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Billet de blog 2 avril 2015

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Ambiance explosive à Paris-8: la fac fait de la résistance

L’ambiance est tendue à l’université de Paris-8 (Seine-Saint-Denis). Cette université, auparavant nommée université de Vincennes et née dans le contexte particulier de Mai-68, est traditionnellement considérée comme une de seules résurgences d’une université de gauche, engagée socialement, permettant notamment l’inscription d’étrangers ou de sans-papiers.

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L’ambiance est tendue à l’université de Paris-8 (Seine-Saint-Denis). Cette université, auparavant nommée université de Vincennes et née dans le contexte particulier de Mai-68, est traditionnellement considérée comme une de seules résurgences d’une université de gauche, engagée socialement, permettant notamment l’inscription d’étrangers ou de sans-papiers. C’est conformément à cette tradition que Danielle Tartakowsky a été élue à sa tête, elle qui est une plume reconnue des mouvements sociaux, une figure engagée contre la LRU, défenseuse des organisations syndicales – c’est elle qui a notamment fait le discours d’ouverture lors de la fête des 120 ans de la CGT.

Paris 8, dune université« de gauche »à une université néolibérale ?

Las, on dit que le pouvoir change les hommes ! Il change aussi les femmes. Danielle Tartakowsy, prétendument « de gauche » et amie des luttes sociales, paraît bien décidée à faire de Paris 8 une université gestionnaire comme les autres, adaptée aux nouvelles normes néolibérales et ultra sécuritaires : mesures austéritaires, filtrage sévère des extérieurs (le plan Vigipirate est toujours bien en vigueur à Paris 8, avec un contrôle systématique des cartes étudiantes à l’entrée de la fac), limitations de la liberté d’expression. Mais pour l’instant, tudiants et membres du personnel sont bien décidés à ne pas laisser faire de leur fac une entreprise multinationale moderne.

Mouvement social : femmes en lutte à Paris 8

En effet, Paris 8 s’agite, la présidence est confrontée à de nombreuses luttes et les polémiques enflent : cela fait maintenant près de deux mois que certains membres du personnel de catégorie C, principalement des femmes, mères de famille, qui se sont réunies dans le collectif des bas salaires de Paris 8, sont en grève. Une grève offensive et solidaire, qui s’oppose au principe des primes individuelles et qui réclame une augmentation de salaires pour toutes et tous de 98 euros net par mois, une transparence des comptes (puisque l’université s’est montrée incapable de donner un compte rendu clair de la gestion d’attribution des primes) et des négociations collectives sur les évolutions de carrière. Paris 8 une nouvelle zone à défendre ?

Ces grévistes sont activement soutenues par des étudiants et étudiantes, politisés ou syndiqués, qui organisent avec elles des diffusions de tracts, des mini-manifestations à l’intérieur de l’université aux cris de « Tarta, la fac n’est pas à toi ! » et des soirées de soutien qui ont permis de créer une caisse de grève non négligeable. Les soutiens extérieurs, des syndicats (Sud) et des partis politiques (NPA, Parti de Gauche), sont venus les appuyer. De nombreux professeurs de Paris 8 ont également dit leur soutien à ces revendications. Les étudiants font tout pour diffuser le mouvement : ils ont ainsi produit plusieurs vidéos savoureuses (ci-dessous) où alternent les déclarations sociales de la présidente de l’université et les actions qu’elle a réellement mises en place… Mais la réponse de Danièle Tartakowsky reste bornée : la présidente refuse toute négociation. Pire, elle a même mise en place des retenues sur salaires, une mesure qui n’avait jamais été appliquée à Paris 8, même lors des violents mouvements sociaux de l’après mai 68. Bref : on lui demande de nous donner de quoi se payer un caddie, et elle vide nos frigos !

Une liberté dexpression limitée !

Comme si cela ne suffisait, un autre scandale envenime la fac de mai 68. Le collectif Palestine, particulièrement actif à Paris 8, a voulu organiser des actions lors de la semaine internationale de lutte par le boycott contre l’occupation israélienne en Palestine. Mais pour la présidence, tous les moyens son bons pour l’entraver : hypocrisie (d’un coup, il n’y a plus aucune salle disponible), violence (pression particulière sur la directrice du collectif), infantilisation (les étudiants et étudiantes qui luttent sont forcément des gamins pourris gâtés) et censure enfin, la soirée ayant finalement été interdite. Mais la censure ne fonctionne pas toujours: le collectif a appelé à l’aide sur les réseaux sociaux, les personnes extérieures ont afflué. Mauvaise passé pour la présidence

De la fac des sans-papiers à la fac de la discrimination ?

Enfin, un étudiant étranger a fait l’objet de discrimination manifeste. Doctorant, puis ATER à l’université de Paris 8, il a eu un double statut étudiant-professeur, a été salarié par la faculté pendant quatre ans. Cependant, il se voit refuser le droit aux allocations chômage – ce que les doctorants et ATER non étrangers perçoivent sans problème puisqu’ils cotisent pour pouvoir jouir de ce droit-, sous prétexte que son visa porte la mention « étudiant ». « Ah mais il aurait fallu demander à changer l’indication de votre Visa », prétend l’administration de la faculté, quatre ans après son inscription… Comment la faculté, alors que c’est elle qui est chargé de verser les allocations, peut-elle ne pas penser à guider ces étudiants étrangers afin qu’ils ne se retrouvent pas à ne pas pouvoir toucher le chômage pour lequel ils ont cotisé comme tout le monde ? Il y a plus : lorsque cet étudiant, aujourd'hui dans une situation particulièrement précaire, essaie de faire valoir ses droits, on lui répond systématiquement : « Vous devriez vous estimer heureux d’avoir eu l’opportunité de travailler pour l’université », ou encore : « Tout le monde doit faire des sacrifices ». Tout le monde ? Peut-être pas la présidente de l’université, qui déclare elle-même avoir touché une prime de 22 000 euros.

Attention, la fac de Mai 68 nest pas morte

Mouvement social des grévistes, mouvement politique de soutien à la cause palestinienne, étudiants étranges discriminés… À toutes ces revendications, la présidence n’a qu’une réponse : la répression. Accompagnée d’un slogan méprisant « Soyez contents ». Soyez contents d’avoir un travail (précaire –voire non rémunéré !), soyez content d’être inscrit (chèrement) à la fac, soyez content d’être embauché par la fac (même si on vous refuse vos allocations chômage). Un pari risqué : la révolte gronde et les luttes convergent. L’université de Mai 68 n’est peut-être pas tout à fait morte et risque même de se réveiller !

Des membres de Paris 8 en colère !

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