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Une personne au chômage qui cherche et se cherche

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Billet de blog 23 octobre 2022

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À quelle société et droits pouvons-nous légitimement prétendre ?

Je suis plein de doutes, je ne suis sûr de rien. Et quand j’entends des personnes sûres d’elles, ça me gêne, je crois parce que je ne les comprends pas.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

J’ai de 26 ans, et j’ai devant moi 10 mois de chômage. J’ai décidé d’en profiter pour ne pas chercher de travail tout de suite, et chercher plutôt des réponses à mes questions (économiques, politiques, écologiques, démographiques, etc.). Essayer de m’approcher d’une certaine vérité.

Alors oui, parmi ces questions, il y a celle qui me chiffonne le plus : à quels droits et quelle société nous pourrions légitimement prétendre, nous qui habitons en France. J’entends par légitimement : si nous vivions dans un monde égalitaire – si nous voulions réellement bannir les inégalités en France, mais surtout au niveau mondial.

Reprenons l’argent et le pouvoir aux capitalistes : très bien, allons-y, carrément. C’est pour moi complètement légitime, ce sera une révolution, et ce sera super. On gagnera en pouvoir d’achat, et c’est tant mieux pour nous. Mais ensuite. Quand il s’agira de bannir nos privilèges, de nous français·e·s, qui faisons parti·e·s des 10 % les plus riches de la planète ? Qu’est-ce que ça signifiera ? Sommes-nous prêt·e·s pour cela ?

Je n’arrive personnellement pas à me sortir cette question de la tête.

Elle revient quand je vois les conditions de vie des personnes qui habitent les pays où sont construits à bas prix tous nos biens, les pays d’où sortent les minerais qui nous sont si chers.

Elle revient quand je vois les services dont on jouit en France (livraisons à domicile, métiers du bâtiment, saisonniers agricoles), qui dépendent grandement du travail d’immigrés économiques, qui veulent bien travailler un nombre incalculable d’heure et gagner « peu », parce que ce qu’ils gagneront sera toujours bien plus élevé que ce à quoi ils prétendent dans leurs pays.

Elle revient quand je lis que les écologistes sont plutôt bien opposé·e·s à l’ouverture de mines de lithium en France – mais alors quoi, les mines (dont, ça pour le coup, je crois en être sûr, on a et aura bien besoin!), on les laisse aux autres, parce que le site est classé natura2000 ? (Je doute que les sites miniers au Congo et en Chine n’avaient aucun intérêt écologique...)

Et puis elle revient quand je lis que 75 % des personnes sans emploi dans le monde ne bénéficient pas de chômage ; quand je me rappelle que, oui, évidemment, l’électricité et l’eau ne sont pas courantes pour tout le monde. Elle revient quand je sais que, avec mes 7000€ de réserve sur mon compte en banque, je pourrais aller voyager un peu n’importe où dans le monde – quels part de la population mondiale pourrait s’offrir ça ?

Si chaque personne dans le monde avait le droit et l’accès aux mêmes services et biens (en respectant les préconisations du GIEC en terme de sobriété) – des routes, de l’électricité (et décarbonée !), de l’eau, des écoles et des universités, des voitures peut être, même des trains, puis du chômage, des retraites, une assurance maladie, des soins, de la culture et des travailleureuses sociaux – on aurait droit à quoi au final ?

Est-ce qu’on aurait le droit à une retraite à 60 ans ? Est-ce qu'on pourrait travailler seulement 35 heures, voir 32 ? Est-ce qu’on pourrait être payé pendant nos études ? Faire un master de socio si on le veut, parce que c’est super intéressant (vraiment), et puis se retrouver au final paysan-boulanger ?

Et j’ai peur que non,

Et j’ai peur de poser ces questions,

Mais voilà qui est fait,

J'ai peur parce que c’est peut être absurde et déplacées, ces questions,

Que quoi, ça veut dire que je suis pour reculer l’âge de la retraite ? Augmenter le temps de travail ?

Mais non je ne crois pas que ce soit mon propos. Je me demande surtout à quel point on est privilégié (et ce, malgré toute la pauvreté qu'on a en France... !).

Écrit en écoutant l’ouverture de Tannhäuser, Wagner.

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