Combien sommes-nous à subir la mécanique d’une institution mal faite ? À faire des concessions jour après jour sur ce que nous voulons ? Nous abdiquons au quotidien, en nous laissant faire par des choses savamment disposées. Ce n’est pas une puissance naturelle suprême qui a créé cet ordre qui blesse, tue et humilie ; mais des entreprises dans lesquelles nous sommes souvent impliquées. Les monstres qui nous commandent sont constitués des multitudes de petites forces que nous leur donnons (La Boétie). C’est une série de renoncements individuels qui donnent naissance à ces mauvaises institutions. Et pourtant il n’y aura de solution que politique, dans l’organisation collective.
De nombreuses personnes pensent qu’en réformant leur « Moi », elles iront mieux. Elles pensent que la cause de leur mal-être est en elles. Elles cherchent désespérément à aller mieux, en acceptant les choses telles qu’elles sont. Mais ce n’est que du mauvais stoïcisme. Seul le marché du développement personnel prospère dans les ruines du capitalisme.
Il est impossible d’aller bien, dans une société où les institutions nous échappent. Car la tristesse naît de l’impuissance. Ne pas maîtriser son corps, ne pas maîtriser sa vie, ne pas maîtriser les fins que l’on poursuit, c’est n’être qu’un pion sur l’échiquier des gouvernants. Et un pion ne peut pas être heureux, à moins d’être assez diverti pour oublier qu’il n’est qu’un pion.
Il nous faut retrouver une emprise sur le cours social, et cela, nous ne pouvons le faire seul. Il est donc indispensable de faire de la politique pour être heureux. Il faudrait d’ailleurs qu’elle soit vue comme un moyen collectif d’accroître notre puissance, et non comme une activité professionnelle ou un passe-temps de retraité.