Les castors sont de retour. Cette fois encore, nous n'aurons pas le choix entre la droite et la gauche, entre deux projets de société, mais entre la droite et l'extrême-droite. Cette fois encore, les politiciens et journalistes défilent pour demander d'aller voter Macron pour faire barrage à l'extrême-droite. Quiconque refusera de se livrer à l'exercice se verra jeter l'opprobre. Mais quel est ce Macron qui veut jouer le rôle de rempart de la démocratie et du vivre-ensemble ?
Le Macron autoritaire?
Le Macron dont le barbouze matraquait des manifestants avec un brassard de police procuré illégalement pour prendre un peu de plaisir ?
Le Macron aux pleins pouvoirs qui a gouverné seul par ordonnances au mépris du Parlement au nom de l'état d'urgence sanitaire et ce durant deux ans?
Le Macron qui a organisé la répression violente des gilets jaunes et dont le bilan s'établit à 3000 blessés, 350 blessés à la tête, 30 éborgnés, 5 mains arrachées et même 1 décès ? Et dont la police aux ordres a ainsi blessé plus de manifestants en un an que durant ces 20 dernières années ?
Le Macron qui a positionné l'armée et les blindés dans Paris par peur de son propre peuple ?
Le Macron qui a répondu aux critiques contre les violences policières par « ces mots sont inacceptables dans un Etat de Droit » ? Le Macron qui a répondu aux images de ces violences par une loi sécurité globale qui en interdisait la diffusion ? Le Macron, qui, après nous avoir interdit les mots, nous interdisait donc les images ?
Le Macron qui a interdit une manifestation de solidarité avec les Palestiniens à Paris alors qu'elle se tenait librement dans les autres capitales européennes ? Et a mobilisé pour ce faire 4 200 policiers qui ont placé 45 personnes en garde à vue dont le tort était d'avoir voulu exercer leur liberté d'expression et de manifestation?
Ou le Macron exacerbant la xénophobie?
Le Macron qui plaisante sur les « kwassa kwassa », ces embarcations de fortune qui « amènent du comorien » à Mayotte ?
Le Macron qui veut réhabiliter Pétain ?
Le Macron qui s'affiche publiquement en position de prière à Lourdes et dont le gouvernement défend une conception de la laïcité ouvertement tournée contre l'islam ?
Le Macron qui joue sur l'islamophobie en créant une loi séparatisme et instrumentalise celle-ci pour dissoudre des associations antiracistes, antifascistes ou musulmanes ?
Le Macron qui parade dans le magazine d'extrême-droite « Valeurs actuelles » ?
Le Macron dont le gouvernement a fait sien l'élément de langage « islamogauchiste » emprunté à l'extrême-droite ? Et qui, brandissant ce concept fallacieux, a mené une chasse aux sorcières contre les universitaires inédite dans notre démocratie, animée par les ministres Vidal et Blanquer ? Ce même Blanquer qui a subventionné une conférence d'extrême-droite à la Sorbonne qui n'avait rien de scientifique et tout de politique, contre les « woke » dont le seul tort serait d'être antiracistes ?
Le Macron dont le ministre Darmanin a fait annuler des subventions européennes à une association antiraciste arguant que celle-ci serait « ralliée à la mouvance décoloniale » ?
Le Macron dont ce même ministre a dénoncé « l'ensauvagement » de la France, récupérant là encore un terme raciste d'extrême-droite ?
Le Macron qui trie les réfugiés selon des critères racistes, accueillant à bras ouverts les Ukrainiens mais impitoyable avec les Syriens et les Afghans ? Le Macron qui envoie la police traquer les migrants par des évacuations brutales comme lors de l'insoutenable opération de la place de la République du 23 novembre 2020?
Le Macron qui a divisé par 2 le nombre de visas accordés aux Maghrébins en automne 2021 à des fins électoralistes?
Lequel de ces Macron prétend constituer le rempart républicain ?
Le Macron qui durant ces 5 années de mandat a préparé le terreau dans lequel ont germé les idées d'extrême-droite. Banalisant ces idées en adoptant son vocabulaire mais aussi ses pratiques.
Le Macron dont le gouvernement a exacerbé l'islamophobie pour détourner les classes populaires de la gauche et ainsi se garantir un adversaire facile au second tour.
Le Macron qui supprime tout ce qui fait les conditions de la dignité des classes populaires, un travail et un salaire dignes, une retraite décente, et qui ne leur laisse comme orgueil que celui de pouvoir mépriser les seules catégories encore plus déconsidérées que lui. Le Macron qui s'est appliqué à détruire tout ce qui fait du lien dans la Nation, tout ce qui est commun, à savoir les services publics, pour ne garder que le nationalisme tourné contre l'autre, le différent, l'immigré, le musulman.
Le Macron qui n'a répondu aux revendications populaires que par la répression.
Certains diront qu'ils ne voteront pas pour Macron car de toutes façons on ne peut pas faire pire. C'est faux, il y a toujours pire. Je dirai simplement que cela m'est insupportable. Depuis le quinquennat de N. Sarkozy et encore plus avec son collègue E. Macron, il n'y a plus de différence de nature entre la droite et l'extrême-droite. Ce n'est plus qu'une différence de degré. On peut imaginer que le curseur avec Marine le Pen ne sera pas placé au même endroit mais il se situera sur la même ligne que Macron.
Non, voter Macron, ce n'est pas faire barrage à l'extrême-droite. Cette dernière, en revanche, a été instrumentalisée et encouragée par Macron pour faire barrage à la gauche au premier tour.
LREM et le RN sont du même côté du barrage. Voter LREM, c'est gorger la retenue d'eau empoisonnée dans laquelle baignent les idées autoritaires et xénophobes de l'extrême-droite. Et lorsque le barrage brisera, la puissance décuplée de ce courant sera d'autant plus dangereuse. 5 ans après le dernier « barrage républicain », le score de l'extrême-droite a enflé de 10 points : alors qu'il était de 21% en 2017, il s'élève aujourd'hui après 5 ans de mandat Macron à 31%.
Que ceux qui ont la force de voter Macron le fassent. Mais si l'extrême-droite venait à l'emporter, ce serait la faute de celui qui a voulu initier ce jeu dangereux, pas de ceux qui ont refusé d'y jouer. Et la faute de ceux qui auront voté Le Pen, pas de ceux qui auront refusé de voter Macron.
Après avoir méprisé le peuple et dévoyé la démocratie pendant 5 ans, après avoir foulé aux pieds les valeurs de la République, le président sortant en appelle au vote des républicains. Qu'il vienne le chercher.