Nous sommes d'accord, c'est bien ainsi que ça se passe ?
Et bien non, pas toujours. En 2021, nous rencontrons encore des professionnels qui ne connaissent pas grand chose à l'autisme ni à la nécessité du diagnostic précoce. Nooonnn ? Je m'en voudrais d'affirmer de tels propos et d'émettre des doutes sur certaines compétences professionnelles. Revenons donc à notre thème et à mon propos en généralisant. Dans le meilleur des cas, il sera conseillé aux parents de consulter un psychiatre ou un spécialiste de l'autisme ou de contacter un CRA (Centre ressources autisme). Jusque-là, "tout le monde il est beau et tout le monde il est gentil". C'est effectivement l'orientation à suivre.
En France et à ce jour, en ce qui concerne l'autisme, nous sommes alignés sur les préconisations gouvernementales ainsi que sur la bonne conscience des textes rédigés par nos amis hors-sol ; autrement dit par ceux qui prennent les décisions dans des bureaux de ministères. Je ne citerais personne pour ménager les susceptibilités des uns et des autres. D'autant plus qu'il serait dommage que certains prennent cela pour un compliment ou un encouragement à continuer de formuler des recommandations - dites de bonnes pratiques - qui concernent l'autisme et les personnes autistes sans connaître le sujet et sans y associer les personnes concernées. Mais, de nouveau, gardons-nous de donner notre avis sur un sujet éminemment politique et d'aller sur le terrain quelque peu glissant sur lequel est juché l'autisme. Là aussi, malheureusement, nous retrouvons des guerres de chapelles, d'obédiences, de disciplines et de crèmeries.
Toutefois, chut, motus et bouche cousue, taisez-vous. Tout le monde le sait dans le secteur de l'autisme mais personne n'a rien vu !
Le parcours des combattants
Mettons nous quelques instants à la place des familles et des enfants. Imaginons le parcours dans lequel ils vont devoir s'engager. Ce seront des rendez-vous, des kilomètres de distance, de l'inquiétude, de longues périodes d'attente, des interrogations, des remises en question, des bouleversements, de la fatigue, des moments de doute, de la culpabilité, des pleurs parfois et de la souffrance souvent. Il est bon de rappeler aujourd'hui encore que certains professionnels, bloqués sur une conception arriérée de l'autisme, continuent de penser que son origine serait liée à la mère et à sa relation à l'enfant. Ils persévèrent à culpabiliser des parents alors que le monde entier s'oppose à cette théorie obsolète et rejetée par le monde scientifique depuis plusieurs décennies.
Pourtant que la montagne est belle...
Ce chemin, il va falloir le suivre car il va être la clé de l'avenir de ces enfants et de leurs parents. Cependant, il va leur en falloir du courage, de l'énergie et du soutien pour traverser cette épreuve et cette aventure qui va aboutir au diagnostic. Les familles d'enfants autistes sont courageuses. Alors, rendons leurs hommage car ce sont les parents et les familles qui cherchent à savoir et à comprendre. Ce sont eux qui tentent de trouver de l'aide pour leur enfant. Ce sont des parents encore et toujours qui ont fait bouger les consciences. Ils font avancer les recherches et mènent des batailles épuisantes et solitaires. En remuant ciel et terre, ils essaient d'interpeller les pouvoirs publics, les politiques et les décideurs qui restent peu intéressés par cette cause et par le sort des personnes autistes.
Ce sont les parents qui se battent au quotidien pour que leur enfant autiste soit reconnu et pris en compte. Ce sont eux aussi qui se sont tournés vers d'autre horizons pour découvrir ce qui est mis en place dans des pays qui considèrent les personnes neuroatypiques à leurs justes valeurs. Il faut le dire haut et fort : les vrais combats, ce sont les parents qui les ont menés et les mènent encore.
Rappel : L'autisme est un trouble neurodéveloppemental. Il n'est ni une maladie mentale ni un trouble psychiatrique. Il est reconnu comme un handicap depuis 1996.
Diagnostic précoce, ça veut dire quoi ?
Le diagnostic doit être posé le plus tôt possible. L'enfant qui va être diagnostiqué jeune, à 2 ou 3 ans par exemple, va pouvoir être accompagné d'une façon appropriée et adaptée. Ses parents vont être écoutés, conseillés, guidés et rassurés. En comprenant objectivement les raisons des comportements et des signes qui les interpellent chez leur enfant, ils vont être soulagés. Ils pourront aussi être soutenus et accompagnés par des professionnels confirmés, des associations, des collectifs, des aidants etc. Il me parait important de souligner que beaucoup de parents suivent des formations sur l'autisme. Alors que peu de professionnels suivent le même chemin. En France, l'autisme est un monde à l'envers dans lequel les rôles sont inversés. C'est fou, non ? Il est important de dire que les personnes autistes sont bien souvent, et trop souvent, laissées à l'abandon et mal traitées pour ne pas dire maltraitées. C'est triste et révoltant. Une question se pose : une société qui ne protège pas ses enfants peut-elle se considérer réellement comme une société ?
Avec le diagnostic précoce, les parents vont avoir des réponses à leurs questions, à leurs doutes, à leurs peurs. Dans le meilleur des cas, il leur sera expliqué que leur enfant n'est pas différent des autres enfants. Certes, ses particularités autistiques le feront fonctionner différemment dans certains domaines et certaines circonstances. Mais, il s'adaptera en s'appuyant sur des apprentissages, des outils, des techniques, des stratégies et une meilleure connaissance de lui-même. Il ne sera peut-être pas le roi des interactions sociales, mais si chacun tient compte de qui il est et de ses modes de fonctionnement, il trouvera sa place dans le monde comme tout un chacun. Le respect, la tolérance et la solidarité feront le reste.
L'urgence de savoir qui nous sommes pour mieux savoir où nous allons
Apprendre que son enfant est autiste et qu'il sera en difficulté dans certaines situations de la vie est intolérable. Cependant, découvrir à la suite du diagnostic précoce que tout va pouvoir être mis en place pour qu'il soit le plus à l'aise possible dans sa vie, qu'il grandisse et qu'il évolue au milieu des autres, change toutes les perspectives d'avenir. A partir du diagnostic, de la connaissance de cette nouvelle réalité, de la reconnaissance et de l'acceptation de cette différence, tout est envisageable. Une porte s'ouvre.
Après l'annonce du diagnostic - je sais combien cette nouvelle réalité est déstabilisante - chacun va s'adapter, trouver des aménagements, se regarder et, au fil du temps, se comprendre. Tous vont pouvoir cheminer vers une vie meilleure. Malheureusement, il faut le reconnaître, dans la plupart des CRA (Centre ressources autisme) les délais de rendez-vous peuvent être longs et les listes d'attentes sont éprouvantes. Ce sont les pouvoirs publics qui doivent agir rapidement en leurs donnant des moyens financiers supplémentaires. Il est urgent que les diagnostics deviennent vraiment précoces car il n'y a pas de temps à perdre pour nos bouts de choux !
Je tiens à rajouter qu'il existe le diagnostic tardif. Beaucoup de personnes autistes sont diagnostiquées à l'âge adulte, voire à un âge avancé. Ils sont mes potes âgés, diagnostiqués après 30 ans, 40 ans, 50 ans et plus si affinité. Pour ma part, j'ai été diagnostiquée autiste asperger à l'aube de mes 58 ans dans un CRA par une équipe de professionnels et d'experts. Joyeux anniversaire Lionelle !
Devons-nous opposer diagnostic précoce et diagnostic tardif ? Non car les avancées dans le secteur de l'autisme sont lentes mais constantes. Et le parcours diagnostique peut se faire à tout âge. Depuis quelques années, l'information circulant mieux, chacun peut se renseigner. Attention, toutefois, aux fausses informations concernant l'autisme. Chacun peut se reconnaître dans des témoignages, des critères et des signes cliniques. Pour cette raison , il est important de s'adresser à des experts de l'autisme et à des professionnels confirmés. Allons au bon endroit et auprès des bonnes personnes.
N'oublions pas non plus que certaines personnes n'ont pas la possibilité d'avoir accès à un diagnostic. D'autres ne souhaitent pas être diagnostiquées.
Être autiste et le savoir
Certes, être autiste ne se résume pas à un diagnostic. Cependant, il me semble important et primordial de savoir qui nous sommes pour mieux aborder la vie et la traverser le plus sereinement possible. Nos parcours de vies d'autistes sont souvent atypiques. Nos vécus et nos expériences sont un périple parsemé d'embûches. Néanmoins, nos vies peuvent toujours être enrichies par de belles rencontres. Ce qui m'amène à penser qu'être autiste peut être une belle aventure !
Je vous remercie du temps que vous venez de consacrer à la lecture de cet article. D'autres suivront.
Lionelle Giraud