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Billet de blog 17 mai 2023

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livre : " La vie clandestine " - Monica Sabolo

Récit d’une partie de la vie de l’auteur, entremêlé avec une recherche sur l’histoire d’Action directe, groupe terroriste qui a sévi en France dans les années 80.

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En quelque sorte, deux romans pour le prix d’un. Roman sans être vraiment roman, d’ailleurs. Récit d’une partie de la vie de l’auteur, entremêlé avec une recherche sur l’histoire d’Action directe, groupe terroriste qui a sévi en France dans les années 80. Ou, plus précisément, sur les deux femmes du groupe, Joëlle Aubron et Nathalie Ménigon.

L’une est décédée, l’autre se cache, ne s’exprime plus. Mais Monica Sabolo finit par la rencontrer. Le livre parle aussi, bien entendu, des hommes du groupe, Jean-Marc Rouillan, qui a écrit assez abondamment, et Régis Schleicher, que Monica Sabolo a aussi rencontré. Hélyette Besse est très présente, personnalité qui a marqué l’auteur, visiblement. Et qui continue de marquer les milieux libertaires, radicaux, sachant qu’elle a toujours refusé le « passage à l’acte violent ». Mais elle a quand même fait de la prison.

« La vie clandestine », c’est bien entendu la vie des militants d’Action Directe. Mais c’est aussi la vie de ce qui ronge Monica Sabolo, qui sort de la clandestinité petit à petit au fil des pages : sa relation avec son père (de fait, beau-père), et les actes « mal appropriés » (c’est souvent le terme employé pour désigner pudiquement ce qui est, tout simplement, du harcèlement sexuel, voire plus selon les cas).

Très beau livre, qui se termine sur l’interrogation éternelle du pardon : faut-il pardonner à ce père (à sa mère ?) qui a fait peser sur sa fille un secret qui l’a dérangée jusqu’à la mort de ce dernier ? Faut-il que Nathalie Ménigon s’excuse, demande pardon ? Et les autres ?

Merci à Monica Sabolo qui m’a fait beaucoup réfléchir sur la radicalité qui peut conduire au terrorisme. Ou ailleurs. Je rejoins les militants d’Action Directe sur la critique radicale de l’État. Mais finalement, Régis Schleicher dit, page 295, « La connerie, ce sont les armes. » Le pacifiste que je suis, et le terroriste qu’a été Régis Schleicher, se rejoignent en définitive. Vertigineux, n’est-il pas !

Autre vertige dans cette question que pose Monica Sabolo page 294 : peut-on devenir un autre ? Elle se la pose au sujet de Régis Schleicher, devenu semble-t-il « un autre homme » après sa longue peine de prison. Sans doute la question peut-elle s’appliquer aussi à Nathalie Ménigon. Mais elle reste, elle, murée dans son silence.

Et Monica Sabolo, est-elle devenue « Une autre » après l’écriture de ce beau livre ? Je pense que oui, et que c’est avant tout pour cela qu’elle l'a écrit. C’est bien. Et bravo à elle. Peut-être, quelque part, suis-je moi-même un peu un autre après avoir lu ces lignes. Mais je me rassure en constatant à près de 70 ans que le terrorisme ne m’attire toujours pas. Tout bonnement, parce que je sais que « la connerie, ce sont les armes ». 

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