Le Truc

Abonné·e de Mediapart

118 Billets

0 Édition

Billet de blog 23 octobre 2017

Le Truc

Abonné·e de Mediapart

Après

Le Truc

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Seule, elle longe la mer, elle marche le long de la rambarde blanche sur un large trottoir. Elle marche lentement dans la douce tiédeur du printemps, le regard vers la mer ou vers le port, au loin devant elle. Elle sourit vaguement et se sent bien. Sur la plage, quelques personnes lisent ou se reposent. « Viens, Aline. Mais, viens ! » Elle ne peut s’empêcher de fixer pour quelques secondes la scène d’une femme aux bras tendus qui demande à une petite fille d’avancer avec elle. C’est la détresse dans le « mais » qui l’a appelée. « Viens, Line, danse. Mais, viens, danse avec moi ! » C’était il y a longtemps, dans une grande maison où les invités étaient nombreux. Ils allaient et venaient dans la salle principale ou sur la terrasse. Ils buvaient, certains dansaient et d’autres mangeaient au hasard des buffets. La piscine éclairée créait le décor parfait d’un samedi soir de fête par un soir d’été. Maxime était loin, comme d’habitude. Elle, elle discutait avec une amie, elle savait déjà qu’il ferait comme à chaque fois : il mangerait et boirait trop, il ferait le joli cœur-son besoin irrépressible de plaire. Il ne s’occuperait pas d’elle. Elle avait d’ailleurs eu l’idée de prendre sa voiture ; pour la petite et pour elle peut-être. Il rentrerait sans doute plus tard, bien après elles. Les femmes de la soirée étaient belles, élégantes. Elle les connaissait presque toutes depuis longtemps mais le danger était partout, elle le savait bien. Elle dégustait une coupe de champagne, riait avec certains et surveillait de temps à autre Line qui jouait avec une autre petite fille. Par une porte-fenêtre, elle vit une belle femme blonde monter l’escalier qui menait aux chambres. La main froide sur la flûte, elle chercha en vain son mari du regard, entra dans la salle et vit Line. Les bras tendus, elle dit d’une voix basse et blanche : « Viens, Line, danse. Mais, viens, danse avec moi ! » Et la petite restait immobile, les bras le long du corps comme apeurée. Elle marche toujours. Elle retrouve le port et le soleil qui s’étend sur la coque d’un bateau. La femme est loin maintenant. Tous les autres aussi. Elle avance, les mains dans les poches de sa veste blanche. Elle regarde à nouveau la mer. Loin, oui, mais pas assez encore…

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.