J’ai beaucoup apprécié la publication sur Facebook d’un camarade, Robert Injey, que je souhaite livrer ici, accompagnée de ma réaction.
" Crimes de guerre, terrorisme..."
Des député.e.s de la France Insoumise se font insulter, et même menacer car ils parlent de «crimes de guerre». On leur fait le reproche de ne pas employer le mot de « terrorisme ». Et pour cause les mots ont leur importance et surtout ils n'impliquent pas la même chose.
Parler de crimes de guerre c'est faire référence au droit international. Alors que le discours sur terrorisme ou organisations terroristes à pour effet immédiat d'en sortir. Au nom de la lutte contre le terrorisme on justifie tout et en particulier de s'affranchir des règles du droit international (1). Cela a pour effet non pas de remettre en cause, de justifier ou d'amoindrir la nature des crimes contre des civils et la nécessaire condamnation, mais de ne pas justifier, par la suite, toutes les dérives et tous les massacres au nom de lutte contre le terrorisme et en retour de ne pas sanctionner les auteurs de tels massacres effectués au nom de la lutte contre le terrorisme.
C'est exactement ce qui est en train de se passer à Gaza où, au prétexte de la lutte contre le terrorisme, c'est ni plus ni moins l'extermination du peuple palestinien qui est en train de s'opérer, sous la pression de l'extrême droite israélienne et avec le silence complice d'une grande partie des leaders politiques occidentaux.
Et cela alors que s'affranchir du droit international et des résolutions de l'ONU est une constante depuis plus de 50 ans des gouvernements Israélien. L'assignation médiatique faite aujourd'hui de soutenir inconditionnellement Israël, l'assimilation à du soutien au terrorisme à toute manifestation de soutien au peuple palestinien (et non pas au Hamas) et pour la Paix font écran au drame qui se joue à Gaza et aux responsabilités de l'exécutif Israélien (2).
L'avenir de cette partie du monde ne pourra s'écrire que dans le cadre d'une solution politique, sinon les larmes d'aujourd'hui ne feront que préparer celles de demain dans l'escalade sans fin de la spirale de la vengeance (3).
Robert Injey
(1). La prison de Guantanamo en est la parfaite illustration avec, 21 ans plus tard, des prisonniers toujours pas jugés.
(2) Ainsi que le révélait ces jours-ci le journal israélien Haaretz en mars 2019 devant des députés de la Knesset, Netanyahu déclarait : « Quiconque veut contrecarrer la création d'un État palestinien doit soutenir le renforcement du Hamas et transférer de l'argent au Hamas. Cela fait partie de notre stratégie (…) ».
(3). De ce point de vue le parcours de « l’architecte » de l'opération meurtrière du Hamas est assez révélateur : faisant partie des créateurs des Brigades Al-Qassam, Mohammed Deïf échappent à plusieurs tentatives d'assassinat mais il est amputé d'une jambe et un bras en 2006 et en 2014, s’il échappe une nouvelle fois à la mort, il perd sa mère et son fils. »
En effet cher Robert, l'utilisation du mot "terrorisme" sert de passeport à bien des turpitudes comme tu le montres.
Elle est efficace car elle s'appuie sur le traumatisme qu'ont connu nos concitoyens avec les attentats terroristes en France et ailleurs. Ils ont vu, de leurs yeux vu, les horreurs dont certaines se sont produites près de chez eux et ont été effrayés à l’idée qu'eux et leurs proches auraient pu en être victimes.
Est recherchée aujourd'hui la même émotion, la même sidération pour conduire à faire de l'Etat d'Israël la seule victime et du peuple palestinien le seul coupable.
Le passage de la responsabilité du Hamas à celle de tout un peuple devient dès lors possible et la première ministre s'autorise à apporter un soutien "inconditionnel" à un pouvoir auquel participe l'extrême droite et à un état qui pratique la colonisation et l'apartheid.
A ce moment de son discours devant l’Assemblée nationale, elle est applaudie au-delà des rangs de Renaissance, du LR et du RN.
Jamais un chef de gouvernement n'était allé aussi loin et personne n'imagine que Jacques Chirac aurait pu nier ainsi l'existence même de palestiniens ! Jamais il n'aurait évoqué le retour de la shoah. Retour qui banalise l’horreur absolue commise au XXe siècle.
Cet extrémisme vient confirmer la puissance de certaines idées de l'extrême droite dans notre société et que sa cible privilégiée, ce sont les musulmans.
Notre responsabilité n’est pas de convaincre nos concitoyens que le Hamas n'est pas une organisation terroriste, ce qu'il est à leurs yeux puisque ses actes le sont. Nous devons en revanche nous efforcer de les gagner à la cause palestinienne.
Or, c'est difficile.
La pression qui s'exerce sur eux est phénoménale.
Tous les médias sont de la partie, à l'exception notoire de "L'Humanité" et de quelques autres publications.
Mon expérience me conduit à penser que ce serait mission impossible si nos interlocuteurs avaient le moindre doute sur notre condamnation du Hamas et de ses crimes.
Nous n’avons pas non plus à convaincre des communistes ou des progressistes acquis de longue date à la cause palestinienne. Certains d'ailleurs voient leurs convictions ébranlées par la force de la campagne actuelle. Nous cherchons à convaincre des femmes et des hommes qui ne sont pas convaincus.
La tâche est rendue encore plus difficile par l'exploitation politicienne d'une souffrance humaine extrême imposée à deux peuples qui ne connaissent ni paix, ni liberté, ni sécurité. Il faudrait être aveugle pour ne pas voir qu'elle vise à détruire la Nupes, seule opposition réelle au pouvoir macronien qui fait tant de mal. Seule en capacité d'offrir, si ses composantes le souhaitent, un projet et un chemin citoyens et unitaires pour de profondes transformations durables.
Les enjeux sont considérables. Ils expliquent l'ampleur des moyens mis en œuvre.
Comme l'émotion joue un grand rôle dans ce type de situation angoissante, les points marqués dans une compréhension très élargie de ce qui se passe au Moyen Orient peuvent s'accompagner d'un retournement de tendance dans l'opinion si le pouvoir israélien va au bout de sa vengeance annoncée et prend délibérément le risque d'un carnage, ce que la mobilisation des peuples, l'ONU et les nations doivent se fixer pour objectif prioritaire d'empêcher.