Avis de grève générale «transnationale», mercredi, de l'Espagne au Portugal, de l'Italie à la Grèce, pour protester, une nouvelle fois, contre les dégâts de l'austérité. En attendant de connaître le succès de l'initiative, soutenue par la Confédération européenne des syndicats (CES), voici quelques histoires, glanées dans la presse espagnole des dernières semaines. Souvent anecdotiques à première vue, elles donnent, à leur façon, une idée de l'ampleur du marasme espagnol, mais aussi du décrochage en cours, entre Europe du Nord et Europe du Sud.
1. L'annonce, fin septembre, ne paie pas de mine: l'entreprise de machinerie agricole John Deere cherche, pour son usine de Getafe, dans la banlieue Sud de Madrid, 150 personnes. Aucun détail sur les rémunérations, sur la nature du contrat, et encore moins sur le type du travail. Au dernier jour de cette convocation, c'est « une file d'un kilomètre » de chômeurs qui s'est formée, partant des portes de l'entreprise, se déroulant dans les rues de la ville, selon les témoignages d'habitants. « Je ne sais même pas de quoi retourne le travail, mais qu'est-ce que je peux bien faire d'autre? », interroge l'une des personnes dans la file. Au total, 15.000 sans emploi se sont présentés dans la semaine pour ces postes mystère. A lire ici le reportage dans El País (2 octobre).
2. A l'automne, Pedro Almodovar a tourné son 19e film, Los amantes pasajeros, dans un décor inédit: l'aéroport de Ciudad Real, à 200 kilomètres au Sud de Madrid, doté de l'une des plus grandes pistes d'atterrissage d'Europe (4,2 kilomètres), et qui devait accueillir, à terme, 2,5 millions de passagers. Sauf qu'il n'a jamais dépassé les 100.000 visiteurs en deux ans. L'endroit est à présent désert, et, imagine-t-on, peuplé de fantômes.
Les vols commerciaux ont pris fin en octobre 2011, et les avions privés ne décollent plus depuis avril 2012. Cet aéroport de Castille-La-Manche est devenu l'un des symboles de la folie des grandeurs qui s'est emparée, dans les années 90, de certaines collectivités espagnoles. Encouragées par des crédits faciles, ces dernières se sont lancées dans l'édification de châteaux de carte, sans véritable utilité pour les citoyens. A lire ici.
3. Dans la masse de chiffres qui circulent pour dire l'intensité de la crise du marché du travail, on a retenu celui-ci: au mois d'août dernier, à peine 6% des contrats de travail signés étaient à durée indéterminée (91.200 sur un total de 1,02 million de contrats conclus). Un phénomène classique lié aux petits boulots saisonniers? Oui, mais jamais d'une telle ampleur. Le volume de ces emplois à durée indéterminée a chuté de 32% par rapport au mois de juillet, mais aussi de 7% par rapport au mois d'août 2011. Pour rappel, le taux de chômage espagnol vient de passer, en octobre, la barre symbolique des 25% (plus de 35% en Andalousie). A lire un décryptage ici.
4 - Les prix de l'immobilier ont chuté en moyenne en Espagne de 33% depuis décembre 2007, date de l'éclatement de la bulle immobilière, selon une étude d'un cabinet privé publié début novembre. Le plongeon atteint 40% sur certains secteurs de la côté méditerranéenne.
5 - C'est une petite anecdote, qui en dit long sur l'asphyxie financière des communautés autonomes. A court d'argent, la principauté des Asturies, tout au Nord de l'Espagne, a décidé, en juillet 2011, de fermer son luxueux siège à Madrid. Un immeuble de 1.500 mètres carrés, inauguré en 2007, en plein cœur de la capitale (sur la Glorieta de Ruiz Jimenez). Sauf que la communauté n'a jamais trouvé repreneur pour cet édifice devenu, depuis quelques mois, par la force des choses, un abri pour sans domiciles fixes. A lire ici.
Pour poursuivre, retrouvez dans la partie payante de Mediapart, trois de nos derniers reportages en Espagne:
Comment le socle politique de l'après-Franco est en train de craquer
Pourquoi l'extrême droite ne profite pas de la crise en Espagne
Dans la banlieue de Madrid, Bankia fait expulser les mauvais payeurs
Billet de blog 13 novembre 2012
Cinq histoires d'une Espagne asphyxiée
Avis de grève générale «transnationale», mercredi, de l'Espagne au Portugal, de l'Italie à la Grèce, pour protester, une nouvelle fois, contre les dégâts de l'austérité. En attendant de connaître le succès de l'initiative, soutenue par la Confédération européenne des syndicats (CES), voici quelques histoires, glanées dans la presse espagnole des dernières semaines.