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« Un exemple de production de la violence militaire masculine », indique le sous-titre. Le mot militaire est souvent assorti aux deux mots violence, masculin. C’est ce que nous montre Pinar Selek dans ce livre. Á partir de l’homme turc, qui se construit à travers six étapes capitales : circoncision, première expérience sexuelle, service militaire, travail, mariage, paternité. (p. 16). Avec pour résultat, l’acquisition masculine du statut de sexe dominant.
Dans nos sociétés très largement patriarcales, rien de très original. Oui et non. Car Pinar Selek insiste sur la spécificité turque, dans le sens où le service militaire y est obligatoire, et réservé aux hommes. Ce qui n’est plus le cas dans nombre de pays.
Dans ce livre, elle reprend les étapes une à une, et nous invite à nous confronter à ce « chaudron militaire » qui conduit à produire, à la sortie, des pères « soldats pour la vie », au service d’un « État turc appelé « État-papa » par la majorité de la population. » (p. 59). C’est bel et bien à cet « État-papa » que Pinar Selek a toujours refusé de se soumettre.
Militante, elle a soutenu bien des luttes en Turquie (luttes antimilitaristes, luttes féministes, de soutien aux marginaux, aux Kurdes, aux Arméniens, entre autres). Elle est accusée depuis 1998 d’un attentat qu’elle n’a pas commis. Elle a fait de la prison, a été torturée, puis s’est exilée.
Dans un premier temps en Allemagne, et ensuite en France. Elle a vécu quelques temps à Lyon, où elle a connu la revue Silence !, ainsi que de nombreux militants alternatifs lyonnais. Je l’avais d’ailleurs écoutée à « La Maison des Passages » lorsqu’elle avait fait une série de conférences en France. Elle enseigne maintenant la sociologie et les sciences politiques à l’Université Côte d’Azur à Nice, tout en maintenant haut et fort son engagement féministe et antimilitariste.
L’acharnement judiciaire, débuté il y a 25 ans, continue. Elle a été condamnée à la prison à perpétuité en Turquie. Un mandat d’arrêt international a été délivré à son encontre par les autorités turques. Un nouveau procès devait se tenir le 29 septembre. Il vient d’être reporté au 28 juin 2024. Une demande d’extradition a été faite aux autorités françaises, qui jusqu’à présent ont toujours refusé.
Ce livre est une réponse de Pinar Selek à cet acharnement judiciaire. Son combat, soutenu par de nombreuses personnalités, continue. Il dépasse largement le seul contexte turc. Le chaudron du patriarcat n’a malheureusement pas de frontières, même s’il n’a pas partout la même température de chauffe.
Á nous de le faire refroidir, aux côtés de Pinar Selak et de tous ses amis. En lisant ce livre, en s’engageant dans les divers combats qu’elle mène, en suivant au plus près ses démêlés avec les autorités turques.
Pour mieux connaître Pinar Selek et ses multiples engagements : n’hésitez pas à lire le livre de Guillaume Gamblin : « L’insolente, Dialogues avec Pinar Selek. » - coédition Cambourakis - revue Silence