A la veille d'une nouvelle journée de mobilisation syndicale en France, ne pas oublier de lire la presse ango-saxonne. Et le Financial Times en particulier. Le quotidien consacrait jeudi dernier une page presque entière, la 12e, rubrique Business Life, à la vogue du «bossnapping» en France - les fameuses «séquestrations» de patrons. L'article principal, signé Peggy Hollinger, revient sur cette «tradition», «presque aussi constitutive de la culture française que la baguette et le brie». Preuve de l'«anxiété» des dirigeants d'entreprises dans l'Hexagone, des sociétés de conseils se multiplient, pour aider les patrons à gérer ces situations potentiellement explosives. Mais la perle est ailleurs : un encadré très sérieux livre les huit «astuces pour survivre au pire». En clair, le FT coache les patrons français pour vivre au mieux leur séquestration. Sans rire.
Conseil numéro un : «Bien réfléchir au lieu où se tiendra la réunion avec les employés. Organiser cette réunion entre les murs d'une usine sur le point de fermer, risquerait d'exacerber une atmosphère déjà tendue.» Deux : «Préparer discrètement une tenue de rechange, une brosse à dents et des serviettes pour bébé, que vous conserverez à portée de main pendant la réunion.» Ou encore : «Si vos détenteurs se montrent désagréables, signez tout ce qu'ils vous demandent de signer. Les contrats obtenus par la force ne sont pas reconnus par la loi française».
Point d'orgue de ce manuel de survie pour patrons aux bords de la crise de nerfs («don't panic», conseille pourtant la journaliste), le quatrième point préconise de «se rendre aux toilettes avant la réunion». Explication philosophico-historique du FT : «Un patron récemment séquestré s'est senti humilié lorsqu'il avait dû demander à ses employés la permission d'aller aux toilettes. Jean-Paul Sartre, philosophe classé à gauche, qui a lui-même encouragé des séquestrations de patrons dans les années 70, estimait en effet que ‘lorsqu'un patron en vient à demander à ses employés la permission d'aller pisser, un grand pas a été franchi'».
Lire, dans le journal de Mediapart, notre enquête, archives à l’appui : Séquestrer son patron, c’est mal mais ça marche.