
Natacha Appanah était très émouvante à La Grande librairie, lors de la présentation de ce livre. Et puis, cela est arrivé jusqu’à l’oreille de ma fille, et c’est devenu un cadeau d’anniversaire. Chic.
Très beau livre sur la mémoire. Celle des coolies à l’île Maurice, les travailleurs qui sont venus remplacer les esclaves qui coupaient la canne à sucre dans l’île. C’étaient, pour la plupart, des indiens, qu’on appelait les engagés. Un engagement plutôt définitif, puisque presque tous restaient dans l’île. Les ancêtres de Natacha Appanah étaient de ceux-là, et c’est leur histoire qu’elle raconte. Peut-on vraiment dire qu’elle les raconte. Elle nous confie dans le creux de l’oreille leurs vies à Maurice, leurs joies, leurs peines. Et les siennes à la découverte (ou redécouverte) de leurs itinéraires.
Un livre très touchant sur les migrations, les exploités, la lutte des classes qui conduit parfois à mettre les poings… pas sur les i, mais sur la gueule du patron. Livre magnifique, avec photos familiales. Bravo. L’écriture est posée, poétique, sensible. Que dire de plus. Rien, sinon : « […] Tant qu’il y aura des mers, tant qu’il y aura la misère, tant qu’il y aura des dominants et des dominés, j’ai l’impression qu’il y aura toujours des bateaux pour transporter les hommes qui rêvent d’un monde meilleur. […] » (p. 18).
Un autre mauricien, J.M.G. Le Clézio, avait demandé il y a quelques années plus d’humanité à Macron, envers les migrants. Sans effet aucun, bien entendu. Cette « mémoire délavée » est la bienvenue à l’heure où les frontières se ferment, encore et toujours. Et pourtant, il en faut, des « engagés » de tous les pays, pour couper la canne à sucre… Ou pour tant d’autres tâches qui permettent aux riches occidentaux de profiter pleinement de leurs vies de … riches occidentaux.