En boucle, elle dit : « je suis surdouée, je suis une personnalité à haut potentiel ; tous les tests l’ont établi ». En boucle, elle dit : « C’est cellulaire, c’est cellulaire. Tous les traumas sont inscrits dans les cellules. C’est la mémoire cellulaire. » En boucle, elle dit : « Et cette petite âme qui a choisi de s’incarner là ! C’est cette petite âme qui a choisi cette maman. » En boucle, elle dit : « Ce n’est pas par hasard si j’ai fait deux filles Scorpion. Ce n’est pas par hasard… ». En boucle, elle dit : « Pour moi le travail sur soi doit se faire en pleine conscience, en pleine conscience. » En boucle, elle dit « Ahlalalalalala ! Ahlalalalalala ! » En boucle, elle dit : « Je suis autiste, oui, évidemment. Je suis autiste. » Elle rajoute toujours : « Toi-aussi d’ailleurs ». Elle a déjà dit d’ailleurs : « Toi, tu n’as rien fait : ni mari ni enfant. » Quand elle ne parle pas, elle chantonne tout le temps, tout le temps. A chaque fois, devant la photographie du chat, elle dit avec la voix d’une enfant de quatre ans : « Comme il est joli ce petit chat ! Comme il est joli ! ». Une fois, elle sonne un dimanche à 8 heures du matin, en pleurs et hoquets, détruite par une relation amoureuse qui lui est néfaste mais dans laquelle elle persiste, persiste.
Tous les conseils sont rejetés : écrire ? non, non, je ne sais pas bien écrire. Dessiner, peindre ? non, non, ce n’est pas pour moi. Lire ? non, non, je ne lis pas.
Appelez-moi docteur ou ange ou démon, qu’importe ! Le docteur, très incompétent et très fatigué des transferts, contre-transferts et de l’absence totale d’amélioration du sujet, ferme son cabinet et part loin, loin…