Lucien Atencia

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Billet de blog 19 août 2021

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Réflexions sur ce qu'on appelle encore la gauche.

Aujourd'hui, ce sont plutôt les conceptions de droite et d'extrême droite qui ont le vent en poupe, jusqu'au plus haut sommet de l'Etat, et, là encore, pas qu'en France.

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Réflexions sur ce qu’on appelle encore la gauche.

Lorsque je dis que la cause principale de l'extrême faiblesse actuelle de ce que l'on nomme encore la gauche, tient à la crise que connaissent ses deux composantes principales, le parti communiste et le parti socialiste, est-ce que je fais de l'anticommunisme ? Ce constat douloureux est pourtant banal pour des millions d'individus dans le monde car il n'est pas, loin s'en faut, franco-français. Il semble bien qu'il n'y ait plus que les dirigeants des deux partis concernés pour ne pas l'admettre, ces deux partis qui en France ont incarné, unis, une gauche puissante, ouverte aux autres, porteuse de valeurs et d'actions progressistes dont elle tirait sa force propulsive, celle qui a permis d'inventer, à de rares périodes, des réponses d'intérêt général, dont certaines marquent encore profondément notre société. Aujourd'hui, ce sont plutôt les conceptions de droite et d'extrême droite qui ont le vent en poupe, jusqu'au plus haut sommet de l'Etat, et, là encore, pas qu'en France. Dans ces conditions, il serait paradoxal que les forces de gauche, unies ou pas, soient à la porte du pouvoir ! Paradoxal aussi parce que, niant ce qui leur arrive, elles n'ont aucune chance de s'attaquer à ses causes. La question a pourtant été posée de longue date dans les deux partis concernés. Songeons au nombre de fois où le changement de leur nom a été soulevé en leur propre sein, alors qu'à mon sens, c'est à l'inverse qu'il faudrait consacrer la réflexion, les capacité créatives et l'action populaire rassembleuse. J'émets en effet l'hypothèse que ce n'est pas de nom qu'il faut qu'elles changent, mais au contraire, de faire coïncider leurs deux noms, magnifiques, à la réalité qu'elles incarnent aujourd'hui, aux yeux de l'immense majorité de nos concitoyens, au point de voir la gauche, certes exister encore, mais dans des têtes de moins en moins nombreuses parce qu'ayant perdu l'essentiel de ce qui faisait son attrait historique auprès des travailleuses et des travailleurs. Que reste-t-il de socialiste dans un parti qui après avoir opté pour l'économie de marché fait sienne la société de marché, dont plusieurs de ses membres ont rejoint Emmanuel Macron et participent à un gouvernement dirigé par un Premier ministre, un ministre de l'Economie et un autre de l'Intérieur de droite ? Dans la déchéance de nationalité de François Hollande, qui n'a pas trouvé les forces nécessaires pour se représenter à la fin de son mandat ? Dans le record de privatisations opérées par le gouvernement de Lionel Jospin, à participation communiste, qui a vu le sinistre Le Pen lui barrer la route du deuxième tour ? Qui y-a-t-il de socialiste à voir le secrétaire de ce parti bafouer l'indépendance de la justice en proposant que la police contrôle l'application des peines comme le fait une Marine Le Pen raciste et xénophobe ? Mais je ne m'arrête pas là, comme le font habituellement les communistes, tout en s'alliant, sans difficultés particulières, avec les précédents, et inversement, dès qu'il s'agit d'engranger des sièges d'élus. Qu'a de communiste le secrétaire national du Parti communiste quand il vote pour la gestion de la crise sanitaire du gouvernement précédent, celle de toutes les pénuries ? Quand il manifeste aux côtés du ministre de l'Intérieur et de députés d'extrême droite pour obtenir des peines incompressibles ? Quand il propose que les immigrés qui n'obtiennent pas le droit d'asile soient "renvoyés chez eux" ? Quand il fait l'éloge du régime chinois auquel il attribue le qualificatif de "communiste", comme le font tous les dirigeants capitalistes, alors que son parti unique conduit ce grand pays, d'une main de fer, dans une compétition mondiale sans merci avec les autres grandes puissances capitalistes, avec l'objectif affiché de les supplanter tandis que subsiste en Chine d'énormes inégalités ? Que dire de ces dirigeants chinois qui négocient à Kaboul avec les talibans, comme l'ont fait avant eux, ceux des USA et de l'Otan, dont la France est toujours membre et dont le télé-président sous-traite en Europe la gestion des flux migratoires contre rétribution à Erdogan, lui aussi dans l'Otan et accroché aux basques des talibans, tandis qu'Emmanuel Macon est venu surtout nous dire qu'ils veulent nous importer le terrorisme ? Chacun est à même de compléter une liste qui démontre que parti socialiste et communiste tentent de faire la promotion de falsifications grossières des pensées et actions de leurs fondateurs et y perdent leur identité, leur âme. Je me permets de conseiller à leurs dirigeants d'en retrouver le fil au plus vite. Pas comme une génuflexion devant des dogmes, mais bien, dans les conditions de notre époque, pour que nombreux, nos concitoyens aient envie de participer à une oeuvre collective inventive, ayant en point de mire permanent l'émancipation humaine et la préservation de notre Terre, ce qui suppose, à mes yeux, un essor sans précédent des libertés individuelles et collectives et de la démocratie réelle. Pas celle d'un pays où un seul homme décide de tout, situation que ne connaissent pas les monarchies qui subsistent. On n'en prend pas le chemin et la méfiance terrifiante qui s'est installée à l'encontre d'une caricature de la chose publique, du fait même de la perte d'identité des deux forces principales de gauche, que ne sont pas parvenus à combler ni les Insoumis, ni les Verts, est un des obstacles essentiels que rencontrent celles et ceux qui, comme moi, n'ont au coeur que l'ambition de contribuer à ce que les vents dominants changent de direction et pour qui la participation populaire est indispensable pour réussir. Cela vaut le coup non ?

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