On avait déjà vu Anne Hidalgo jurer ses grands dieux qu’elle ne briguerait jamais d’autre mandat que celui de maire de Paris. Puis, comme si elle avait honte de l’être devenue, annoncer, depuis une ville de province, qu’elle voulait devenir présidente de la République, avec comme décors, moultes photographies auprès de vaches dans les près.
Puis, comme si elle avait aussi honte d’être socialiste, se métamorphoser en écologiste, clichés de cycliste à l’appui.
Les éléphants de sa formation politique en prirent ombrage et son premier secrétaire, d’abord conquis lui aussi par l’écologie, dû tourner casaque, entrainant dans son retour à la vieille et usée social-démocratie sa candidate provinciale, venue de Paris.
Autant de solides convictions et de fidélités à des engagements ne soulevèrent pas l’enthousiasme d’un électorat déjà, et à juste titre, très méfiant et sur ses gardes.
Des têtes bien pleines se lancèrent à la recherche de martingales de nature à stimuler une « Remontada » sondagière.
Confortablement installée dans un wagon d’une SNCF de moins en moins publique, Anne Hidalgo en reçu la bonne nouvelle et fit immédiatement demi-tour, non sans avoir préalablement demandé que lui soit réservé, et obtenu sans la moindre difficulté, un temps d’antenne dans le « 20 heures » de TF1, le plus regardé de France. Privilège inaccessible pour la plupart des dirigeants politiques qui ne se consacrent pas à servir le capital.
Consciente que les aspirations unitaires n’avaient pas abandonné le peuple de gauche, la candidate, de nouveau socialiste, se fit fort de les capter avec la martingale des primaires, ne se souvenant même pas, toute à son optimisme retrouvé, qu’elle en avait catégoriquement rejeté l’idée sur une chaîne du service public, quelques heures avant.
Belle aubaine pour les réseaux sociaux qui se sont fait un malin plaisir de diffuser à profusion les deux mêmes images, dans les mêmes habits, d’une candidate à la présidence de la République qui, compte tenu de l’urgence et de l’importance, pour elle, du propos, n’avait pas eu le temps de se changer pour dire tout et son contraire à la France entière.
Même François Hollande y avait mis du sien pour l’enfoncer, pourtant pas le mieux placé pour donner des leçons alors qu’il avait été contraint de renoncer à solliciter un deuxième mandat, non sans avoir permis à son successeur d’entrer dans la place.
Puis vint le tour d’Arnaud Montebourg, son ancien ministre de l’Economie, le candidat de la « Remontada » qui voulait couper les vivres des familles d’immigrés restées au pays.
Jouant le tout pour le tout avec la fibre unitaire, il eut l’éclair de génie de se faire filmer téléphonant à ses concurrents de gauche et écologiste pour que, cette fois, ils acceptent venant de lui ce qu’ils avaient refusé à sa camarade de parti.
Pour les convaincre, connaissant très bien le penchant naturel de certains de ses interlocuteurs, il proposa de réaliser le rassemblement le plus large en commençant par exclure l’un d’entre eux. Pour faire bonne mesure, c’est celui que les sondages mettent actuellement devant tous les autres !
Toutes ces gesticulations ont pour but de masquer la profonde crise d’identité que connaît le parti socialiste qui, il n’y a pas si longtemps, occupait, en même temps, la tête de toutes les institutions du pouvoir national et nombre de celui régional, départemental et local.
Quand Jacques Delors refusa de jouer le rôle historique qui s’offrait à lui, c’est parce que, cette crise, il la pressentait et qu’il se sentait, à l’époque, incapable de l’affronter avec sa potion libérale.
Quand Lionel Jospin, pourtant le candidat favori, fut devancer par le sinistre Le Pen, une tout autre explication fut donnée afin de détourner les regards de cette même crise qui n’a donc pas débuté avec le quinquennat de François Hollande. Même comportement de l’autruche et même punition pour Anne Hidalgo et Arnaud Montebourg.
Même déni de réalité aussi du parti communiste qui s’évertue de faire croire que son déclin remonterait dix ans en arrière, quand il a renoncé à présenter un candidat à l’élection présidentielle. En réalité, lui aussi est confronté à une profonde crise d’identité qui affecte tous les partis communistes dans le monde, depuis des décennies.
Or, ces deux partis, souvent ensemble, ont incarné la force d’une gauche porteuse de progrès et d’espoir. Ce n’est plus le cas et comme aucune autre formation politique, Insoumis ou Verts, n’est parvenue à occuper la place originale du parti communiste et du parti socialiste dans le cœur des Français et notamment dans celui des couches populaires, c’est au plus bas qu’on retrouve ce que de moins en moins de progressistes considèrent comme étant la gauche.
Ce qui offre un boulevard à la pénétration dans toute la société des idées et comportements de droite, d’extrême droite et libre cours à la domination du capital privé sur le travail et nos vies.
Toutes les martingales politiciennes ne font que nous éloigner de la construction d’un après-capitaliste que les enjeux colossaux de l’époque rendent pourtant urgent, qu’il s’agisse du réchauffement climatique, des pandémies, de la démographie, des guerres , des migrations, des inégalités ou de la montée du racisme, de l’antisémitisme et de la xénophobie.