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Billet de blog 6 janvier 2011

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Du fascisme, du populisme, du peuple

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Je reviens à nouveau sur ces notions rebattues et pourtant toujours employées à tort et à travers, regrettant l'utilisation générique inexacte du mot « populisme » renvoyant dos-à-dos la droite et la gauche, et qu'Edwy Plenel a fort opportunément épinglée ici (1).

Le fascisme se caractérise d'abord par une fascination pour l'organisation militaire appliquée à la société civile, c'est-à-dire par le culte du chef et l'obéissance aveugle exigée en retour, ce qui signifie : autoritarisme, élimination de toute opposition et de tout contre-pouvoir. En ce sens, la surveillance légale des médias et la pénalisation de la divulgation d'informations non conformes tel que le prévoit la nouvelle loi hongroise va dans la même direction. Ajoutons à cela que les régimes d'exception se doublent souvent d'une stigmatisation des minorités et du hors-norme en général : xénophobie , racisme, antisémitisme, ce qui semble là encore caractériser la Hongrie actuelle (voir la plainte déposée contre un proche de Viktor Orban devant le Conseil des Médias récemment institué, d'après Le Monde de ce jour).

Le populisme vise pour sa part à privilégier la voix du peuple sur la voix des élites indépendamment des contenus. Ce n'est donc pas le raisonnement qui le sous-tend mais la croyance et le préjugé. Le fascisme utilise le populisme pour asseoir sa légitimité : organisations de manifestations de masse rendant inaudibles les paroles autonomes. Mais pas seulement. Certains courants de gauche et d'extrême-gauche utilisent aussi le populisme comme contrepartie d'un ressenti de mépris du peuple par les élites. Lorsque Jean-Luc Mélenchon, par exemple, fait taire Claude Sérillon comme Georges Marchais faisait avec Jean-Pierre Elkabbach parce qu'il lui fait remarquer qu'il n'a pas parlé des droits de l'homme dans son ouvrage sur la Chine (2), il fait certes du populisme en prenant la posture de l'opposant où tous les coups sont permis (l'opinion d'un porte-parole du peuple vaut plus que toutes les opinions de journalistes réunis surtout s'ils sont à la solde du pouvoir), mais on peut s'interroger alors pour savoir si, parvenu lui-même au pouvoir, il ne partagerait pas la même vision des médias que Viktor Orban et si, plutôt que de licencier l'impertinent, il n'irait pas jusqu'à l'envoyer en camp de rééducation par le travail ?

La démocratie est certes le gouvernement voulu par le plus grand nombre mais aussi le régime où le débat d'idées est le plus ouvert. et le plus approfondi. Le peuple n'a pas à être instrumentalisé ni manipulé. Il a à être respecté dans sa maturité, c'est-à-dire dans sa propre responsabilité.

Lincunable, 6.1.2010

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  1. http://www.mediapart.fr/journal/international/030111/leurope-egaree-ou-le-desastre-hongrois

  2. http://actu.last-video.com/clash-melenchon-vs-serillon-chez-drucker_6128.html

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