Conjuguer au présent
Compter, recompter, espérer, dépenser, regretter, marchander, prier, demander, supplier et recommencer.
Est-ce vivre que de conjuguer ainsi son existence au présent et jamais au futur ?
Est-ce vivre que de subir sans fin ces cycles infernaux jusqu’à l’usure ?
Ces mains d’en-haut qui maintiennent les têtes sous l’eau mais qui invitent prendre sa vie en main.
Ces mains d’en haut qui tapent dans le dos en disant « mes pauvres, c’est inhumain » mais qui poussent assez fort pour faire tomber « ceux qui ne sont rien ».
Devoir, prévoir, sursoir, croire, savoir, pleuvoir, décevoir.
Ce qui blesse notre âme, c’est de voir ce monde heurtoir ; le honnir, mais dépendre de lui comme un sujet de laboratoire.
Être bercé par cet ailleurs brillant sans jamais pouvoir ne serait-ce qu’effleurer sa douceur.
Se résigner à n’être qu’une variable d’ajustement pour les rouages d’une machine qui exclus ou rassasie à en être plus que repu.
Les têtes se baissent, les corps restent à leur place, battus.
Choisir, rugir, périr, servir, produire, tenir, agir, détruire, bâtir.
Nous sommes à la croisée des chemins et un jour prochain il faudra changer nos souvenirs.
Conjuguer sa vie au futur n’est plus une largesse concédée à ceux d’en-haut dont le cuir, sans cesse s’épaissit.
Cet avenir doit être le bien commun d’une humanité soudée autour d’un cri.
Le cri de ceux qui veulent vivre, le cri de ceux qui ne veulent plus seulement survivre ; ne plus penser à demain mais à un aujourd’hui infini.
Le Horla 06/02/23