
TRIBUNE - Lors de l'élection présidentielle de 2012, j’avais 17 ans et donc je n'avais pas encore l'âge de voter. Le gouvernement qui allait déterminer les grandes orientations politiques du pays a été choisi sans moi. À un an près. C’est frustrant. Et c’est ce qu’il se passe à chaque élection : une cohorte de jeunes gens sont systématiquement empêchés d’exprimer leurs aspirations politiques dans les urnes.
Pourtant, ces jeunes gens ont beaucoup de choses à dire et ont la capacité d’articuler des opinions politiques précises. Les enquêtes montrent que, de manière générale, la jeunesse est de plus en plus tolérante, ouverte à l'immigration et au multiculturalisme, favorable à l'égalité entre les genres, à l'expression de la différence. Une tranche croissante de cette même jeunesse est de plus en plus favorable à la redistribution sociale, estime que certains secteurs ne devraient pas être soumis à la concurrence et à la compétition économique, que les travailleurs et les travailleuses devraient pouvoir décider des choix dans les entreprises, et qu'il est possible de construire une société plus coopérative et avec une meilleure répartition des richesses et du pouvoir. Si cette jeunesse est plus distante avec la politique électorale , elle s’est mobilisée sur les réseaux sociaux et dans la rue. Cela est particulièrement visible sur l’écologie et le climat.
Il y a évidemment une partie de cette jeunesse qui s’inscrit dans l’ethos libéral et capitaliste, ou dans celui de l’extrême-droite, mais elle ne saurait invisibiliser cette tendance de fond. Une tendance qui nous enjoint à porter un regard critique sur (1) l’idée que la société française serait en constante droitisation/extrême-droitisation et que (2) ce phénomène serait le souhait de la majorité de la population.
Voter pour Macron ou pour Le Pen, c’est mépriser les aspirations de cette jeunesse. Cette même jeunesse qui a tant souffert pour protéger ses ainés durant la pandémie (détresse psychologique et affective, solitude, précarité accrue, rupture scolaire…). Cette même jeunesse qui constitue l’un des publics les plus affectés par les politiques économiques néolibérales, que ce soit sur l’accès à l’emploi, au logement, aux services publics… Quand est-ce qu’on renvoie enfin l’ascenseur ?
Refuser de voter pour les programmes de brutalité sociale et économique portés par la droite et l’extrême-droite, c’est soutenir cette jeunesse qui n’a rien à y gagner et qui sera pourtant empêchée de s’exprimer dans les urnes. Refuser de voter pour la droite et l’extrême-droite, c’est cesser de protéger ce vieux monde qui refuse de mourir et qui freine l’émergence et l’affirmation de ce monde nouveau, que la jeunesse souhaite construire.
En 2022, j’irais voter (à gauche) pour plein de raisons. Et la solidarité envers tous les jeunes qui souhaitent un monde plus juste, plus démocratique, plus respirable et moins violent, en fait partie.