11è Comite de Suivi Europe. « Un seul emploi de marin-pêcheur crée 4 emplois induits à terre » rappelle Gérard Romiti Président National des Pêches lors du 11e Comité de Suivi Europe en Corse. Ce diagnostic, banal constat du pays réel, qui est capable de le poser, de financer des solutions rentables, et in fine, d’en évaluer les résultats ? Paris ? Bruxelles ? Ajaccio ? Emmanuelle de Gentili (Conseillère Exécutive, 1ère Adjointe à Bastia) coordonne l’ensemble des processus et des négociations concernant les Fonds Européens en Corse. Parmi les projets et sites visités par la délégation européenne (15-17 oct.) : un catamaran de pêche durable, coopérant avec Stella Mare plate-forme de recherche (R&D) en écosystème marin, une miellerie de terroir en montagne, une opération de relogement pour gens du voyage, un musée des spectaculaires "taffoni". L’intervention européenne dans l'île (comme dans les Régions des 28 Etats), sa méthode et sa philosophie, visent à relancer l'initiative économique locale. Comment fonctionne ce modèle européen de la croissance solidaire qui, pour les régions, s'apparente à un réflexe de survie ? L’Europe s’engage en Corse. Modeste, pragmatique, cette dialectique européenne, tente d’être plus sociale, plus dynamique, plus patrimoniale, explorant aussi l’économie numérique. Un modèle insulaire, altermondialiste, écologique, décroissant… qui crée des emplois en sauvegardant l’environnement. Qui dit mieux ? C’est via ce type de projets que le mieux-disant européen s’exprime, en faveur des régions périphériques. Et en rééquilibrage de la constante prime à la centralité offerte au Grand-Paris, qui perçoit en continu des subventions surdimensionnées. L’Europe, contrairement à la pensée unique diffusée par les médias dominants, n’est pas si « loin », ni si « coûteuse ». Au contraire, la mécanique des Fonds européens compense les manques, absences d’un modèle français bloqué, centralisé, surendetté. Ces programmes européens (2007-2013) totalisent 365 Mds d’€ dont 14 Mrds pour la France et 284 Millions d’€ pour la Corse. Ce billet de blog se borne donc à éclairer ce qui est authentique, concret, palpable, en terme d’emplois locaux, de revenus, d’espoirs. Loin des abîmes et déficits vertigineux de la macroéconomie. L’exemplarité corse s’appuie sur une logique en phase avec l’insularité certes, mais cette force européenne prouve au quotidien, qu’elle est transposable, selon les besoins particuliers de chaque territoire. Contrairement aux apparences : la créativité régionale des entreprises innovantes ne « descend » pas de Paris vers de lointaines provinces. Les start up non délocalisables, les projets collaboratifs, les valorisations ultra locales, les entreprises originales à forte valeur ajoutée naissent en régions, et nulle part ailleurs, dans les secteurs de l’environnement, du numérique, de l’agroalimentaire, du patrimoine.
Le miel de terroir, le relogement des gens du voyage, les "taffoni" géologiques de Roccapina, la recherche fondamentale à Stella Mare (R&D-CNRS- Université de Corse, le prototype Lestrygon II, catamaran de pescatoutisme, une ZA à Bonifacio, des formations au Ntic... De Bastia à Bonifacio : ce 11è comité de Suivi Europe est présidé par Paul Giacobbi, député Président du Conseil Exécutif de Corse et Christophe Mirmand Préfet de Corse. Stratégie globale, organisation de la prospective, évaluations, réunions techniques, visites de site : Emmanuelle de Gentili (Conseillère Exécutive Relations avec l’UE, 1ère Adjointe à Bastia) coordonne l’ensemble des processus et des négociations. Elle a accueilli les délégués de la Commission Européenne : Pierre-Emmanuel Leclerc (DG REGIO), Mario Gerhartl (DG EMPLOI), Elvira Bakker (DG AGRI). Au menu : « le bon déroulement de l’exécution et du financement des programmes européens ». Ces projets d’avenir, en cours de réalisation, sont-ils si audacieux ? Et pourquoi les JTs de France 2 ( service public) ne viennent-ils jamais en Corse ( territoire de la République) , sur ce type de reportage ? Outre le programme urbain de Relogement des populations marginalisées (Mairie de Bastia), et une miellerie au marketing étonnant (Vescovato - Hte-Corse) : le point fort du voyage reste la pêche durable en coopération avec Stella Mare, plate forme de Recherche & Developpement à Biguglia (Hte-Corse). A Bonifacio ( Corse-du-Sud) la délégation européenne a visité le Lestrygon II, prototype de petit catamaran hybride de « pescatourisme ». Une nouvelle source de revenus et de diversifications, réglementée, encadrée, pour séduire les 314 marins pêcheurs insulaires et leur flottille (209 unités dédiée aux métiers côtiers, filets, palangres, casiers pour un total de 1200 tonnes par an). Engagé et visionnaire Gérard Romiti Président National des Pêches évoque une « prise de conscience collective pour les professionnels de l'île comme pour les 3 millions de touristes annuels ». « Passer une journée dans le monde de la pêche, voir comment cela se déroule dit-il, c’est un plus touristique. Et
une perspective économique pour le pêcheur professionnel, qui s’accorde avec un grand respect de la nature et moins de prélèvements sur la ressource halieutique. Le Lestrygon mentionne déjà une baisse de 15 à 20% des prélèvements ». Pêche durable, gastronomie, emploi, découverte du patrimoine marin. « Quand le pêcheur corse remonte un chapon, un denti ou toute espèce endémique, cela donne envie de le déguster. Nous travaillons sur une route des saveurs de la mer et sur un chemin de grande navigation de pêche autour de l’île, un G R Mer. Je propose d’y amener la profession dans les prochaines années. Le pêcheur du futur sera un ingénieur de la mer, la pêche est un ascenseur social.
A Bonifacio, des jeunes qui ont commencé comme marin, sont aujourd’hui propriétaires de leur PME et 1 seul emploi en mer crée 4 emplois induits à terre! C’est stratégique. Stella Mare c’est la science qui profite de l’expérience, l’alliance du savoir empirique et traditionnel accompagnés par l’expertise pointue et l’approche écosystémique. La Commission européenne est impressionnée par cette volonté d’inscrire la profession dans une pêche durable et responsable. » La R&D : un cercle vertueux, un transfert de savoir-faire reliant la pêche durable à la connaissance de la biodiversité marine. Initiée par l’Université Pasquale Paoli, associés à l’association U Marinu, au Centre Permanent d’Initiatives Environnement (CPIE Bastia-Golo-Méditerranée), labellisée par l’UNESCO : la plate-forme Stella Mare (Sustainable TEchnologies LittoraL Aquaculture MArine REsearch) est axée sur la « gestion intégrée des ressources halieutiques et littorales de Corse » et financée par le FEDER. Ses 15 chercheurs travaillent sur les espèces d’intérêt économique ( oursin, homard), la modélisation comportementale, la biodiversité (plancton), la courantologie, la zootechnique, l’aquaculture durable (denti, huître plate), les micro-habitats pour juvéniles etc…Stella Mare une recette typiquement corse, solidaire, innovante symbolise cette approche européenne profondément locale et qui engrange d’excellents résultats. La programmation des Fonds Européens 2007-2013 est bouclée, les négociations se poursuivent pour la période 2014-2020. Les fonds sont alloués selon les orientations communautaires et les besoins émergeants, tout part d’un diagnostic territorial, d’un état des forces et des faiblesses de la région. Et aboutit à une logique de résultat. Pierre-Emmanuel Leclerc : « C’est une approche profondément locale, aucune région n’est identique. Et le plus important ce sont les axes d’intervention l’innovation-recherche, l’économie décarbonée, l’aide aux PME, le numérique. Derrière ces stratégies il y a des projets déjà pré identifiés en Corse. On part des besoins du terrain, on détermine les améliorations à à apporter, elles sont captées par des indicateurs de suivi. En fin de programmation on mesure les résultats de cette politique. Je suis impressionné par le nombre de projets financés par les fonds européens en Corse."
Liliane Vittori