Ils se radicalisent et branchent le défibrillateur, car eux-aussi craquent comme des dizaines de catégories sociales. Qui ? Les Maires Ruraux qui fustigent les « think tank », les « médias simplistes ». Ils accusent la reforme territoriale d’être « ruralicide » Et ils sont aptes à riposter, avec des preuves chiffrées, aux diktats des macro-économistes de papier qui oeuvrent à Paris dans les administrations centrales. Ils estiment que la dotation globale de fonctionnement « sanctuarise », favorise les villes « avec des dotations adossées à un principe injuste où un urbain vaut deux ruraux. » Soit 22 millions de Français sous-équipés sous-dotés, alors que le ratio d’agent par habitant est 3 fois plus élevé dans les agglomérations qu’en zone rurale. Voilà qui va sans doute relancer la circulation sanguine et ressuciter le dialogue entre Paris et ses lointaines régions dévitalisées, négligées, oubliées par des décideurs qui se conduisent en oligarques. Via un vif éditorial signé de leur président Vanik Berberian, pseudonyme « @defibrilators », les Maires Ruraux de France (AMRF) haussent le ton « : « Où est passée la politique d’égalité des territoires ? Assez de bricolage ! Vouloir affaiblir l’échelon de proximité et encourager la concentration des hommes, des activités et des moyens, c’est renoncer à l’aménagement du territoire. Non, non et non ! Nous ne voulons pas de cette réforme territoriale-là. Pas par conservatisme ou immobilisme outranciers, mais tout simplement parce qu’elle est faite en dépit du bon sens. » On en revient donc à cette question cruciale qui fait de la politique en France ? Au profit de qui ? Qui sont les réels décideurs et qui veut absolument annuler « l’échelon de proximité » ? Et ce, alors qu'un député, un infraction avec le code des impôts, souffre dit-il de "phobie administrative". Les maires ruraux, surchargés de tâches, de contraintes en hausse exponentielle, de directives, de rêglementations, d'obligations légales et de vraies responsabilités, ont-il eux, le temps de souffrir de "phobie administrative" ? Les maires ruraux pointent les deviations et failles de la réforme territoriale : « Reporter à plus tard le développement du Très Haut Débit dans les territoires ruraux, c’est renoncer à l’aménagement du territoire. Supprimer le conseil général dans les départements ruraux, c’est renoncer à l’aménagement du territoire. Eplucher les compétences communales comme on le fait jusqu’au trognon avec la pomme, c’est renoncer à l’aménagement du territoire. Mettre la toise à 20 000 habitants pour l’intercommunalité sans tenir compte de la densité de population, c’est renoncer à l’aménagement du territoire. Continuer de considérer en matière de dotation financière que l’habitant des campagnes vaut la moitié d’un urbain, c’est renoncer à l’aménagement du territoire. » Il serait temps clament-ils : « de soutenir les départements qui comptent moins de 800.000 habitants. Il serait temps non seulement d’arrêter de négliger la ruralité mais de la considérer comme un atout pour la France. » Grave et en rupture avec le pacte républicain ils observent que la gouvernance « organise la diète des communes pour mieux les faire disparaître. Une cure d’amaigrissement sans précédent de 51 Mds€, bien au-delà de la contribution des collectivités au déficit national en précisant que les principales marges étaient dans le « bloc communal. Ce n’est pas en étranglant financièrement les collectivités qui réalisent plus de 70 % de l’investissement que l’on relancera l’économie et améliorera la situation de l’emploi. Ce n’est pas en transformant le soi disant mille-feuille en pudding que l’on fera des économies. » Les maires ruraux demandent : « une péréquation digne de ce nom. Ce principe constitutionnel est aujourd’hui le grand oublié avec un exercice sans effet majeur et des outils de calcul qui produisent des effets inverses : ainsi, des communes rurales bénéficiaires de la dotation de solidarité rurale se retrouvent contributrices au Fonds de péréquation et largement perdantes au solde. » Notons que l’ensemble des projets d’aménagements ( équipements ultra locaux comme les grandes infrastructures) , sont tous quasiment au point-mort, faute de dotations. Et ce depuis l’exercice du pouvoir par la droite lors de la présidence de Nicolas Sarkozy. Et que la grande Loi de Transition Energétique, portée par ce jour 9 septembre par Ségolène Royal Ministre de l’Ecologie, représenterait aujourd’hui le seul levier d’avenir, capable de relancer la croissance verte en s’appuyant sur les ressources naturelles des territoires. Notons aussi que la calamiteuse loi sur les rythmes scolaires initiée par Vincent Peillon (PS) révèle elle-aussi une inégalité flagrante et injuste entre les territoires avec un déficit de moyens pour la ruralité. Vanik Berberian conclut : « parce qu’une structure, fût-elle administrative, n’est pas une fin en soi mais un outil au service d’un projet, nous ne prônons pas le statu quo mais un changement de conception, qui proclame haut et fort la volonté et la nécessité d’un équilibre du territoire. » De quoi défibriller les relations entre Paris et les 36 000 communes de France.
L Vittori