Rien n’a été laissé au hasard. La préparation de l’opinion dure depuis des semaines. La plupart des médias s’y sont livrés corps et âmes. L’enjeu est exceptionnel. Il s’agit de faire accepter à la population de notre pays qu’elle renonce à ce qui demeure sans doute un de ses plus grands objets de fierté. Accepter d’abandonner cette exception d’un modèle social qui n’est déjà plus entièrement sous l’emprise des dogmes du capitalisme. Ce secteur public, son importance qui ont été inventés pour que ceux qui ne possèdent que leur force de travail ne soient pas abandonnés à leur sort, sous la coupe de ceux qui ont tout et plus encore.
C’est au sortir de la guerre, dans un pays en ruines, que la sécurité sociale, le statut de la fonction publique, un système de retraites solidaire ont été inventés ici par nos prédécesseurs et encore ignorés dans nombre de nations parmi lesquelles la plus puissante, les Etats-Unis. Notre bourgeoisie nationale, qui considère davantage la rente que l’investissement utile, a toujours pensé que l’existence d’un puissant secteur public la plaçait en situation de concurrence déloyale dans la compétition internationale. Elle n’a eu de cesse de l’affaiblir afin de s’appuyer sur ses défauts pour le dénigrer et faire la promotion du privé et de sa loi de la jungle. Ce n’est pas un hasard si la réaction la plus enthousiaste au discours de François Bayrou soit venue d’un cadre du parti de Nicolas Sarkozy. Tout ce que ce dernier avait rêvé d’accomplir sans jamais pouvoir y parvenir se déroulait sous ses yeux, énoncé par son pire ennemi auquel il attribue la responsabilité de sa dernière défaite.
Alors que le programme du Conseil national de la Résistance a beaucoup contribué à reconstruire le pays au sortir de la guerre, il reste aujourd’hui à convaincre nos concitoyens qu’en en sapant les principes une même mobilisation se produira.
Il y a loin de la coupe aux lèvres.
Certes, le contexte international est exploité au mieux mais il se pourrait bien qu’il n’échappera à personne qu’il implique une soumission aux visées de Donald Trump et des milliardaires US. Ce qui n’est guère compatible avec l’éloge de la liberté énoncé par Emmanuel Macron dans son discours aux armées, la veille de la fête nationale.
Tout a été pensé dans les moindres détails. La tonalité générale, lourde de peurs et d’anxiétés, a été imprimée au départ par le chef d’état major des armées. Après son intervention, toute critique du projet de loi de finances présenté par le premier ministre se verrait qualifier de haute trahison. Comme toute critique de la politique de Benjamin Natanyahu s’est vue assimilée à de l’antisémitisme.
Avec en plus le choix des deux jours fériés les plus immondes possibles dans l’espoir que les polémiques qu’il suscitera estomperont le caractère de classe d’un projet de loi de finances qui fait payer aux petites gens, les plus nombreux, tous les avantages consentis aux plus riches depuis qu’Emmanuel Macron gouverne le pays.
La dette, c’est eux. Les sacrifices ne sont que pour les autres. La liberté du renard dans le poulailler. La seule que laisse le capitalisme à celles et ceux qui n’ont que leur force de travail à vendre et qui dépendent donc du bon vouloir des propriétaires, des actionnaires privés qui veulent bien l’acheter en la rémunérant le moins possible.
Tout le projet de Bayrou est fondé sur la préparation de la guerre que Trump impose aux anciens alliés des Etats-Unis. Elle prépare l’intervention de troupes européennes en Ukraine. La Russie est désignée comme menace existentielle, prête à nous attaquer. Poutine y trouve des raisons supplémentaires de poursuivre ses folies impérialistes. Macron travaille à construire le volet européen de l’OTAN sous domination des USA, débouché de leurs armes sophistiquées.
On apprend que notre dissuasion nucléaire ne dissuade donc plus la Russie qui nous menacerait de frappes préventives. L’abandon du modèle social issu du programme du Conseil national de la Résistance mérite bien quelques gros mensonges et omissions. Parmi lesquelles le peu de publicité au choix du gouvernement espagnol de gauche, de son premier ministre socialiste de refuser de sacrifier le modèle social ibérique aux injonctions belliqueuses de Donald Trump. Avec également cet appel à la production intensive lancé par François Bayrou. Produire sans rien changer aux façons de le faire, de consommer et de se déplacer nous mettra en situation de faiblesse face aux conséquences d’un dérèglement climatique qui vont donc se poursuivre et s'aggraver. François Bayrou confirme que le capitalisme est hors jeu pour affronter les trois enjeux primordiaux de l’époque, la paix, l’égalité et le dérèglement climatique. L’ambition à faire partager pour un progrès de civilisation est désormais celle d’un post-capitalisme démocratiquement construit par des citoyennes, des citoyens, des jeunes du monde, désireux de maîtriser leur destin, forme supérieure de leur liberté.
L’espoir est de ce côté. Du côté d’un front européen de la paix que les populations, les jeunes sont disposés à construire. La netteté de la réaction de Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, y contribue. Les premières réactions des partis du NFP aussi. Le pouvoir, les milliardaires sont loin d’avoir gagné la partie. La propagande ne peut pas tout. Le mépris des classes populaires encore moins.
Encore conviendrait-il que les composantes du NFP, les organisations syndicales, le monde des associations, du travail, de la création et de la culture se rencontrent au plus vite afin d’organiser les ripostes unitaires au niveau imposé par l’ampleur de l’attaque. Le retour aux réalités s’impose pour remettre la propagande à sa place.