Ce billet sera bref, la lassitude vient vite à seulement évoquer la poésie, tant il semble assuré qu'on s'adresse aussi bien à des murs, aussitôt. Ce matin, il pleut et je pense au sud, à des murs de sable, comme ceux à l'arrière-plan d'une photo vue, il y a fort longtemps, dans un livre. Cette photo, c'était celle de Lawrence Durrell charriant du sable à l'aide d'une brouette. Il est petit, rond, souriant en direction du photographe. Cette photo, elle est dans un petit livre consacré à Henry Miller, un petit livre de vulgarisation universitaire, signé d'un dénommé Temple. Frédéric-Jacques Temple.
Ces jours-ci, jours maussades, je lis "Beaucoup de jours" de cet auteur, Frédéric-Jacques Temple donc. Quand j'étais adolescent, enfermé dans ma petite chambre de bout de palier, sans avenir déjà - me semblait-il - parmi tous les livres que je découvrais, il y avait eu ce petit ouvrage consacré à Henry Miller donc, mais aussi, de ce même Temple, une biographie de Lawrence, David Herbert Lawrence. C'était ainsi que ce nom...Dans le livre que je lis aujourd'hui ( lire n'est pas le mot, ce sont des souvenirs, on va d'une page à l'autre, s'en retourne, néglige des pages, s'attarde à d'autres. Grappiller serait peut-être le mot juste) N'importe! Dans ce livre de souvenirs, de quelques souvenirs retenus, reviennent les figures de Miller, de Durrell et d'autres, attachées ou pas à ces premiers. On voyage donc dans l'histoire de la littérature, quelques pans de celle-ci. Et, à la marge, on s'interroge sur ces figures oubliées pour beaucoup ( je me demande encore quels jeunes gens lisent Miller, sans parler de Durrell dont Le Quatuor d'Alexandrie pourtant connut un réel succès lors de la parution de chacun de ses mouvements) et surtout sur le sens de ces livres, tous ces livres sur le sable pour la plupart.
Et cependant....on persiste, je persiste dans ma lecture. Comme si, ainsi, je refusais l'oubli qui guette tout être, l'humanité entière peut-être, dans pas si longtemps. Je finirai ce billet - de bric et de broc, je l'admets volontiers - par un poème lu dans Phares, balises et feux brefs de ce Temple :
Est-ce rouge de rouille
et qui roule
un soleil
ou une ronde lune
qu'incise
un héron bleu
à parements de suie ?
Des brantes passent
cornant
honk-honk-honk-honk
dans le vide du ciel
vert et rose
Long Island
Et ainsi je ne suis plus tout à fait sous le ciel maussade qui menace ce jour, par cette seule incision du héron que je vois maintenant