On ne peut apprécier le caractère dérisoire des mesures annoncées par M. Attal sous la dictée de M. Macron, depuis l’Inde, que par comparaison avec les transformations profondes et de long terme qu’appelle le changement de modèle que la crise agricole met en lumière.
En sortir par le haut implique un investissement d’une ampleur considérable de toute la nation pour permettre, à la fois et indissociablement, dans l’urgence, aux agriculteurs de vivre de leur travail et de transformer leur manière de produire dans la durée.
Encore faudrait-il que la nature de cette crise et ses causes qui remontent à des décennies en arrière soient clairement identifiées.
C’est loin d’être le cas.
La conscience grandit que sont tout autant interrogés nos manières de consommer, la distribution des produits, le commerce, la nature de la construction européenne, les relations et les accords internationaux, le pouvoir d’achat de la population…
Moins d’un demi-million de travailleurs de la terre, parce qu’ils remplissent les fonctions vitales de nourrir une population, de préserver la qualité des sols qui le permet, la santé de leurs contemporains et la nature de nos paysages, posent en grand le besoin impérieux et urgent de dépassement du modèle capitaliste d’organisation de la société alors qu’il n’a pas de concurrent sur la planète et que se consacrer à la construction d’une alternative démocratique crédible ne semble vraiment pas de mode.
Tandis que les associations caritatives ne parviennent plus à remplir leur mission tant les personnes qui ne mangent plus à leur faim sont nombreuses, qu’est-il advenu de l’appel révolutionnaire lancé depuis Montreuil, relayé à Sevran - deux communes de Seine-Saint-Denis - en faveur d’une sécurité sociale alimentaire par l’ancien directeur de « L’Humanité » et des amis ?
Qui y a vu une partie de la solution des questions existentielles, au sens premier du terme, soulevées aujourd’hui par les paysans ?
Est-ce parce que les réponses durables ne pourront être qu’humaines, au service du commun et donc l’œuvre de peuples conscients, maîtres de leur destin qu’il est si difficile de les imaginer ?
Les notions de processus démocratique à engager maintenant et de planification prennent tout leur sens comme celle de l’exigence d’une nouvelle ère de la démocratie qui mette en son cœur le rôle, les responsabilités des citoyennes et des citoyens, bien au-delà des moments électoraux.
Ni les médias, ni les partis politiques y contribuent, c’est le moins que l’on puisse dire.
La référence demeure le bon sens macronien, autre manière de qualifier l’idéologie dominante produite par les classes sociales qui précisément dominent la société, domination dont il convient de se libérer pour conjurer les périls qui s’accumulent en ce début de XXIe siècle.
Ce que ne permet pas un idéal toujours inaccessible, qu’il soit qualifié ou non de jours heureux.