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Billet de blog 22 juillet 2016

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

L’âge, avec délicatesse, a posé des rides sur la peau claire et veloutée de son visage dont les traits sont d’une sérénité lumineuse et touchante. Il parle avec lenteur et douceur sans pose ni fausse modestie, dans un rythme apaisé, ayant le désir d’expliquer avec simplicité et justesse leur parcours de vie, leur départ du Centre de la France et les cinquante ans de vie à la capitale. Il prend juste le temps de partager cela, avec son épouse aussi. Il dit de belles choses : « Vous comprenez, si l’être humain ne fait que travailler, alors, ça ne va pas… Faire des trajets, travailler, recommencer ainsi tous les jours… On devient un robot, la vie n’a plus de sens. Nous avons tous besoin d’autre chose… » Il dit aussi : « J’étais un artisan et je suis maintenant à la retraite depuis plus de quinze ans et jamais je ne m’ennuie ». Il ajoute, les mains toujours posées sur la table, des mains fines de mélomane : « Celui qui s’ennuie à Paris, je ne peux pas le comprendre, c’est une ville si belle ! Nous nous promenons tout le temps, nous allons d’une librairie à un commerce, nous déambulons entre les parcs et les expositions. » Sa femme sourit, complice. Elle ajoute qu’ils travaillent aussi dans le modeste jardin de leur maison de banlieue. Ils s’enquièrent d’elle, la femme bien plus jeune qu’eux avec laquelle ils parlent depuis quelques minutes dans ce restaurant de quartier où ils viennent de temps en temps. Ils l’écoutent vraiment, reconnaissent que les temps ont changé, que le rythme s’est accéléré et qu’ils ne voudraient pas vivre ce que les jeunes générations subissent. Ils se sentent solidaires des difficultés qu’ils constatent et déplorent leur impuissance à changer les choses.

Ils ont fini leur repas et s’apprêtent à saluer la jeune femme. Ils prennent le temps de la quitter. Chacun la remercie pour cet échange. Lui ajoute, en gardant un peu sa main dans la sienne : « Je vous souhaite une douce et longue vie. » Ils quittent la salle et sortent dans la rue ensoleillée. Un bruit contre la vitrine attire le regard de la femme restée à sa table, émue. L’homme la salue une ultime fois d’un geste de la main dans un sourire continu et tendre. Ô merveilles !

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