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Billet de blog 5 avril 2016

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Compte rendu

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

             Au fur et à mesure que l'on avance dans ce roman polyphonique, la diversité des points de vue se double d'une triple mise en abyme : un personnage tente de répéter le récit que lui a fait un autre personnage qui le tenait lui même d'un troisième, lequel en avait entendu parler par un quatrième. Il s'adresse à un compagnon qui a lui-même ouï dire de cette histoire d'une façon tout aussi indirecte et lui donne la réplique, tentant de préciser un point, questionnant sur un autre, ajoutant une péripétie. Or, ces narrateurs successifs sont, à l'image des protagonistes, des individus extraordinairement émotifs ; troublés, hésitants, ne sachant plus exactement ce qui leur fut raconté, se souvenant tout de même vaguement des tâtonnements de leur interlocuteur, cherchant aussi à restituer au plus près et donc à comprendre les émotions ressenties non seulement par les héros de cette saga, mais aussi par celui qui leur en fit le récit avec tant de trouble et par celui dont il l'avait entendue dans un commun bouleversement, sans oublier leur propre émotion qu'ils souhaitent clarifier à leurs propres yeux autant qu'aux yeux de leur vis-à-vis, ils ne cessent d'ajouter des commentaires, consistant souvent en de longues parenthèses au bout desquelles le lecteur doit, s'il ne veut pas perdre le fil, se reporter quelques pages en arrière afin de se remémorer ce qui était dit avant qu'elles ne s'ouvrissent ; s' il ne le fait pas, dans son élan de lecteur et comptant sur la suite pour l'aider à s'y retrouver, ce en quoi il se montre exagérément naïf, car la suite ne va qu'embrouiller davantage et la trame des événements et la teneur des sentiments de l'un ou de l'autre, il en viendra, ce lecteur, à souhaiter disposer d'un résumé des faits et, conscient que nul autre que lui ne pourra lui fournir un tel document, entreprendra peut-être, crayon en main, de reprendre la lecture de ce roman, cette fois-ci depuis le début. Mal lui en prendra, car son brouillon de résumé se chargera peu à peu de ratures, d'ajouts en marge ou en bas de page, au gré des hésitations, corrections et changements de perspective, au point que ce mémento, à supposer que ce lecteur soit épris d'exactitude, atteindra, voire dépassera (s'il y ajoute ses propres tergiversations) la longueur du roman en question.

Bidule

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