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Billet de blog 3 août 2015

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Lutte anti xylella en Corse : un modèle théorique, pratique et scientifique en préfiguration

En Corse, dans une « transparence totale et complète » de l’information, la Préfecture de Région pilote la lutte d’envergure contre la bactérie Xylella fastidiosa. Un dispositif exceptionnel déclenché grâce aux alertes répétées du Collectif des professionnels et des élus insulaire (Culletivu antixylella).

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En Corse, dans une « transparence totale et complète » de l’information, la Préfecture de Région pilote la lutte d’envergure contre la bactérie Xylella fastidiosa. Un dispositif exceptionnel déclenché grâce aux alertes répétées du Collectif des professionnels et des élus insulaire (Culletivu antixylella).
Cette coopération entre les services de l’Etat et la société civile mobilisée constitue, in situ en Corse, un modèle théorique et pratique à l’échelle d’un territoire, et une première en France. Toutefois du côté du Collectif antixylella la vigilance reste maximale et le Conseiller Territorial Saveriu Luciani émet de sérieuses critiques et réserves sur l’ampleur réelle des opérations, deplorant l’absence d’une campagne généralisée d’information de la population. Plus grave il ajoute : « le risque de voir arriver la souche pauca qui anéantit les oliviers des Pouilles est immense. Une double peine serait  infligée à la Corse. La souche multiplex est portée par 56 familles de plantes, dont les prunus, oliviers, agrumes, chênes, vignes, aulnes, platanes, hêtres, agrumes. Selon  les conditions climatiques, elles déclenchent ou non la maladie. L’incertitude est donc maximale. » Il réclame une "enquête européenne" , la protection des variétés locales sauvages insulaires peut-être plus résistantes. Les mesures  dit-il «ne sont pas à la hauteur de l’enjeu. Le déploiement de moyens massifs associant tous les acteurs potentiels est absolument urgent, tant pour la détection que l’informationNons demandons un programme en faveur d’une production locale de plants, une enquête dans les pépinières italiennes plus la protection les îles européennes, des programmes de recherches, la conservation des variétés locales sauvages et cultivées » . Côté Préfecture de Corse , le dispositif comprend une cellule de crise « qui se réunit 3 fois par jour en situation de gestion continue », des communiqués quasi quotidiens, une vidéo (http://www.dailymotion.com/video/x2zo1bi), un numéro vert (0800 873 699), des opérations multiples de traitement sur le terrain, des moyens supplémentaires pour la FREDON (Fed. Reg Défense contre les nuisibles), 

une mission pluridisciplinaire ( un entomologiste, un botaniste, un épidémiologique) arrive le 3 août. C’est à ce dispositif de type Orsec performant que l’on doit les appels des particuliers qui ont permis de détecter en 3 jours à peine, les 5 nouvelles contaminations. Elles ont été révélées le 31 juillet par le Préfet Christophe Mirmand à Bastia lors du Conseil d’Administration, exceptionnellement ouvert, au siège de l’Odarc (Office de Développement agricole de la Corse). Sont concernées dans le Golfe d’Ajaccio les villages de Albitreccia, Bastelicaccia, Peri, Porticcio, et sur la côte orientale la commune Sainte-Lucie-de-Porto-Vecchio. Une liaison courroie de transmission fonctionne à plein bien entre d’une part les Services de l’Etat, et d’autre part les particuliers, les professionnels, le Culletivu antixylella, qui lui-même assure la communication tous azimuts avec les agriculteurs insulaires, les filières et les Chambres d’Agriculture Région 2A et 2B, tous mobilisés et très inquiets pour leurs terres et leurs exploitations. Sont en cours en Corse-du-Sud (récent arrêté du 24/07 ) des opérations d’arrachages des « végétaux hôtes », des désinsectisations, des restrictions de circulation pour tous les végétaux potentiellement contaminés dans un rayon de 10km autour des foyers d’infection. De même les importations de végétaux sensibles à la xylella sont désormais totalement interdites, pour les particuliers comme pour les professionnels. Ce qui ne constitue pas un blocus total mais partiel.
On attend les résultats des prélèvements pour identifier et bien cerner « la souche sous espèce multiplexe » identifiée en Corse, qui serait différente de la xylella fastidiosa italienne dite « pauca » ( qui sévit dans les Pouilles au sud de la péninsule). Comment la cellule de crise opérationnelle interservices adapte-t-elle les mesures de lutte contre la bactérie en fonction des informations épidémiologiques ? L’Agence Nationale de Sécurité Sanitaire Alimentation et Environnement et Travail (ANSES) confirme : sur les « polygales à feuille de myrte- polygala myrtifolia » de Propriano ( patient zéro en Corse), l’identification de la 3 sous-espèce multiplex"  est distincte de la « souche pauca » présente en Italie, sous réserves des analyses en cours. La Préfecture indique : «  l’ensemble des prélèvements effectués sur d’autres végétaux spécifiés sensibles à une ou plusieurs souches de la bactérie au niveau mondial ou hôtes sensibles à la sous-espèce multiplex de la bactérie identifiée en Corse restent à ce jour négatifs. Les prélèvements continuent de manière intensive. »  Trois nouveaux arrêtés préfectoraux sont en préparation. A Propriano sur le site infecté du collège et du village de vacances et dans un périmètre de 100 mètres autour du point d’infection la liste des végétaux à détruire est réduite « aux seuls végétaux hôtes sensibles à la sous-espèce identifiée de la bactérie ». Dans le cercle de 10 kilomètres de rayon (zone tampon): l’interdiction de circulation est limitée aux seuls végétaux « reconnus sensibles à toutes les sous-espèces et souches de la bactérie connues dans le monde ». Cette mesure, obligatoire par la réglementation européenne, offre une garantie de sécurité supplémentaire contre la propagation de la bactérie. 2ème arrêté :  les nouveaux foyers découverts (prélèvements en cours d’analyses à Angers ) seront traités comme à Propriano : arrachages, analyses, destructions de tous les végétaux dans le cercle des 100 mètres, plus surveillance et désinsectisation dans la zone tampon.  Concernanr le troisième volet de l’opération, la Préfecture mentionne : « les 21 prélèvements effectués sur des polygales à feuilles de myrte, concernant tous la Corse-du-Sud. Provenant à priori de différentes pépinières, ils sont revenus positifs à la bactérie Xylella Fastidiosa ». En conséquence, ces éléments matérialisant le danger avéré, la Préfecture de Région refusera toute demande relative au polygale à feuilles de myrte, et ordonne (art. L 250-7 Code rural et de la pêche maritime) la « destruction de l’ensemble des plans de polygales à feuille de myrte présents en Corse ». La Préfecture demande aux particuliers de prendre contact avec l’administration, de ne pas détruire eux-mêmes les plants de polygale. Seul un protocole strict pourrait éventuellement éviter la dissémination de la maladie, assurer les prélèvements et la poursuite de l’enquête épidémiologique. La désinsectisation, l’abattage, le recensement des végétaux hôtes et potentiellement sensibles restent essentiels pour agir sur les insectes susceptibles de transmettre la maladie. Les opération se déroulent grâce aux services de lutte anti-vectorielle du Conseil départemental, de la Gendarmerie nationale, de la Collectivité territoriale de Corse et avec l’appui du Conservatoire botanique national de Corse et de la Direction régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement de Corse. Les désinsectisations sont programmées à Sainte-Lucie-de-Porto-Vecchio, à Porticcio, à Bastelicaccia, à Peri et à Albitreccia. Le produit employé (deltaméthrine) n’a pas d’effet particulier, ni pour les personnes ni pour les animaux. Le temps de dispersion dans l’air est de quelques minutes et il est recommandé à la population de rester à l’intérieur des bâtiments et de fermer les fenêtres pendant les interventions. Ces opérations se déroulent en soirée, moment correspondant aux meilleures pratiques identifiées pour lutter contre les vecteurs de la Xylella Fastidiosa, 

et permettant également de réduire d’éventuels effets indirects sur les abeilles. Le profilage, dans les prochaines semaines, des ou de la souche multiplexe et des sous-espèces de la bactérie,  permettra de  mieux cibler les opérations anti xylella. Sont prévus des points d’étape toute la semaine en préfecture, en présence des responsables du monde agricole et des collectivités concernées.

LV

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