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Billet de blog 15 juin 2025

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Au sujet du spectacle « le delirium du papillon » de Typhus Bronx.

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Au sujet du spectacle « le delirium du papillon » de Typhus Bronx.

Une sorte de dégoût tenace, presque une nausée, de ce vendredi 13 décembre à Decazeville. Le plaisir à la souffrance des autres, de l' harceleur en chef de collège qui fait rire les subalternes de ses persécutions. Et personne qui ne réagit. « Car c'est un spectacle ». Ce surplus « de frissons polissons » sur le dos de gens qu'il ridiculise violemment, et son talent en cela feint de rendre charmante son agressivité : une partie des gens riant de l'agression. Se rient de l'agression elle-même. Que dit-il si ce n'est d'apprendre à relativiser, à rire tous et toutes ensemble de la souffrance infligée, puisque c'est esthétique. En dehors de cette salle aussi, les agressions peuvent l'être, morbidement ; quelle différence avec ce moment, où un masque au rabais de Jim Carrey nous ressert le classique de l'artiste qui sort de son rôle ; et quel pathétique lorsqu'il le formule à la fin, comme si l'on ne l'avait compris, comme pour se dédouaner (en mode pancarte au début d'un film sur le fictif des personnages), s'essayant en une mise en abîme. Cette sensation lancinante qu'Emmanuel Gil se perd dans « son personnage », qu'il ne le maîtrise plus vraiment, via une mise en scène paravent à ce quelque chose de potentiellement malfaisant, jusqu'au remerciement de la régie où il ne semblait pas redescendu. Au moins dans « The Square », la palme d'or de 2017 de Ruben Östlund, on a la dénonciation de cette bourgeoisie culturelle qui se gausse « de performance », amenant à l'agression d'une femme, sans que la salle ne réagisse.... Mais là, en vrai, lorsque des personnes se font publiquement, violemment, déprécier sur leur physique, bousculer, que la limite physique du ressentit de l'agression peut être passée de nombreuses fois pour des personnes au parcours différents... alors, on a la directrice culturelle de la Com Com tout en joie d'accueillir un si grand artiste et de conseiller « de garder les souvenirs en soi sans images prises, ce qui fera la mémoire »... traumatique ? « Du bout de sa langue écorchée, Typhus va franchir les barrières qui le séparent de vous ». Pas que par les mots. Et puis met-il une distance, propose t'il à un seul moment une réflexivité afin d'amener les personnes présentes à mieux penser ces moments, à comprendre ce que peut être « la folie ». Mais le sait-il lui-même, lui qui la donne à travers un mauvais cartoon (« appréciable comme Fight club ») et une référence à Foucault. C'est si facile de ne pas s'embêter, de ne pas avoir de propos, de se laisser aller. Les gamins ont du talent facilement. Mais cela reste du jeu. Transgresser est revu, mais qu'a t-il à dire que de faire palper à d'autres son hubris.

Sublime t-il les sorties de conventions qu’entraînent « la folie » et leurs violences associées ? Esquisse t'il une perspective en ces dernières minutes plus poétiques ? Il est difficile de se départir de l'idée que ce moment n'existe que par l'agression du public, dans le public, tandis que les moments seuls sur scène, parfois talentueux, lui sont moins plaisant à jouer. Comme une marre où seule l'écume du malsain remonte, où il s'y complaît, en fait l'éloge, en barbouille les alentours et y efface toute perspective de beauté, tristement.

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