André Breton, en 1924, dans son « manifeste du surréalisme » écrivait : « je crois à la résolution future de ces deux états, en apparence si contradictoires, que sont le rêve et la réalité, en une sorte de réalité absolue, de surréalité, si l’on peut ainsi dire. » Puis il ajoutait : « C’est à sa conquête que je vais, certain de n’y pas parvenir mais trop insoucieux de ma mort pour ne pas supputer un peu les joies d’une telle possession. »Nous avons perdu la guerre des idéologies, en aucun cas cela ne suffirait à les faire disparaître. Nous n’avons plus la force d’un Breton, d’un Aragon ou d’un Camus. Et de fait, il s’est écoulé de longues années durant lesquelles il n’était plus possible de parler d’idéologie sans être qualifié de doux rêveur ou d’horrible stalinien. Nous avions pourtant en face de nous des idéologues toujours bien vivants, et pour certains d’entre eux, d’une idéologie qui empeste l’air que nous respirons. Que pouvions-nous faire contre leur idéalisme, nous qui avions à ce point mutilés nos rêves ?Car ne nous y trompons pas, c’est ici une guerre des idéologies. Et Monsieur Sarkozy, bien qu’il s’en défende, est un idéologue. Cela implique des choix politiques qui, depuis un an, ce sont opérés en remettant en cause parfois les plus anciens de nos acquis sociaux. On ne peut ici parler de simple aménagement mais de certitudes assenées tel des vérités toutes crues : les français travaillent trop peu, les demandeurs d’emploi sont des fainéants, les immigrés sont trop nombreux et leurs défenseurs des « droits de l’hommistes. » Tout est dit.Il y a toujours de petites messes qui ont de l’importance, mais l’UMP n’est pas une église et son idéologie de capitalisme déchaîné et de droite bien à droite dirige le pays. Combien de temps encore ces doux idéalistes se croiront-ils seuls ?Combien de temps pour que nous n’ayons plus peur des mots, des rêves, des idées de liberté totale ? Car il peut émerger aussi des rêves d'impossible. Oui, c’est bien là que réside la vraie question, la question de l’impossible, à l’extrême limite du miracle – à la différence que l’impossible vient de nous. Car la liberté nous est donnée d'imaginer, à l'instar d'Ivan Illich, en plus d'« une société sans école », une société sans prisons, par exemple – ne serait-ce, déjà, que pour les syndicalistes – oui, une société sans prison ! Or, avons-nous seulement osé y penser ? Nous pouvons, nous devons y penser, et porter toute une vision de l'impossible à partir de laquelle nombre de nos libertés présentes se sont réalisées. Après avoir été rêvées, bien sûr. Pour cette raison je suis certain que nous aurions bien tord d’abandonner nos rêves à la chienlit matérialiste et pragmatique.
Billet de blog 19 mai 2008
L'impossible
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