Dans un précédent billet, je me suis efforcé de politiser les prochaines élections européennes pour qu’elles ne restent pas qu’un moment électoral avec son traditionnel record d’abstentions. Ce qui m’a conduit à en revaloriser les enjeux politiques pour donner des raisons aux citoyens et citoyennes de s’y intéresser.
J’ai estimé que cela supposait d’établir une cohérence entre la précédente séquence présidentielle-législatives, le formidable mouvement populaire en cours et la prochaine séquence européennes-présidentielle-législatives. Qu'on le veuille ou non, tout en ayant perdu beaucoup de leur intérêt, les élections restent, avec les mobilisations sociales, des moments à l'occasion desquels nos concitoyens font le plus de politique.
Cette cohérence fait ressortir les données politiques dominantes : l’affaiblissement considérable de la minorité macronienne, la profonde crise de la droite, la progression irrésistible de l’extrême droite, le retour sur la scène politique de la gauche grâce à la Nupès qui est donc bien plus qu’un simple accord électoral.
Le mouvement populaire en cours exprime des exigences qui vont bien au-delà du retrait de la réforme Macron des retraites. L’aspiration au changement, à être partie prenante des choix qui nous concernent, la recherche du rassemblement et de l’union pour ne plus toujours perdre et la conscience du danger extrême que représente une extrême droite présentable mais toujours fasciste, telles sont, à mes yeux et à grands traits, les dominantes de la période, à bien des égards inédite.
J'ai proposé, pour les prendre en compte, que les composantes de la Nupès se saisissent des prochaines élections européennes pour commencer à faire vivre une conception nouvelle de la politique, avec deux ambitions tant sur le projet que sur la stratégie : la démocratie en actes et la recherche de l'unité.
Nous en sommes encore très loin et je redoute que les partis alliés dans la Nupès fassent comme avant et privilégient des considérations partisanes plutôt que l'intervention populaire nécessaire bien en amont de la journée de vote. Une occasion serait ainsi à nouveau manquée de modifier plus profondément qu'on ne le croit le rapport des forces, au bénéfice du monde du travail et de la création.
Certes, la situation ne manque pas d'aspects contradictoires mais j'ai le sentiment que sa nouveauté réside dans le fait qu'ils sont plus nombreux du côté de la transformation progressiste de la société que de sa préservation. On le doit, me semble-t-il, à un phénomène mondial : la perception de plus en plus large que le capitalisme ne pourra faire face au dérèglement climatique, à l'aggravation des inégalités, aux pandémies et à la multiplication des conflits armés qu'en devenant de plus en plus autoritaire, liberticide et en reproduisant, en les aggravant, tous les traits de domination, d'exploitation, d’aliénation qu'il porte en lui.
Offrir aux hommes, aux femmes, aux jeunes qui le souhaitent la possibilité d'exprimer leur point de vue plutôt que de les appeler à rallier des projets conçus en dehors d'eux, permettrait aussi, s’agissant du nécessaire approfondissement de la Nupès, de son ancrage sur tout le territoire dans les milieux populaires et la jeunesse, de sortir de l’incantation. Place à l’innovation et à l’émulation entre ses composantes, dans le respect de la richesse de leur diversité.
Place aux travaux pratiques.
Vite, qu'il me soit possible de remplacer le "je" par un "nous".