SANS TITRE MAIS PAS SANS ESPOIR
Ce billet sera bref tant il semble de bon sens pour ses autrices et auteurs ; et tant il serait inutile de développer une argumentation richement développée pour convaincre qui ne le serait pas par ces quelques mots.
La force et l'avenir de Lucie Castets comme figure de proue du NFP et de possibilités de changements pour un grand nombre de personnes est d'avoir, d'entrée, indiqué que sa méthode gouvernementale s'articulerait projet par projet, que sa perspective stratégique était de tenter et peut-être de pouvoir obtenir, dans cette Assemblée parlementaire éclatée, des majorités mouvantes et différentes selon les enjeux de ces projets. Quand d'autres s'entêtent à répéter l'antienne, s'agissant du NFP, "tout le projet, et rien que le projet", elle a la lucidité de comprendre la bêtise d'une telle obsession enfantine. Nous sommes d'ores et déjà quelques un-es à lui voir un destin présidentiel fédérateur à gauche, seule capable de maintenir un cap dont les conditions de possibilité seraient toujours très clairement arrimées à la réalité et non aux fantasmes.
L'occasion de la niche parlementaire, qui dans les derniers jours d'octobre, permettra au RN de déposer une procédure d'abrogation de la dernière Loi sur les Retraites doit être utilisée dans cette même perspective stratégique. Ce projet sera déposé par le RN, certes ! Mais le voter ce n'est pas voter pour le RN ni avec le RN, c'est voter pour et avec toutes celles et tous ceux qui espèrent l'abolition de cette loi ce qui est un préalable à toute renégociation qui pourraient à ce moment-là se différencier les unes des autres. Attendre de pouvoir la déposer soi-même serait aussi stupide que la stratégie d'un général, à l'approche d'une bataille qui s'annonce, de ne s'engager que s'il pourra tirer le premier...
De toute évidence, le RN s'en fera une gloriole comme il le fait maintenant pour ce qui concerne le choix de Michel Barnier comme premier ministre, alors qu'en fait ce que fait le RN avec ce renoncement, préalablement annoncé, à toute censure ce n'est pas une stratégie qui lui sera très utile ; elle le sera bien davantage à Macron. On le voit déjà...
Les électeurs et électrices du RN, à part effectivement un pourcentage significatif de personnes véritablement d'extrême-droite, pour des raisons nationalistes, racistes, et/ou d'appartenance de classes mais aussi parce que ce RN est aussi, sur le mode de l'auberge espagnole, le refuge de bonapartistes, de royalistes etc., d'un autre siècle, sont pour l'essentiel des personnes abusées, trompées, ou qui se trompent eux-mêmes parce que le doute méthodique des Lumières et certains aspects de la culture sont restés loin d'elles.
Le peuple manque disait Deleuze. Ce ne seront jamais des critères communautaristes (même ce pseudo-concept pseudo-stratégique "les quartiers seulement les quartiers, le reste on s'en fout !") qui permettront de détromper qui doit l'être. La critique de toutes les religions reste la condition de toute critique, comme le disait Marx ! Les seuls critères de la lutte de classes sont toujours des critères d'appartenance classe dans les rapports de production. Rapports de production, compris non seulement comme production des marchandises mais aussi comme production des idéologies ! Dans la Société du spectacle, les rapports sociaux sont médiatisés par des images ; ce n'est pas en les utilisant que se forge l'esprit critique des citoyennes et citoyens républicains et démocrates mais en les déconstruisant TOUTES. Ce qui compte ce ne sont pas les stratégies électoralistes mais des stratégies politiques c'est à dire produire du sens et de la conscience. Il ne s'agit pas de parler à des "bulletins de vote" mais à des personnes citoyennes en tout respect, en toute élégance, en toute empathie...
Croyez-bien que si une telle situation n'était pas saisie de façon quasi opportuniste par le NFP les conséquences en seraient très lourdes et durables ? Que dirait le NFP, lors de possiblement proches nouvelles législatives, à propos de cette loi sur les Retraites s'il s'abstient dans la situation qui vient ?
L'abstention ne suffira pas et serait une lâcheté...
Dans le livre MES INSCRIPTION 1945-1963, publié chez ALLIA, Louis Scutenaire propose une collection de notations précises, d'aphorismes précieux d'une ou deux lignes, de propositions enjouées ou déjouées, cyniques ou d'une lucidité de scalpel. Comme celle-ci que nous vous proposons en manière de salut :
C’est l’après-dîner du samedi. Quatre ouvriers d’un âge mûr devisent accotés à la maison de l’un d’eux. Ils portent les vêtements de travail – frais reprisés, lavés et repassés – qu’ils saliront la semaine prochaine. Bien qu’ils soient fort maigres, ces travailleurs ont l’air vigoureux et, bien qu’ils soient déjetés par les besognes, une allure fière.
La petite rue où ils causent est d’un côté bordée par leurs demeures, maisons aux grandes fenêtres et vastes qui furent peut-être de commerce aux temps passés ; de l’autre côté par les bâtiments de briques rouges d’une gare désaffectée et d’un garage. L’hôpital, avec ses murs de pierres grises, est au bout de la rue.
Les ami-es de Gavroche, ce 18 septembre 2024