Malgré les votes, un rapport décisif d’experts du gouvernement et une mobilisation unanime dans l'île : le Conseil Constitutionnel censure les délibérations des députés et des conseillers territoriaux. Il supprime l’article 12 de la Loi de Finance 2014 qui instituait un processus progressif de retour au droit commun pour les successions insulaires. Avalanches de réactions en Corse. Pourquoi le Conseil Constitutionnel ne soutient-il pas la clarification de la propriété foncière en Corse ? Biens vacants, abandons, indivisions : les deux départements sont pénalisés par une confusion qui perdure depuis deux siècles, depuis le rattachement à la France ( Traité de Versailles 1768 puis 1789). Comme le titre France 3 Corse Via Stella il s’agit là d’une « Récidive du Conseil Constitutionnel ». L’autorité suprême en matière de constitution, ayant décidé ( et s’en étant elle-même auto -saisie ) d’invalider la prolongation dérogatoire du dispositif d'exonération partielle des droits de mutation. Au motif que « l’article 12 méconnaissait l'égalité devant la loi »: le Conseil Constitutionnel censure pour la deuxième fois ce dispositif transitoire. L’Assemblée de Corse et l’Assemblée Nationale avaient pourtant trouvé un consensus sur un délai raisonnable explique notre confrère Charles Monti (Corse Net Infos) : « Lors d'une démarche commune aux quatre parlementaires insulaires, l'Assemblée nationale avait adopté 3 amendements sur la législation sur les successions. Il s'agissait pour les droits de succession par décès, d'établir trois périodes transitoires avant de revenir au droit commun : 85% d'exonération entre 2013 et 2016, 70% entre 2017 et 2019, et 50% de 2020 à 2022, avant d'être pleinement dans le droit commun en 2023 ». Une transition vitale pour assurer la maîtrise du foncier et pour que Groupement d’intérêt public (GIRTEC ) reconstitue les titres de propriété avec l’aide des services et professionnels concernés : Etat, Chambres des Notaires, 360 communes insulaires, Archives Départementales, actes anciens, cadastre, contrôle de légalité, hypothèques, Safer, généalogistes, géomètres. Le GIRTEC numérise et « géoréférence » le cadastre napoléonien, indexe les documents cadastraux et hypothécaires depuis 1848. Tout cela, le Conseil Constitutionnel semble l’ignorer…malgré la demande locale croissante. Mtre Alain Spadoni Pd de la Chambre régionale des Notaires de Corse, expert diligenté par l’administration fiscale, est consterné : « le Conseil Constitutionnel, manifestement, n’a pas pris connaissance du rapport de Bercy. Nous avons travaillé un an, tous les experts ont co signé ! Le Conseil Constitutionnel n’a tenu aucun compte de la volonté de la représentation parlementaire qui a voté à l’unanimité ces dispositions pour la Corse. Une méconnaissance de la volonté politique du peuple. On ne peut le passer sous silence, dans ce Conseil Constitutionnel, il y a des hommes qui règlent leurs compte avec la Corse. Nous allons vers une évolution, les lois sont faites pour les hommes. Dans cette loi de finance, aucune des dispositions outre-mer n’est censurée. La Corse, n’est pas les Iles de Lerins. C’est la problématique d’un territoire qui n’est pas rattaché au continent ! Il faut répondre par des dispositions particulières, la Constitution doit changer . »
Les élus aussi multiplient les réactions. Camille de Rocca Serra député Ump de la Corse-du-Sud admet « une profonde déception et mauvais coup porté au rêglement du foncier en Corse » . Gilles Simeoni : « la réponse politique doit être d’envergure, de l’Assemblée de Corse comme de la société civile toute entière. Il faut le dire clairement, cela suffit. Il faut une révision constitutionnelle. Le dialogue engagé a pour finalité rapide une révision de la Constitution au au profit de la Corse. » Paul Giacobbi , député de la Haute-Corse, Président du Conseil Exécutif avait ainsi résumé la situation à l’Assemblée : « A des situations totalement dissemblables , appliquer les mêmes règles , cela s’appelle de la discrimination ! » l faut se souvenir que le bras de fer juridique ne date pas d’hier. Le 29 décembre dernier, suite à la suppression des arrêtés Miot exemptant la Corse de taxe sur la transmission des biens immobiliers ( Loi de Finance 2012): neuf élus à l’assemblée de Corse, un député européen de Femu a Corsica avait déployé une banderole devant le Conseil Constitutionnel. Gilles Simeoni et Jean-Christophe Angelini avaient remis un dossier contenant la délibération adoptée à l’unanimité par l’Assemblée de Corse de juillet 2012 demandant le report de la fin du régime dérogatoire au 31 décembre 2017.François Alfonsi déclarait : « Il faut nous expliquer pourquoi en deux cents ans cette disposition n’a pas été inconstitutionnelle et pourquoi elle l’est aujourd’hui alors que rien n’a changé sur ce point dans la Constitution ».
LVittori.