Pas moins de 150.000 personnes ont manifesté samedi dans dix villes israéliennes pour réclamer « une amélioration du pouvoir d’achat » et la « justice sociale ». Une marrée-humaine, jamais vue depuis au moins quatre décennies, a manifesté dans une ambiance de kermesse sous le slogan: « Le peuple exige la justice sociale » arborant des drapeaux israéliens accompagnés de quelques drapeaux rouges.
L’AFP indique que plus de 50.000 manifestants ont marché au centre-ville, de Tel-Aviv, foyer de contestation qui a commencé un certain 14 juillet quand une étudiante de 25 ans, Dafna Lief, a planté sa tente au centre de cette ville pour protester contre des loyers exorbitants. Son cri, répercuté par Facebook, qui a du coup ravivé la fronde lancé en juin sur les réseaux sociaux du boycottage du fromage blanc, un aliment de base dont le prix avait flambé, a été entendu et il a fini par susciter « la révolte des tentes » dans presque tout le pays, des campements de toile ont été installer au cœur de toutes les grandes villes d’Israël.
Pour revenir à la manifestation de samedi, à Jérusalem, des milliers de personnes se sont rassemblés aussi devant la résidence du Premier ministre, Benjamin Netanyahu, arborant des banderoles avec l’inscription « Toute une génération veut un avenir ».
A Jaffa, dans cette ville transformée en un paradis pour les constructeurs de maisons de luxe et de galeries d’art, Juifs et Arabes, tous ensemble, sont descendus dans la rue, avec leurs pancartes entre les mains, en arabe et en hébreu, sur lesquelles on pouvait lire : « Juifs et Arabes voulons des loyers raisonnables », « stop aux constructions de maisons pour riches uniquement !». Même ampleur partout: 2000 personnes à Ashdod, 3000 à Beer Sheva, au moins un millier à Kyriat Shmona dans l’extrême nord du pays. Plus de dix mille manifestants A Haïfa.
Ainsi ce qui a d’abord commencé comme une petite protestation d’étudiants à Tel-Aviv, sur les prix des logements qui ont bondi de 32% à Tel-Aviv et de 17% à Jérusalem, une tendance qui vaut pour l’ensemble du pays en un an, a rapidement pris de l’ampleur et s’est métamorphosée en un mouvement national avec des gens de tout âge et de tout niveau social. L’aggravation des inégalités sociales, et la dégradation des services publics ne sont pas du reste: « jamais encore de telles foules n'étaient descendues dans la rue sur des thèmes sociaux », atteste le quotidien Yediot Aharonot.
La centrale syndicale nationale, la Histadrout, s’est jointe aux protestataires depuis le 27 juillet et somme le gouvernement de mettre en place, des négociations, et de fournir de véritables solutions. Dans Un Echo d’Israel, Jean-Marie Allafort, note que « les manifestations qui se multiplient et s’intensifient chaque jour, les grèves du corps médical auquel viennent s’ajouter d’autres revendications sont les signes d’un profond malaise » et d'« un réveil social ».
Cette pression sociale sans précédent, en effet, fait apparaitre déjà les premières fissures au sein de la majorité gouvernementale. « Le premier ministre doit rendre des comptes sur la politique et écouter la voix des manifestants, car nous avons affaire à une révolution culturelle, sociale et économique », a déclaré Reuven Rivlin, président du Parlement et membre du Likoud, le parti de Nétanyahou.
Ce dernier a annoncé le dimanche 31 juillet, dans un communiqué, qu'il nommerait une « équipe interministérielle chargée de présenter un plan pour alléger le poids économique qui pèse sur les citoyens »,et il s’est engagé aussi à prendre des mesures « pour changer l’ordre des priorités dans le domaine économique » de « réformer l’administration foncière et de lutter contre la bureaucratie afin de libérer des terrains à bâtir au profit du logement social » ou encore « une baisse des impôts indirects et d’une action concertée pour réduire l’impact des monopoles ». Ce qui a du coup provoqué la démission du directeur général du ministère des Finances, Haïm Shani, étant opposé à une augmentation des dépenses publiques.
Cependant, les promesses du Premier ministre, Nétanyahou, ne semblent pas convaincre grand monde. La protestation se poursuit et se radicalise en mouvement de grèves. Selon le Monde, quelques 150 000 employés municipaux sont en grève aujourd'hui, « les mairies sont fermées au public, les éboueurs n'ont pas ramassé les poubelles ». Le quotidien du soir note également qu'un appel à une grève de vingt-quatre heures des salariés a été lancé lundi par des internautes via le réseau social Facebook où dors et déjà « Quelque 24 000 Israéliens ont annoncé qu'ils n'iraient pas au travail ».
Sur la pancarte : « Mubarak. Asad. Netanyahu.»
Photo-1: Un camp de tentes érigé à Tel-Aviv (Reuters/Nir Elias)