Bonjour,
Actuellement inscrit à France Travail, après un burn-out suivi d'une rupture conventionnelle avec ma société Tisséo Services (filiale de Bouygues Telecom) pour cause de harcèlement moral et autres pressions, j'ai décidé de lancer ma propre activité. Après un rendez-vous avec un conseiller particulièrement sympathique et transparent sur France Travail (j'y viens plus loin), il m'inscrit dans un parcours de suivi des demandeurs d'emploi entièrement géré par... une boite privée... Cette société s'appelle Aksis.
C'est donc un premier choc puisqu'au final, France Travail sous-traite et donc finance ce qui faisait partie jadis de ses attributions à une boite privée !! Je n'ose imaginer le prix de ces prestations.
Aksis me téléphone quelques jours plus tard pour un entretien afin de savoir si je suis éligible à leur prestation (et donc, à se faire payer celle-ci par France Travail...) On se doute que la barre ne doit pas être bien haute pour être éligible. En effet, l'éligibilité tient en une question:
- Etes-vous à la recherche d'un emploi ?
- Oui (évidement connasse, sinon tu n'aurais pas eu mon numéro par France Travail...)
- Très bien, donc vous êtes éligible.
J'obtiens donc un nouveau rendez-vous avec une conseillère d'Aksis. On m'ouvre un espace dans leur logiciel en ligne AddViseo. On y trouve beaucoup, beaucoup, beaucoup "d'outils". Tout n'est pas mauvais, un créateur de CV pas trop mal fait par exemple. Un autre outil potentiellement utile permet de centraliser les offres d'emploi de France Travail ainsi que de beaucoup d'autres plateformes de recrutement. Pratique. On peut aussi y trouver des listings d'entreprises à travers un tas de filtres: distance, chiffre d'affaire, secteur d'activité bien sûr, effectifs, taille du comité d'entreprise, forme juridique etc.
Une formation en groupe obligatoire est organisée pour s'y retrouver dans tout ce bazar. Le mot n'est pas choisi au hasard car notre formatrice elle-même a galéré un paquet de fois pour trouver des éléments en lien avec le métier de l'un des participants. Imaginez les gens pour qui les outils informatiques sont une véritable pierre d'achoppement. Moi-même issu du monde de l'informatique, j'ai pataugé quelques fois. Bref, voilà pour l'outil, certainement au cœur du choix de France Travail d'externaliser son propre métier...
J'ai été surpris d'apprendre qu'au final, l'accompagnement qu'est censé nous proposer Aksis, se résume principalement à nous débloquer des accès à des vidéos, des modules en ligne, des présentations type powerpoint. En clair il faut se débrouiller quoi. L'accompagnement est numérique, pas humain, contrairement à ce qui se passait autrefois dans les locaux de feu Pôle Emploi. Pas étonnant que les derniers chiffres montrent une augmentation des agressions dans les locaux de France Travail. Les gens bien câblés et dans leur temps s'en sortent dans ce fatras numérique, mais les autres ? L’accompagnement dans ces situations difficiles est déshumanisé. J'imagine bien le sentiment d'abandon et de détresse de beaucoup face à ces "solutions" qui n'en sont pas. Le point fort d'Aksis, et d'autres boites sous-traitantes, a été de développer un outil dont ils vendent l'accès, tout en faisant l'économie de salaires. Et ça va plus loin que ça...
Aksis me propose de participer à un atelier (présentiel ou distanciel) pour les gens intéressés par la création d'entreprise et principalement la micro-entreprise. A la bonne heure, je m'inscris.
3 semaines plus tard, le-dit atelier commence. Une nouvelle intervenante est aux manettes, je pense naïvement que c'est une employée d'Aksis.
Cette personne débute l'atelier en nous demandant de répondre par oui ou non à 10 questions particulièrement pertinentes (ce n'est pas ironique, elles le sont vraiment) sur les démarches, chiffres, contraintes et avantages de telle ou telle forme d'entreprise, etc... Je me dis, comme les autres participants, que c'est génial, que c'est exactement le genre d'informations qu'il nous faut, c'est au cœur du sujet ! L'atelier promet d'être riche en apprentissage ! Elle fait donc son petit sondage puis passe à autre chose, d'ordre complètement général, dénué d'intérêt pratique, à base de formules et phrase à la noix, de type, je cite: "Être+Avoir=Devenir". Super... Je fais quoi avec ça moi?
Au bout de quelques minutes, nous sommes quelques-uns à lui demander de revenir sur les réponses aux questions que nous attendons toujours. Elle nous répond sans vergogne que moyennant 2000€ pour 2 semaines, elle répondra à ces questions lors d'un accompagnement pour permettre à qui le voudra d'avancer dans son projet... 2000€ c'est le prix "cadeau", parce qu'on peut aussi y consacrer notre CPF, mais pour un montant de 2500€... La fin de la formation n'était qu'auto-promotion avec une liste de ses tarifs.
Cette dame a donc sa propre entreprise, qui s'appelle CCS-Legal, et qui prospère sur la détresse de chômeurs en mal d'assistance, le tout par le truchement de France Travail qui fait... bah qui fait quoi du coup ? On ne sait pas. Ce qui me permet de rebondir sur mon conseiller France Travail, très transparent dans ses missions et ses conditions de travail. Il m'a expliqué venir du privé où, comme moi, il ne supportait plus la pression. A passé un entretien, a été recruté chez FT et où... tout est cool. Aucun contrôle en interne, il fait ce qu'il veut. Il peut convoquer, ou pas, pour des rendez-vous de suivi les gens dont il a le dossier "en charge". Il me conseille même de postuler parce que c'est "cool". Son rôle consiste à mettre à jour notre fiche avec les informations que l'on a envie de lui communiquer et à nous placer à droite à gauche dans des boites comme Aksis.
J'y apprends également que les contrôles des demandeurs d'emploi sont fait par IA/logiciel informatique qui va consulter un dossier, vérifier par exemple que le chômeur a bien un CV en ligne, est bien abonné à une réception d'offres d'emplois quotidienne, etc... Ces "e-contrôles" peuvent mener à une interruption plus ou moins provisoire d'indemnisation et/ou une radiation, sachant qu'à chaque réinscription, un nouveau délai de carence s'applique bien sûr. Petit cadeau à l'Etat. Si un atelier de création de CV est en déficit de participant, le logiciel pioche, au pifomètre, quelqu'un qui n'aurait pas de CV en ligne et le colle dans la session, sans que son conseiller puisse l'en retirer a posteriori !! C'est la machine qui décide !!
Un mot sur le financement des formations, parce que ça aussi c'est drôle. France Travail gaspille donc un fric fou pour faire vivre ces sociétés. En revanche, quand il s'agit de sortir un sesterce pour qu'un chômeur puisse se former, y'a plus personne ! Les seules formations auxquelles FT accepte de donner suite, ce sont celles financées en intégralité ou presque par le CPF. Les conseillers ayant accès à nos comptes CPF, la décision d'un "non" se prend en moins de 5 minutes. Exceptionnellement, FT peut contribuer à compléter s'il en manque un peu, mais à hauteur max, sourire, de 15€ brut de l'heure!! Quel formateur va se lever le matin pour moins de 10 balles dans la poche ? Cette info m'a été confirmée par les conseillers de Pôle-Emploi ainsi que par celle d'Aksis.
Pour construire mon activité j'avais besoin d'un petit complément de formation. En gros il n'y a qu'une seule boite en France dans ce domaine. FT m'a donc refusé le financement puisqu'elle n'est pas éligible au CPF (ça c'est pareil, pour avoir l'agrément... Je suis en contact avec cette société, le gérant galère depuis des années pour être éligible, bien que certifié Qualiopi et justifiant d'un nombre considérable de gens formés et enchantés de l'avoir été par lui...). Il essuie des refus de financement par FT sous tout un tas de motifs. Pour ma part on m'a expliqué que c'était pour des raisons de "statistiques de retour à l'emploi non quantifiables" (ok...), mais il a eu aussi, entre autres, "refusé car vous êtes déjà dans le même secteur d'activité" (ça n'empêche pas le besoin de se perfectionner ou de se tenir à jour non?), "le secteur d'activité ne correspond pas" (bah si, au contraire, c'était pile-poil ce dont il avait besoin...), "nous n'avons pas le budget" (ha ha ha), et parfois refus sans motif, mais refus quand même.
Voilà, au final j'autofinance ma formation... Si besoin de rien, France Travail est ton ami. Mon témoignage ne vous apportera sans doute pas grand-chose, mais si un jour vous décidez de fouiller chez eux, ce sera une petite pierre à l'édifice de leur déconstruction !
Merci de m'avoir lu, bonne journée à vous !
 
                 
             
            