Pardonne-nous Edward Snowden

Notre vilenie qui est aussi celle de ceux que nous avons élus, est incommensurable, savons-nous encore dans ce pays ce qu’est la honte, celle normalement que provoquent la soumission, la peur panique du maître, le déshonneur, la pusillanimité, la petitesse ?
Mais toi aussi, comment as-tu pu croire un seul instant qu’en informant notre président et ses ministres qu’ils étaient espionnés par celui-que l’on appelle pudiquement notre plus grand allié, que tu allais pouvoir être remercié, gratifié, honoré ? Tes immenses connaissances, ton extraordinaire courage et ton optimisme hors-normes, ne t’ont pas laissé entrevoir la perfidie, le zèle du chien au collier bien serré, les personnalités corrompues de nos gouvernants. Eh oui, ceux-ci se sont au contraire précipités pour tenter de t’intercepter avant tout le monde afin de te livrer à l’allié indigne et ramasser au passage le satisfecit de l’ignominie. Malgré cela tu as persisté à croire que quelque chose pouvait être fait par notre pays pour te remercier des risques incroyables que tu as pris en nous informant des vices et des infamies pratiqués par ton propre pays à l’encontre du nôtre. Oui, tu as pensé pouvoir bénéficier chez nous du statut amplement mérité de réfugié politique, alors que les faits à ton égard et à celui de pas mal d’autres, indiquent hélas que la France se vautre dans des slogans et des mythes auxquels elle est, dans les faits et depuis belle lurette, totalement étrangère.
N'en doute pas, nous sommes aux ordres, taillables et corvéables à merci, et si tu avais encore un doute à propos de notre souveraineté claironnée à tous vents, l’épisode du contrat des sous-marins, signée avec les Australiens démontre que tes compatriotes ont une capacité quasi-infinie à nous faire mal, à nous rabaisser, à nous humilier, ils savent parfaitement combien ils peuvent compter sur notre servilité et sur notre dépendance. 
Pardon encore pour cette trahison, cette absence de reconnaissance, cette maltraitance, mais sache que beaucoup de nos compatriotes sont écœurés par les agissements de ceux qui parlent en leurs noms et auraient beaucoup aimé te savoir parmi nous en toute sécurité.