[Ici au quartier #7] Mauvais endroit, mauvais moment

Ali m'apelle depuis Lyon.

Il est acteur et metteur en scène de théâtre.

C'est en remontant à ses racines paternelles, algériennes et populaires, qu'il a fini par s'intéresser à Beaubreuil pendant ses études à Limoges. Il habitera le quartier le temps de monter son spectacle : « Beaub' » .

Une pièce-portrait du quartier.

Plus tard, son spectacle connaîtra plusieurs représentations, dont deux ici, directement dans le centre commercial de la Coupole. 
Ali me rappelle que le récit du quartier, c'est aussi en miroir le récit d'un ailleurs, d'un bled, de racines et d'une identité plurielle.
Et c'est ce récit-là qui va bercer les prochains mois de rencontres auxquelles je me prépare.

[Quelques nouvelles du projet : ça y est, le livre édité est enfin arrivé ! Et en voici la couverture imprimée, ci-dessous. Courant septembre, les premières personnes ayant participé d'une manière ou d'une autre à sa réalisation en ont reçu un exemplaire gratuitement. Je parle ici de toutes personnes que j'ai rencontré, qui m'ont aidé et qui figurent dans ce livre de manière reconnaissable, habitant·es, acteur·ices de quartier et partenaires du projet. C'est aussi pour moi le moment de vous annoncer que le livre paraîtra officiellement en librairie le 7 novembre prochain, disponible en commande chez vos libraires favori·es, pour celles et ceux intéressées par la version papier intégrale de ce travail. Il coûtera 25 euros et il est édité par les éditions Ouïe/Dire.

C'est aussi pour moi l'occasion de répondre à vos commentaires et interrogations légitimes concernant le modèle éditorial de ce livre, et plus particulièrement par rapport à la mention "financé par Limoges Métropole" en description de mes posts.
Pourquoi le mentionner ? Certain·es y détecteront une intention de communication, d'autres y verront un souci de transparence. Je laisse à Limoges Métropole le soin de sa communication et je me contente de vous expliquer ma démarche : par souci d'honnêteté envers les lecteur·ices, il m'apparaît fondamental de situer clairement le cadre dans lequel ce travail de collectes d'histoires et de témoignages a été réalisé. Il me semble crucial de faire apparaître les leviers économiques qui ont rendu cette enquête possible pendant les 18 mois de sa réalisation. De même que je mets en avant le rôle déterminant des éditions Ouïe/Dire, qui ont accompagné le développement éditorial de ce livre, il m'est nécessaire de mentionner l'importance opérationnelle de la collaboration, mise en place avec la petite équipe de travailleuses de Limoges Métropole qui m'a invité à me lancer dans ce travail dessiné et fait confiance au cours de cette réalisation.

L'ANRU, via la compétence des métropoles engagées dans des processus dits de "renouvellement urbain", alloue des budgets spécifiques à des opérations de collectes de témoignages et de mémoires des quartiers détruits et rebâtis. Texte, radio, vidéo... chaque métropole est alors libre de mettre en place (ou non) des projets auprès des habitant·es concerné·es et c'est donc avec l'envie de raconter cette histoire en bande-dessinée que deux travailleuses de Limoges Métropole sont venues me trouver en 2023. Je leur ai présenté un vaste projet d'enquête dessinée qui me prendrait deux ans, requérant l'intervention d'un éditeur professionnel et la nécessité de porter un discours personnel, sensible et autonome des intérêts politiques ou communicationnels de Limoges Métropole. Elles ont accepté ce projet et c'est dans ce contexte-ci que j'ai pu le développer, en lien avec cette petite équipe investie et enthousiaste. Par la suite, les éditions Ouïe/Dire, basées à Chamiers (Périgueux), familières du lien entre récit BD et politiques urbaines, ont accepté de transformer ce projet en livre. Cette aventure est donc avant tout une expérience de collaboration entre un auteur, des habitant·es, une institution et un éditeur.

Si je souhaite cette transparence, c'est parce qu'il me paraît important de rappeler que le secteur de l'édition traverse une crise importante et que le travail des maisons d'éditions indépendantes et des auteur·ices, s'il a jamais été sécure, est aujourd'hui encore plus menacé qu'il ne l'était hier... tout simplement parce que le soutien aux métiers de la culture semble devenu absolument secondaire dans ce paysage. Il m'importe donc de dire que ce livre, publié au millier d'exemplaires et distribué gratuitement à la centaine de personnes et de structures des deux quartiers engagées dans cette démarche, n'aurait jamais existé sans le soutien financier de l'équipe avec laquelle j'ai travaillé et, par extension, celui des institutions ANRU et Limoges Métropole. C'est avant tout cet engagement là qui m'a permis de déployer, sans l'angoisse des lendemains bien connue des auteur·ices, ce travail au cours des 18 mois de sa création, de la première idée au dernier coup de crayon. C'est aussi pour moi l'occasion de montrer que de tels partenariats sont possibles, avec des partenaires institutionnels, pour peu que chacune des parties ait envie d'y mettre du sien. 
Pour autant, ce livre n'est en rien supposé se faire le reflet des opinions des institutions ou des élu·es qui ont permis de le financer. Ce récit est la simple trace de mon cheminement personnel auprès des gens que j'ai rencontré. Comme toute forme de collaboration, elle implique des désaccords, des arbitrages et des compromis car le "renouvellement" d'un quartier n'est pas un sujet anodin. Loin s'en faut. Cependant, le but de cet ouvrage n'est pas de nourrir une analyse critique et complète des processus de renouvellement urbain mais de donner la parole aux habitant·es désireu·ses de raconter leur quartier. Des centaines d'autres livres ont été écrits et seront écrits sur le renouvellement urbain, bien heureusement. 

Je vous laisse donc poursuivre votre lecture à la lumière de ces éléments de contexte, en espérant que cela vous permette de comprendre les qualités et les limites d'un pareil projet.

À vite ! ]