Lucien Atencia

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Billet de blog 21 octobre 2023

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Modifier le rôle des partis.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Plusieurs figures historiques de la France Insoumise critiquent publiquement Jean-Luc Mélenchon auquel leur réussite politique personnelle doit beaucoup. Elles le font alors que le ciel de la macronie et des médias à sa dévotion lui tombe sur la tête.

Mais force est de reconnaître que ces dirigeants de gauche ont commencé à le faire bien avant que la tempête ne se déchaîne contre le fondateur de la Nupes.

Leurs critiques visent la question fondamentale de la démocratie dans leur formation et les excès de comportement de celui qui l’incarne le plus aux yeux de l’opinion.

Elles ont pour objectif de corriger de graves défauts, pas de détruire la France Insoumise.

Il est donc malveillant et politicien de les confondre avec celles formulées par la macronie, LR et le RN, pas plus qu’avec celles exprimées de longue date par la direction du PCF.

Vouloir tuer LFI n’a rien de commun avec vouloir la rendre plus démocratique et plus collective.

Au passage, on remarquera que l’existence et les expressions publiques de ces « dissidents » renvoient une image à mille lieues de celle habituellement mise en avant d’une armée de robots à la dévotion « d’un gourou », comme le nomment amicalement nombre de mes camarades communistes.

Il se trouve qu’avec d’autres, dans le parti communiste, pour des objectifs souvent proches de ceux recherchés par Clémentine Autain, Alexis Corbière ou Raquel Garrido, nous nous exprimons aussi publiquement. A la différence que nous ne bénéficions pas, loin de là, de la même publicité qu’eux.

Même pas  dans « L’Humanité ».

Clémentine Autain, députée Nupes de Seine-Saint-Denis, dans une longue interview datée du 18 octobre, qui peut être consultée sur son site, propose quelques pistes de réflexions pour « être à la hauteur ».

J’y ai trouvé un grand intérêt et ai formulé les remarques qu’elle m’a inspirées.

Parmi les causes qui ont amené la Nupes à ne plus être riche que de trois composantes et d’un groupe de députés à l’Assemblée nationale, j’avance l’hypothèse que lorsqu’elles étaient quatre, certes a été mise en avant la nécessité d’élargir l’alliance et de l’ancrer dans les territoires, mais ces vœux sont restés tristement pieux.

Dès lors, peut-être faudrait-il considérer que les quatre composantes, dans une rare unité, partagent la même responsabilité de s’être trop tournées sur elles-mêmes et bien trop peu vers celles et ceux qui devraient être les principaux acteurs de l'activité politique, les citoyennes et les citoyens.

 Ces derniers se détournent et se méfient de plus en plus de la politique telle qu'elle est conçue.

Leur abstention aux élections n'est qu'un symptôme parmi d'autres d'une crise beaucoup plus profonde.

Comment pourrait-il en être autrement quand leur rôle se réduit à mettre ou pas un bulletin dans une urne à des dates régulières, avec des modes de scrutin et des institutions conçues pour reproduire ce qui domine dans la société capitaliste et qui cultive la délégation de pouvoir ?

L'expérience en a été faite en grand avec le passage en force de la réforme des retraites.

Celles et ceux qui continuent de voter pour ou contre des projets conçus en dehors d'eux ne se font, dans bien des cas, aucune illusion. Ils sont conscients que les choix qu'ils ont soutenus par leur vote, dans la plupart des cas, ne seront pas respectés.

Le système médiatique contribue à faire du citoyen un consommateur de politique-spectacle. Faire le buzz, adopter une posture évolutive selon les variations de l'opinion, l'opportunisme, le sectarisme dévastateurs, les invectives, les insultes ont remplacé la qualité de la proposition, la profondeur du projet, l'argumentation de nature à convaincre.

Il s'agit de choquer pour attirer l'attention avec l'espoir de plaire pour espérer être réélu, alors qu'il conviendrait de susciter de l'intérêt et de la réflexion afin, pour les partis politiques, de bénéficier en retour de la richesse produite par des citoyens qui auront été stimulés par la qualité du discours politique.

Eveiller les consciences, développer l'esprit critique, donner envie de débats et de confrontations respectueuses, telles sont les ambitions à se fixer.

Or, actuellement, plus de temps est consacré à dénigrer ses adversaires ou ses alliés qu'à défendre ce que l'on a d'original et d'efficace à proposer pour que la vie du plus grand nombre change dans le sens d'un progrès de civilisation.

Il est encore temps, même si cela est difficile, d'inverser le sens même de la politique et de faire du citoyen son centre de gravité.

Cela suppose de modifier le rôle des partis politiques.

Bien plus que des machines électorales, ils devront devenir des organisations démocratiques qui consacrent leur énergie, leurs convictions et leur créativité à produire du commun, à multiplier les lieux, les sites et points de rencontres avec les femmes, les hommes et les jeunes qui les entourent.

Les médias auront une grande responsabilité, celle d'animer et de donner à voir un processus démocratique en permanente évolution.

Rien de commun avec ces matinales où s'opèrent des interrogatoires à marche forcée de femmes et d'hommes politiques agressés par les mêmes questions posées par des journalistes qui n'attendent parfois pas les réponses, plus soucieux de leur propre notoriété que de la volonté d'obtenir le meilleur de leurs interlocuteurs.

Si les partis politiques n'ont pas conscience qu'il leur faut profondément se transformer, ils disparaîtront.

Le processus est en cours comme le souligne avec justesse Clémentine Autain.

Elle met en avant avec raison la progression de l'extrême droite en France comme dans toute l'Union européenne. Chez nous, elle est aux portes du pouvoir. L'actualité internationale, le retour des attentats terroristes, il faut en être conscients, lui offre du grain à moudre. La politique des petites phrases, les émotions, les peurs, les mensonges jusqu'aux silences la favorisent au plus haut point.

C'est la conception de la politique qu'il faut révolutionner pour que change la vie.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.