notre point de vue de jeune con de gauche qui fait la guerre culturelle aux droitistes. En ce sens, l'union nationale, mantra des incantations vallsistes, nous parait pertinente pendant le temps du nécessaire recueillement pour digérer l'acte impensable. Mais le deuil ne dure qu'un temps. Nous sommes allés marcher parce que cela relevait de la simple décence humaine, car "être Charlie" était pour nous une évidence, que nous n'avons jamais débattue entre amis. Le sens de la connerie et de la satire sont pour nous si évidents qu'ils nous paraissaient relever du fameux "sens commun" que cherchent à révéler les sociologues. Etre Charlie était déjà un implicite; un pré-requis pour nous. Nul besoin donc de l'afficher sur des pancartes ou de se battre pour acheter l'exemplaire tant convoité du journal pour obtenir son label de Charlie. Il suffit juste de constater que le fusil n'est pas une réponse au crayon du dessinateur. L'union nationale nous parait totalement hors de propos quand nous savons que nos adversaires politiques ne se gêneront pas pour réclamer les pires saloperies liberticides au nom de la Nation qu'ils salissent. Faire une offre politique claire qui permette de rêver d'une société plus vertueuse au lieu de redouter la prochaine élection de peur qu'elle ne conduise au pire (souhaité par certains), c'est l'urgence.

L'attentat est impensable

Partons donc à la rechercher des causes politiques profondes qui ont pu mener aux événements qui font de 2015 une année qui déjoue tous les pronostics des commentateurs politiques en une semaine : 2015 peut en effet être pire que 2014. Il ne faudrait pas y voir une fatalité, si nous savons tirer les bons enseignements qui conduisent à ce que l'impensable se produise. L'attentat est impensable par nature : l'onde de choc social provient de la surprise qu'on éprouve collectivement quand on se rend compte que le monopole de la violence légitime étatique reste une théorie de philosophie politique et rien d'autre. Il est impensable par le gigantisme du choc qui écrase tout le reste du débat public. La tuyauterie habituelle de l'information est saturée par les conséquences de l'acte. Impensable en lui-même sur l'instant, le temps de saturation de la tuyauterie médiatique est directement proportionnelle à la charge symbolique suscitée par l'explosion politique qu'est l'acte terroriste. Dans le cas présent, les remous de l'actualité n'ont pas fini d'être affectés par ce tsunami.


      Le mec qui s'apprête à faire déborder l'actualité

Rupture des clauses primordiales du contrat social

Nous consentons à l’État avant tout parce qu'il produit de la sécurité, la stabilité pour éviter la guerre de tous contre tous, parce que l'homme est un loup comme dirait un gars qui a écrit un bouquin dont le titre ressemble au nom d'un pokémon2. C'est un peu la base du contrat social qu'on explicite quasiment jamais. Politique et violence sont intimement liées. J'ai l'impression d'enfoncer des portes ouvertes. Si la politique est le moyen que nous avons trouvé pour arrêter de nous faire la guerre de tous contre tous, et que certains pensent devoir faire la guerre contre tous, cela relève bien de la responsabilité du politique de répondre. Il faut donc analyser ses défaillances pour pouvoir proposer des politiques transformatrices efficace. Une bonne politique transformatrice remonte aux racines d'un problème et s'attaque à ses causes profondes. Par exemple, dans le cas des inégalités entre les femmes et les hommes, les féministes sont convaincu-e-s que la racine des inégalités est située dans l'impact des stéréotypes sociaux de sexe, qu'il convient donc de changer, par l'éducation. Nous avons personnellement tendance à croire que quand le débat porte sur l'éducation pour mettre en œuvre une politique transformatrice, c'est un signe de bonne qualité du débat. Pour aller vite, « ouvrez des écoles attractives et vous fermerez des prisons répulsives» est un truc auquel on croit bien en tant que grille-pain. Ça doit pourtant être un hipster à barbe qui a dit ça.

"C'est toi le hipster qui lit un blog mediapart, pas moi, fils de ta mère"

Donc, on va chercher le mobile du crime politique spectaculaire qui m'a empêché de vous souhaiter une bonne grosse année 2015 de merde pendant quelques jours. Aujourd'hui, le temps de la digestion est terminé. Il convient d'avaler ces faits politiques et qu'il ressorte de tout ce transit intestinal appelé le débat public quelque chose qui soit  plus consistant, pas comme les étrons bloguesques qu'on peut lire ici ou là. Il faudra être d'une vigilance particulière sur les conséquences législatives de ces attentats. Les droitards n'hésiteront pas à dégainer très vite des propositions aussi grossières qu'inefficaces.1 Il me semble que les faux procès en angélisme n'ont pas lieu d'être tant que notre robocop national sera vice-roi et premier condé de France et de Navarre. Ceux qui rêvent d'un état omniscient et autoritaire ont cependant toujours soif de nouvelles lois si peu traduites en décrets d'application pour doper leur popularité auprès des électeurs ignorants de ce que deviennent les lois actuellement quand elles quittent le parlement.

"Oui, je suis un robot. Mais un robot avec un seul testicule. U-ni-té."

Où sont nos représentants ? Il faut battre le parti du statu quo

Des questions se posent donc dans le débat politique au sens le plus profond du terme : quel place redonner au politique ? A ce stade de mon processus d'onanisme cognitif quelques pistes se dégagent. Le retour du religieux est aussi le symptôme d'une société malade. Malade de l'absence d'espoir et de perspective qui conduit à faire plus confiance à des youtubeurs complotistes ou à des imams auto-proclamés qu'à la parole publique. Cela n'est pas sans lien avec la perte de capacité politique des gouvernants, consentie, voulue et validée dans les votes des élites. Reparler de souveraineté, redonner la priorité à la politique sur des indicateurs macroéconomiques supposés refléter l'état de nos sociétés, faire de la politique de civilisation. Montrer que l'élu a une ambition plus profonde que sa réélection à vie et qu'il s'en donne les moyens. Il est très bon d'avoir des engagements sur l'inversion de la courbe du chômage, mais cela ressemble à un suicide politique quand la seule solution proposée réellement par les gouvernants soit de s'en remettre aux caprices des cycles économiques. Ils ont attendu la croissance, ils seraient tout aussi capables d'attendre Godot jusqu'à ce que mort s'en suive. Ne baissons pas les bras, créons, imaginons reprenons le pouvoir face aux vieux bastions du parti du statu quo en investissant tous nos espaces, la rue, et leurs prétendus pré-carrés : les institutions que nous dynamiterons de l'intérieur. La contrainte écologique et sociale est déjà suffisante à nous faire réagir ; quand elle se double d'une crise quasi-spirituelle des politiques ayant abandonné leur fonction tribunicienne pour devenir des managers du présentisme, l'engagement devient une urgence vitale. Et toujours trop risqué. Salut, Oncle Bernard et tous les autres.

Notes de pied

1 : Faut-il préciser qu'être de droite deviendra quelque chose de plus en plus extrême au fur et à mesure que le pire s'avancera sous le règne de la supposée gauche ? La droite est désormais extrême par sa nature même. Si elle ne l'est pas, c'est qu'on parle du centre, pas de la droite. Un centre qui réunit tout ce qu'il y a politiquement entre un Raffarin et un Manuel Valls, c'est-à-dire l'épaisseur d'un papier de l'ami Bolloré, à ne pas confondre avec l'ami du petit déjeuner. La droite étant le parti de la peur et le centre étant le parti du statu quo, la gauche ne peut qu'être celui de l'espoir. Du changement c'est maintenant

2 : Quel pokémon évolue presque en souverain politique au sens de Hobbes? Jeu-concours pour une 205 GRD de 1983 (487000km) à gagner, répondez en commentant sur tous supports !

C'est de la bonne came

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