Lionel Degouy

Essayiste et pamphlétaire, glandouïste convaincu

Abonné·e de Mediapart

58 Billets

1 Éditions

Billet de blog 19 mai 2008

Lionel Degouy

Essayiste et pamphlétaire, glandouïste convaincu

Abonné·e de Mediapart

Le désir de don

Lionel Degouy

Essayiste et pamphlétaire, glandouïste convaincu

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

La pire des choses serait d’avoir un avis sur tout. Peut-être même serait-il bon de n’avoir un avis sur rien. Se laisser porter totalement par les pleurs que l’on transporte nécessairement, s’endormir en ne construisant rien, se lever le matin sans espoir. Ne serait-ce que pour éviter la succession de défaites non acceptée, la succession d’aventures ridicules. Ce pessimisme là en vaut un autre. Cette défaite là en vaut une autre. Et regarder le monde d’un œil désespéré ne relève pas forcément d’une dangereuse analyse, mais d’une simple constatation. Puisque assurément nous sommes à la dérive. Regardons ce monde s’effondrer, l’actualité suffit à confirmer ce qu’hélas nous présumions : l’Afrique s’embrase, l’orient se déchire ou est déchiré, la misère s’installe durablement chez nous, et à cela – petits bonhommes – nous ne pouvons rien changer. Ou presque rien. Ou si peu. C’est ici la théorie du désespoir total.

Au-delà de tout cela pourtant il existe la douleur. Cette salvatrice douleur qui réveille un peu et fait sortir quiconque de son ostracisme pour aller vers le principe de nécessité : nous souffrons donc nous sommes . Ne nous voilons pas la face, c’est ainsi. D’ailleurs l’autre souffre, donc il est. Je constate que l’autre souffre, donc il est. Ce qui nous est commun, ce que nous pouvons partager sans crainte, c’est la douleur. Et ce qui est le moins communicatif, c’est la joie, le bonheur ou la satisfaction d’avoir bien réussi quelque chose. C’est un grand mystère que de pouvoir saisir la douleur de l’autre, plus encore de ressentir celle-ci plus fortement que le bonheur. Car s’il est vrai que l’on partage seulement ce que l’on a, il y a de grands bonheurs à partager que nous cachons au fond de nous, de peur qu’on nous les vole, de peur qu’on les piétine, qu’on les anéantisse en misère ou en horreur. Le désir du don pourtant vient effacer les craintes, met en commun des espoirs, des jours ensoleillés, des enfants qui s’amusent, des femmes dignes et debout, des hommes sereins.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.