Parce que des femmes et des hommes se sont battus pour que nous ayons la chance de vivre dans une société démocratique où le droit nous protège. Parce que les tentatives de diminuer ou de supprimer les droits des citoyens de vivre librement se multiplient, nous avons le devoir de rester vigilants et de continuer à nous battre pour une société de libertés garanties. Parce que les journalistes ne doivent pas être traités comme des délinquants qui gênent et empêchent les dérives qui menacent notre démocratie, je refuse le silence complice.
Lettre ouverte à Monsieur le Ministre de l’Intérieur
Monsieur le Ministre de l’Intérieur, les journalistes ont-ils le droit de se déplacer librement en Martinique ?
Venue en famille au Morne Rouge, pour fêter l’anniversaire d’une tante, je me suis rendue à l’Auberge de la Montagne Pelée ce samedi après-midi, 4 avril 2015, où une réservation avait été faite par ma soeur, quelques jours plus tôt.
J’ai eu la surprise de découvrir que je n’avais pas la liberté de me déplacer, comme le prévoit la Déclaration universelle des droits de l’homme.
L'exercice de ces droits ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au maintien de l'ordre public, à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.
En quoi le fait d’arriver comme client dans un hôtel, dans mon pays, constitue une violation de ce droit quand j’ai eu j’ai dû, quelques minutes après mon arrivée alors que je venais prendre tranquillement un café à l’accueil de l’hôtel, répondre aux questions d’un homme en civil et armé, informé je ne sais comment, de ma présence sur les lieux.
Nous étions, mon époux, ma soeur et moi, en train d’admirer notre belle Montagne Pelée, quand un homme en civil portant une arme à sa ceinture, s’est dirigé vers nous, posant cette question :
« Qui est Lisa David, journaliste à RFO ? »
J’ai répondu que je n’étais pas journaliste à RFO, m’étonnant de cette question.
L’homme qui ne s’est pas présenté a répondu qu’il faisait son travail avant de poursuivre son interrogatoire :
« Vous ne travaillez pas à RFO depuis quand ? »
J’ai répondu que ça fait un moment, deux ans je crois et que j’étais là en famille. J’ai ajouté, qu’il n’avait pas à s’inquiéter parce que si j’étais venue en ma qualité de journaliste, pour enquêter, il n'aurait pas eu vent de ma présence.
La prochaine question est encore plus choquante :
Pourquoi êtes vous ici ?
J’ai répondu que j’étais en famille, venue pour un anniversaire. J’étais conciliante, je n’avais pas envie d’entrer en conflit avec ce monsieur, je n’avais pas envie de tension inutile pouvant gâcher davantage le week-end de ma famille.
L’homme armé tenait en main un petit bloc note et stylo. Alors qu’il me parlait, mon époux et moi avons pu lire avec surprise :
« Michel S.....le prénom et nom de mon époux et date de naissance »
Je précise que les deux bungalows que nous avons occupés avaient été réservés par ma soeur, à son nom : David.
Monsieur le Ministre,
Je voudrais savoir qui a donné l’ordre à ce Monsieur, que j’ai supposé être un représentant des forces de l’ordre, d’engager cette surveillance et cet interrogatoire ?
Pourquoi n’ai-je pas le droit de me déplacer librement, comme tout citoyen, un week-end de Pâques, sans subir une surveillance et interrogatoire de gendarmerie en public et paraître ainsi suspect d’un supposé délit ou crime ?
En quoi ma qualité de journaliste autorise que je fasse l’objet d’un traitement particulier quand je me déplace dans mon pays ?
Quelle est la raison de cette surveillance particulière et de cet interrogatoire et quelle suite est réservée à cette démarche étonnante dans une démocratie qui se respecte ?
Je voudrais savoir si mon nom figure dans un fichier particulier de délinquants ayant commis ou étant susceptibles de commettre, des actes menaçant la sécurité des personnes ou de l’Etat ?
A lire la suite ici : Une journaliste de Martinique plus surveillée qu’Al-Quaïda | Free Pawol