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Billet de blog 28 août 2025

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Le pari risqué du Premier ministre Bayrou sur le vote de confiance

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La France est à nouveau en proie à l'instabilité politique depuis que le Premier ministre François Bayrou a annoncé de manière surprenante un vote de confiance prévu pour le 8 septembre 2025, dans une tentative audacieuse de faire adopter un projet de budget controversé dans un parlement fragmenté. Cette initiative, destinée à devancer une motion de censure de l'opposition, a au contraire renforcé les craintes d'un effondrement du gouvernement, marquant ce qui pourrait être la troisième destitution d'un Premier ministre en un peu plus d'un an. M. Bayrou, 74 ans, allié centriste du président Emmanuel Macron, dirige un gouvernement minoritaire au sein d'une Assemblée nationale divisée en trois blocs rivaux (gauche, centre et droite), ce qui rend une gouvernance stable de plus en plus difficile à atteindre.

Les origines de cette dernière crise remontent aux élections législatives anticipées convoquées par le président Macron en juin 2024, qui ont abouti à un parlement sans majorité claire. Cette impasse a entraîné des crises gouvernementales successives : le prédécesseur de Bayrou, Michel Barnier, a été évincé en décembre 2024 après avoir échoué à faire adopter un budget, et Bayrou est aujourd'hui confronté à un danger similaire moins de neuf mois après son entrée en fonction. L'impasse actuelle porte sur un plan d'austérité de 44 milliards d'euros visant à réduire la dette croissante de la France, qui comprend des réductions des jours fériés, des programmes sociaux et d'autres mesures de dépenses jugées essentielles par le gouvernement mais « injustes » par ses opposants.

La décision de M. Bayrou de demander un vote de confiance était une manœuvre stratégique visant à forcer la main des législateurs avant une contestation anticipée de l'opposition lors des débats budgétaires. Cependant, en l'absence de soutien significatif de la part des autres blocs, le vote devrait échouer, plongeant le pays dans une incertitude encore plus grande.

Les partis d'opposition, tant l'extrême droite du Rassemblement national que la gauche du Nouveau Front populaire, ont promis de voter contre Bayrou, se réjouissant de l'opportunité de renverser le gouvernement. Des dirigeants tels que Marine Le Pen ont critiqué les mesures d'austérité, les jugeant trop lourdes pour les citoyens ordinaires, tandis que les gauchistes affirment qu'elles exacerbent les inégalités. Le président Macron, qui a nommé Bayrou pour stabiliser la situation, risque désormais de devoir nommer un nouveau Premier ministre si le vote entraîne la chute du gouvernement. Certains analystes estiment que cela pourrait conduire à de nouveaux appels à des élections anticipées, bien que Macron s'y soit opposé jusqu'à présent en raison du risque d'aggraver les divisions.

Le drame politique se répercute déjà sur les marchés financiers. Les rendements des obligations françaises ont augmenté, l'écart avec les obligations allemandes passant de 0,69 à 0,73 point de pourcentage, ce qui témoigne de l'inquiétude des investisseurs face à une éventuelle paralysie budgétaire. Les actions bancaires ont chuté de près de 6 % et les chefs d'entreprise ont mis en garde contre des « risques économiques importants » si la crise se prolongeait, bloquant les réformes et augmentant les coûts de financement. La crise de la dette française, qui est déjà un problème urgent, pourrait s'aggraver sans un gouvernement stable pour mettre en œuvre les coupes nécessaires, ce qui pourrait entraîner une plus grande volatilité des marchés et une dégradation des notations de crédit.

Si M. Bayrou perd le vote, comme la plupart le prédisent, il devra démissionner, laissant la France sans gouvernement opérationnel pour la troisième fois en 12 mois et obligeant M. Macron à se démener pour trouver un remplaçant. Une victoire, bien que peu probable, lui permettrait de faire avancer le budget malgré la réaction négative du public, ce qui pourrait éviter un effondrement immédiat, mais alimenterait les manifestations prévues pour le 10 septembre. À plus long terme, cette instabilité récurrente souligne les défis auxquels la France est confrontée dans un paysage politique polarisé, où il n'est pas facile de former une coalition ou de mener des réformes.

Alors que la France traverse cette période précaire, le monde observe attentivement la situation, dont les implications s'étendent à l'ensemble de l'économie de la zone euro. Les chefs d'entreprise et les économistes soulignent la nécessité d'une résolution rapide pour atténuer les dommages supplémentaires, mais compte tenu des divisions profondes qui persistent, une solution rapide semble lointaine.

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