On n’est toujours pas sûr de la date exacte de la fin de la 2ème guerre mondiale : 7, 8 ou 9 mai 1945 selon les versions (1).
On ne sait d’ailleurs pas davantage si c’est bien la destruction de Dresde (13 à 14 février 1945) plutôt que celle d’autres villes comme Hambourg (27 à 28 juillet 1944) ou Berlin (25 avril à 2 mai 1945) qui fut à l’Allemagne ce que furent Hiroshima et Nagasaki (6 et 9 août 1945) au Japon, à savoir : la destruction brutale et massive de populations civiles en vue de briser définitivement la capacité de résistance de l’ennemi et d’accélérer la fin des hostilités.
Quoiqu’il en soit, le résultat en fut terrible : environ 25 000 morts (3) et 90% du centre-ville détruit en une seule nuit, ce qui ne manqua pas d’être instrumentalisé par la nouvelle administration communiste installée en 1949 érigeant le bombardement anglo-américain en symbole de la monstruosité et de l’inhumanité du régime capitaliste (2). A cette fin, on décida, lors de la reconstruction de la ville, de laisser intactes les ruines de la « Frauenkirche » (4), naguère fierté des dresdois, afin que les habitants pussent mieux en mesurer toute l’horreur en toutes circonstances. Il va sans dire que la première chose que firent les autorités municipales après la réunification de l’Allemagne fut de répondre favorablement à une souscription d’initiative populaire visant à la reconstruire et, en quatre ans, plus de 100 000 donateurs individuels et professionnels s’étant manifestés, les fonds furent largement réunis (5) pour engager les premiers travaux en 1994 dans le respect des plans d’origine en intégrant aux parties reconstituées les éléments récupérés dans les décombres et reconnaissables à leur noirceur caractéristique. Achevée en 2005 et inaugurée en grandes pompes, il en ressort une grande réussite historique, culturelle et esthétique digne d’une renaissance (de nombreux concerts y sont aujourd’hui donnés) faisant corps avec Dresde comme la Tour Eiffel avec Paris ou la statue de la Liberté avec New York, l’église se trouvant par ailleurs au cœur de la vieille ville baroque, elle-même reconstruite dans le style de l’époque avec sa superbe terrasse Brühl dominant l’Elbe sinueuse, ses larges places aérées traversées de lignes de tramways bigarrées et ses différents monuments de prestige abritant une trentaine de musées et plusieurs salles de théâtre et de concert dont un opéra mondialement reconnu qui en font une rivale incontestable de Prague dont elle est distante d’à peine 175 km (6).
Ainsi, le souvenir d’August II le Fort, grand bâtisseur de la capitale saxonne (1670-1733), père du maréchal de Saxe et arrière arrière grand-père de George Sand, efface peu à peu le souvenir du centre de recherche nazi sur l’eugénisme qui s’était installé là dans le bâtiment de l’hygiène érigé par l’architecte Whilelm Kreis en 1930, pour peu que la population de Dresde veille à empêcher la tenue de pélerinages néonazis que réclame chaque année avec insistance le NPD, ou Nationaldemokratische Partei Deutschlands (7).
Lincunable, 16 mai 2010
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(1) http://www.crdp-reims.fr/memoire/enseigner/supports_documentaires/actecapitulation.htm
(2) http://fr.wikipedia.org/wiki/Bombardement_de_Dresde
(3) selon l’estimation d’une commission d’historiens mandatée par la municipalité en 2004 pour couper court à toute spéculation victimaire : http://deuxiemeguerremondia.forumactif.com/crimes-de-guerre-et-contre-l-humanite-f18/bombardement-de-dresde-t2166.htm
(4) Eglise Notre-Dame de culte luthérien construite de 1726 à 1743 dans le style baroque avec une coupole très caractéristique s’élevant à 26 mètres au-dessus d’une nef circulaire peinte à galeries sur quatre étages.
(5) 130 millions d’euros.
(6) http://www.frauenkirche-dresden.de/
(7) http://www.tdg.ch/actu/monde/dresde-repaire-neonazis-europe-2010-02-12