José Bové eurodéputé préconise un « blocus phytosanitaire immédiat » de la Corse, avec contrôle strict des végétaux entrants sur un seul port de l’île. C’est dit-il l’unique parade contre la bactérie mortelle Xylella fastidiosa qui s’apparente à une « peste » menaçant toute l’Europe à bref délai. Des mesures strictes de confinement, bien relayées vers les populations y compris les voyageurs, existent à l'Ile de la Réunion... alors pourquoi pas en Corse ? Et pour les Pouilles, région dévastée d'Italie, José Bové exige des interdictions européennes qui puissent stopper la contagion. Encore une catastrophe ? Ici rien à voir avec la maladie du phylloxera sur la vigne française (XIXe siècle). En 2015, la Xylella et ses insectes-vecteurs sans prédateurs connus, demeurent un fléau extrême aux impacts sociaux et économiques gravissimes et incalculables. Elle contamine 200 espèces de végétaux arbres inclus, certains experts parlent de 309 espèces sensibles, cultivées et sauvages, alimentaires comme ornementales. Ayant déjà détruit la végétation sur 50 000 hectares dans Les Pouilles: la Xylella pourrait s’attaquer, de manière invisible et irréversible, dès ce printemps à la Toscane, la Sicile, la Corse, la Sardaigne, la région Paca… et ensuite à toute l’Europe. Les délais ? La bactérie X.fastidiosa détruit un arbre en 6 ans (3 ans de contamination, 3 ans de dessèchement). Un seïsme environnemental majeur : les 27 Etats et la Commission Européenne diront-ils qu’ils ne savaient pas ? Tres mobilisé depuis des mois, l'eurodéputé José Bové en visite en Corse ce samedi, a annoncé d'autres interventions en direction des structures européennes. Comment réagissent l’Europe et l’Etat français ? Cette semaine, devant la Commission Européenne (27-28 avril) et au Parlement Européen de Strasbourg (30 avril) : le constat de José Bové, s’annonce effroyable. La X.fastidiosa étant une menace non seulement pour l’agriculture, mais aussi pour la culture, c’est à dire rien de moins que la civilisation européenne, son socle, son histoire : « A la demande express de l’ensemble des groupes politiques sont prévues des réunions d’urgence phytosanitaire à la Commission européenne, puis un débat en séance plénière au Parlement Européen à Strasbourg. Nous disons clairement qu’il faut prendre des mesures énergiques et sans ambiguïté. Les moyens techniques et financiers seront-ils débloqués c’est à dire des mesures des Services des Douanes dans les ports ? ». On a constaté la porosité de Rotterdam et de la plate-forme de Rungis ou un plant de caféier infecté est détecté (avril 2015) en provenance du Costa-Rica. Même processus de contagion extérieure pour l’Italie : le patient zéro de l’épidémie Xylella, serait un plant de caféier d’Amérique centrale. José Bové préconise un « blocus total » de l’île de Corse, la protection des espèces autochtones insulaires qui pourraient être résistantes, ainsi que des serres fermées pour éviter la contamination par les insectes vecteurs qui sucent la sève et re-infectent autour d’eux tous les végétaux sensibles. Des mesures rapides et vitales mais les services de l’Etat en Corse sont peu réactifs. José Bové : "le printemps arrive, la végétation se développe, moment idéal pour les insectes qui pompent la sève. La xylella est partout dans Les Pouilles. Les arbres, les plantes, les oliviers arrivant maintenant en Corse, sont tout à fait capables de transmettre la bactérie mortelle. Un risque majeur de contamination accélerée sur le territoire insulaire ! ». En France la gouvernance est focalisée sur les opérations extérieures, les ventes d’armes et d’avions de combat… mais quid des mesures optimales pour la protection des populations et la sauvegarde de l’économie dont l’agriculture ? A ce jour, concernant la lutte anti Xylella, les services de l’Etat en Corse sont peu productifs. Sans moyens en personnels, les contrôles sont insuffisants et il n’y a pas de campagne d’information officielle vers les populations et les socioprofessionnels, ni dans les ports, ni dans les aéroports, ni via les infos voyageurs des compagnies maritimes et aériennes. Pas d’interdiction d’importation des végétaux, contaminés, sensibles, porteurs sains. Jusqu’à quand l’Ile de Corse sera-t-elle cette passoire sans contrôle phytosanitaire ? Comme la Provence Côte d’Azur, la Corse est une « passoire », les plantes entrent de toutes les manières possibles, via les voitures des particuliers, via les fourgons des pépinieristes, via les camions non-contrôlés de marchands non-déclarés. Ils vendent au bord des routes à-la-sauvette, des végétaux sans aucune traçabilité ! Même constat aux rayons de la grande distribution: pas information fiable sur la provenance. Face à la X.Fastidiosa que fait Paris ? Manque de moyens et de courage ? José Bové : « Les services de l’Etat en Corse n’assument pas leurs responsabilités ! Craignent-ils de se faire taper dessus par le niveau hiérarchique supérieur, c’est à dire Paris ? Ils hésitent à aller plus loin de leur propre initiative. Donc Paris est le parapluie et Paris doit donc décider. Et Paris n’ose pas parce que mettre en oeuvre un tel système phytosanitaire de protection de l’île va au delà de ce que demandait Bruxelles ! Il y a ici un problème de courage un manque de clairvoyance de compréhension du risque le plus grave qui soit.". Les mesures strictes de confinement, bien relayées vers les populations y compris les voyageurs, existent à l'Ile de la Réunion... alors pourquoi pas en Corse ? Une protection phytosanitaire insulaire stricte existe déjà à l'Ile de la Réunion ( TOM-DOM) : aucun végétal ne peut entrer sous peine de contravention, ce qui est répété à chaque atterrissage (!). C'est donc possible! En revanche selon Marie-Paule Vittori-Nelle : "les nuisibles arrivent dans les stocks de bois ou autre, par voie maritime , et c’est plus difficile de traquer la petite bête planquée. Donc le faire savoir, c’est possible et même vital !".Les Pouilles futur laboratoire européen de la résistance à la Xylella ? A Bastia aux cotés de José Bové et de François Alfonsi président du parti européen ALE (Alliance Libre Européenne) on a entendu le plaidoyer émouvant et sévère de Enzo Manni, oléiculteur du Salento, directeur de la coopérative ACLI à Racale (Lecce), responsable du Collectif La Voix de l’Olive: « nous n’allons pas renoncer aussi facilement à notre beauté, à notre richesse, à notre histoire ! L’histoire de l’oleïculture doit continuer.
Nous voulons conserver nos paysages, et devenir un laboratoire de l’Europe à ciel ouvert, où nous cultivons et testons déjà des variétés autochtones qui seront plus résistantes. Mais les mailles de l’Europe sont trop larges. Dans les Pouilles nous allons développer les bonnes pratiques d’autant que les insecticides sont inopérants sur les arbres infectés par la xylella. » La bataille s’annonce très longue, très difficile, les agrumes, les fruitiers, les amandiers, les chênes, les chataîgniers sont dans le collimateur de la Xylella …jusqu’à la luzerne ! Selon Hervé Lot (TeleBotanica) : « La gamme d’hôtes sensibles est impressionnante : 309 espèces (193 genres, 63 familles). La vigne, les Citrus, les amandiers, pruniers et caféiers, les cerisiers, les Quercus, les Sambucus, les Ulmus, les Platanus, les Cyperus jusqu’au Gingko biloba ! Parmi les herbacées, les Fabacées aux Solanées, des Apiacées aux Poacées sont des réservoirs potentiels même si le plus souvent porteurs sains ». La X. fastidiosa n’avait été trouvée que sur le continent américain, elle a été identifiée à Taïwan et en Iran et les recherches avancent aux USA et au Brésil. Dans les Pouilles, l’insecte vecteur identifié « cercope des prés-Aphrophoridés », est très commun dans toute l’Europe. Dan le Salento, outre l’olivier, d’autres espèces végétales sont contaminées et contagieuses: l’amandier, le cerisier, le laurier-rose, le genêt d’Espagne (Spartium junceum), le mimosa etc...Question de survie des opérations de coordination et de coopération sont en cours entre l’Italie et la Corse.
LV
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