Alors que les grands groupes sont épargnés, comme les propriétaires des yachts qui paradent dans la baie de Saint-Tropez, François Bayrou offre à leur rapacité des pans d'activités qui jusqu'ici appartenaient à la collectivité. C'était une des spécificités françaises dont toutes les composantes de la gauche étaient légitimement fières et que nos voisins nous enviaient.
Elle nous venait de la sortie de la guerre d'un pays en ruines, infiniment moins riche qu'aujourd'hui. Elle avait beaucoup contribué à son redressement grâce à une volonté politique qui ne faisait pas de l'enrichissement de quelques-uns le but de la politique. Grâce aussi à des esprits, animés par cette volonté et poussés par un mouvement social tourné vers la créativité et dont la lutte victorieuse contre le nazisme avait rapproché les composantes.
Il n'est donc pas surprenant que les annonces du premier ministre soient accueillies par une majorité de nos concitoyens par un profond sentiment d'injustice d'autant plus qu'ils savent que dans ces activités qui passeraient du secteur public au secteur privé, leurs nouveaux maîtres vont s'empresser d'y imposer la loi de la recherche du profit maximum qui s'oppose à celle de la recherche de l'intérêt général.
Ces nouveaux maîtres sont prêts à tout si les mobilisations populaires unitaires ne stoppent pas leur élan destructeur de solidarités, de justice, d'égalité et de fraternité.
Ils mettent désormais sur le tapis les congés payés. Demain, ce sera le travail des enfants qui traînent dans les rues après 23 heures. Quand la sécurité, quête légitime des populations, n'a pour seule réponse que la répression, tout jusqu'au pire peut en son nom être mis en avant. Il s'en suit une surenchère permanente avec le RN dont seul ce dernier tire profit car, évidemment, l'insécurité demeure et s'aggrave.
Dire que les milliardaires et les multinationales échappent à la purge d'austérité de François Bayrou est insuffisant. En réalité, ils en sont les grands bénéficiaires et de façon durable. S'ils arrivaient à leur fin, la France ne serait plus ce qu'elle a été qui la distinguait des USA ou de la Grande-Bretagne, pays dans lesquels le malade, pour être soigné, doit plus compter sur sa carte bancaire que sur sa carte Vitale.
Tel est l'enjeu d'une période qui voit nos oligarques trouver leur inspiration chez Donald Trump et lui obéissent au doigt et à l'œil quand il exige que les dépenses publiques consacrées à la guerre connaissent une forte progression.
Ce à quoi le gouvernement de gauche espagnol répond qu'il n'est pas question de sacrifier son modèle social à une œuvre de guerre.
J'ai la faiblesse de penser que si la question était posée à nos concitoyens, ils préfèreraient la réponse du socialiste Pedro Sanchez à celle de François Bayrou. Mais la question ne sera pas posée. Le référendum, Emmanuel Macron en parle mais dans la réalité, il ne tient aucun compte du résultat des dernières élections législatives. Il dissout l'Assemblée nationale, aggravant une crise politique dont il prétend tirer argument pour, avec une situation internationale périlleuse, obtenir des Français qu'ils adhèrent à un projet que ces derniers ont toujours refusé quand ils le comparent à ce qu'ils ont depuis la Libération.
Dans d'autres conditions, c'est à améliorer ce qui existe qu'il convient de travailler, pas à le détruire. Si les conditions historiques et internationales ont changé, conçus pour sortir de la guerre, les principes et les ambitions du programme du Conseil national de la Résistance ont montré leur efficacité. Bonne base de départ pour des débats qui se fixeraient l'ambition de faire encore mieux aujourd'hui dans une société qui a atteint un niveau de développement supérieur à celle des années 1940. Des communistes l'ont eu cette ambition au point de voir leurs noms encore attachés à des conquis sociaux et démocratiques que d'autres cherchent à atteindre dans le monde, dans des pays au PIB bien inférieur au nôtre. Faut-il les en dissuader et tourner le dos à un internationalisme auquel nous tenons tant ?
Des innovations sont aujourd'hui possibles qui ne l'étaient pas hier. C'est vrai également d'enjeux tels ceux qui découlent du dérèglement climatique, de la multiplication des conflits armés, des bouleversements venus des Etats-Unis...
Rien n’est joué. En dépit des moyens considérables mis en œuvre, la propagande du pouvoir n’a pas atteint ses objectifs.
Place à une activité politique digne de ce nom. Si elle leur en offre les possibilités, les citoyennes, les citoyens, les jeunes sont disposés à prendre part aux confrontations d’idées nécessaires. Aux partis politiques d’y contribuer et d’accepter de ne plus être les seuls maîtres du jeu. Leurs logiques ne sont pas toutes positives.
Les ripostes au plan Bayrou, la préparation des prochaines élections municipales offrent l’occasion de modifier les relations détestables qui se sont instaurées entre les partis du NFP et leurs électorats respectifs.
Aucun n’y échappe et saurait s’en exonérer.
Ce n’est qu’un constat, pas une opinion.