Pierre Joxe, grand serviteur de l’Etat (il fut entre autres ministre de l’Intérieur, de la Défense, membre du Conseil Constitutionnel), vit, depuis deux ans, une expérience radicale : il débute dans la carrière d’avocat, ne s’occupant que d’affaires concernant des mineurs comme avocat commis d’office. Cette dernière précision a son importance : d'ordinaire les personnages de son rang négocient grassement leur carnet d'adresse ou leur notoriété !
Son livre, Pas de quartier ? (éditions Fayard) s'ouvre sur une série de cas dont il a eu la charge : le ton est très personnel, Pierre Joxe touchant du doigt ce que tout un chacun ne sait que de façon diffuse, intellectuelle... le lien de dépendance entre la criminalité juvénile et la misère sociale, affective, culturelle. La suite du livre est un plaidoyer brillant pour défendre l'évidence de ce lien, les implications et les conséquences que cette évidence devrait avoir sur le fonctionnement de la Justice mais aussi, et surtout, un réquisitoire impitoyable contre les dérives politiques du gouvernement actuel (et des précédents) à propos des mineurs en particulier et de la Justice en général. Cette charge a d'autant plus de poids et de crédibilité qu'elle émane d'un ancien ministre de l'Intérieur et membre du Conseil Constitutionnel ! Elle confirme au passage que le gouvernement actuel est aussi éloigné que possible de l'esprit républicain qui devrait régner dans ces institutions !
Le récit qu’il fait de ce choix et de cette expérience constitue un livre à la fois vivant et très exigeant sur le plan intellectuel.
Nous recommandons également à la lecture deux ouvrages collectifs :
- Manifeste pour la Justice (éditions du Cherche Midi, janvier 2012) : reprend point par point tous les dysfonctionnements de la Justice actuelle et avance des propositions touchant aussi bien la philosophie générale de cette administration que son organisation technique et ses missions fondamentales.
- Contre l'arbitraire du pouvoir - 12 propositions (La Fabrique éditions, février 2012) : plus politique que le précédent, il a le mérite de faire intervenir à la fois des magistrats et des auteurs extérieurs.