Un dimanche de juillet, 16 h, à Pertuis, commune moyenne du Vaucluse située à l'extrémité nord de l'axe de la métropole Aix-Marseille. Une envie de sortir me décide à aller assister au passage du 57 ème corso fleuri.
Sous une température banale au delà des 35° (à l'ombre), je choisis un banc à l'ombre des platanes de l'esplanade du Cours de la République et patiente en attendant le défilé qui en fera le tour plusieurs fois dans les deux sens. Nous avons droit à un petit speech dans les haut-parleurs pour nous faire patienter en attendant le départ, de la part, entre autres, d'un pseudo-historien et d'un organisateur, nous vantant la tenue du corso, tradition bien pertuisienne s'il en est, après deux ans d'absence, COVID oblige.
Mais c'est surtout la voix du maire de Pertuis qui m'interpelle, Roger Pellenc, PDG de PELLENC SA, entreprise locale leader mondial des machines automatisées spécialisées dans la récolte du raisin, s'il vous plait. A droite toute donc, ca va sans dire.... Celui-ci commence à nous causer de la pomme de terre, la PATATE pertuisienne, la spécialité agricole locale (il existe même des AOC, figurez-vous!) qui a fait en son temps la richesse de la ville. "Une culture qui demande beaucoup d'eau, contrairement à sa cousine que l'on pratique dans le nord de la France" nous dit-il. Mais c'est qu'il défend les agriculteurs locaux, voyez-vous, alors qu'il est par ailleurs envisagé par son équipe de bétonner bientôt des centaines d'hectares de riches terres agricoles fertiles du lit de la Durance pour agrandir la zone d'activité de Pertuis. De qui se moque t'on? Sacré Roger va... Pour ce qui est des graves problèmes de sécheresse et de pénurie d'eau du Vaucluse, mieux vaut faire l'autruche, ne gâchons pas la fête !
Ca y est, le corso démarre, une alternance de chars et de groupes musicaux qui descendent depuis le haut du cours, côté centre-ville, dans notre direction. Pour ceux qui ne connaitraient pas, un char de corso fleuri, c'est un tracteur agricole tirant une grande remorque qui sert de support à un décor construit sur un thème donné, le tout recouvert d'une énorme quantité de fleurs en papier crépon; enfin si l'on peut appeler cela des fleurs, plutôt des morceaux de papier soigneusement découpés et collés, un travail de dingue, des dizaine d'heures de boulot bénévole.
Pour ce qui est du tracteur, bien qu'il soit entièrement dissimulé par les dites fleurs, difficile, pour ma part, de pas focaliser mon attention sur l'odeur très désagréable dégagée par le vieux moteur diesel et sur la mine fatiguée du conducteur, exclusivement un homme à la retraite aux traits tirés, souriant béatement en prennent à coeur sa fonction dans ce manège. J'imagine alors d'anciens agriculteurs ayant pris plein la tronche de toutes sortes de pesticides, engrais et autres saloperies chimiques, sûr que tout ça laisse des traces... Une divagation de ma propre imagination, vous l'aurez compris, car je n'ai aucune connaissance des ces personnes, ni de leur ancienne profession. Mais bon, ils sont probablement en grande majorité les propriétaires de leur machine.
Quant aux char en eux-même, plus d'une dizaine, difficile de faire plus kitch en matière de déco et d'assortiment de couleurs hideuses, sans parler du thème inspiré de la culture populaire allant de Disney aux années folles en passant par Arlequin et la Colombie (avec de vieux baba-cools déchirés et crasseux fumant un gros cigare, je crois rêver) et avec comme clou la reine du corso, perchée en haut de son installation, entourée de ses sbires et autres nymphettes déguisées en fées, avec leur sourires "cheese" forcés et leur "coucous" hypocrites à l'assistance, qui, elle, rit d'une joie non feinte. Amuez-vous, braves gens, tant qu'il en est encore temps.
Et puis il y a les confettis, pas de corso sans confetti, un déluge de confettis. Non pas les vrais, les jolis colorés, mais des fragments de papier brouillon passés à la broyeuse. Bon, enfin un geste écolo, un semblant de recyclage, tout n'est pas perdu. On se les envoie par paquets, trop rigolo, sur les chars, venant des spectateurs, ou sur la foule, venant des chars . Il faut bien s'amuser et se défouler un peu. Sauf que ....
Il fait très chaud, il y a beaucoup de jeune public, tout pour que ca dérape. Et ca dérape. Les enfants ne tardent pas à ramasser les confettis tombés au sol pour les relancer avec tout ce qui traine par terre, la poussière, tout ça. Et soudain ca dégénère quand une gamine en balance une bonne poignée dans le visage de l'homme âgé assis sur le banc juste à ma droite. N'appréciant que moyennement le geste, ce dernier à un reflexe de rejet en direction de la fillette en maugréant son indignation. La mère, debout à ma gauche et regardant la scène régit immédiatement : "Pas de geste brusque envers ma fille, ok ?". Elle à pris ça pour une tentative de gifler sa fille. N'importe quoi, il a rien fait de grave, franchement.
Visiblement à fleur de peau, ou plutôt bien mal dans sa peau, la grosse. Pour qui se prend-elle? J'ai bien envie de défendre l'homme mais je me retiens, chacun sa merde, après tout. Ils commencent à s'énerver grave, le ton monte elle commence à l'insulter et quand la femme veut défendre son mari, c'est elle qui subit la foudre à coup de "Ta gueule" agressifs, la grosse ne cherchant même pas à réprimander sa descendance. Est-ce ainsi que l'on traite nos ainés dans ce pays de merde? Ce couple qui était venu paisiblement profiter de cet interlude festif. Ils quittent les lieux sous l'initiative de l'homme, dégoutés et je reste sur mon banc avec comme triste distraction cette mère et ses filles qui continuent à ramasser les confettis à même le sol, remplissant des sacs en plastique afin de faire des reserves à balancer encore et encore, tout ce petit monde me gâchant la vue du défilé finissant.
Heureusement qu'il ya les groupes musicaux, danseurs, percussionnistes, fanfares et autres orchestres et je remarque sur les manchettes des chemisettes des membres de l'un d'eux que figure, bien en vue,
le logo du Crédit Agricole. Mais ceci est une autre histoire.

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