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Billet de blog 8 octobre 2009

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Le scénario gabonais au Sénégal ?

Abdoulaye Wade ne veut pas lâcher le fauteuil présidentiel. «Je suis candidat en 2012, Inch’Allah. Si Dieu me donne longue vie, ma santé et mon cerveau, je serai candidat en 2012», a-t-il déclaré il y a quelques semaines dans un entretien avec la section francophone de la Voix de l’Amérique

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Abdoulaye Wade ne veut pas lâcher le fauteuil présidentiel. «Je suis candidat en 2012, Inch’Allah. Si Dieu me donne longue vie, ma santé et mon cerveau, je serai candidat en 2012», a-t-il déclaré il y a quelques semaines dans un entretien avec la section francophone de la Voix de l’Amérique, radio et télévision officielle des Etats-Unis où il a effectué un déplacement.

M. Wade devenu président en 2000 à l’âge déjà fort avancé de 74 ans est aujourd’hui âgé de 83 ans. S'il venait à être réélu en 2012, il aurait 86 ans, et achèverait son mandat en 2019, à l'âge de 93 ans.

A l’opposition, qui a soulevé l’inconstitutionnalité d’une telle candidature, puisque le nombre de mandats du président est limité à deux par la constitution, Abdoulaye Wade répond: «Il y a des gens qui réclament la démocratie et qui ne sont pas des démocrates au Sénégal. Il faut laisser le peuple sénégalais se déterminer. Que chacun se présente, que le jeu soit ouvert. Nous sommes dans une démocratie» a -t-il ajouté faisant référence justement à la levée de boucliers au sein de l'opposition contre une nouvelle candidature de sa part.

Cette annonce avait en effet étonné d'une part comme le souligne M. Ahmet Ndiaye, professeur en droit constitutionnel à l’Université Cheikh Anta Diop Dakar (Ucad) qui estime que: «le pouvoir fera mieux, ne serait ce que par respect au Sénégalais, de s’occuper des urgences sociales, tels que les inondations, les problèmes d’électricité, d’embouteillages, plutôt que d’agiter s’aventurer dans des hypothétiques candidatures du président de la République qui ne sont, à ses yeux, que des épiphénomènes visant à divertir», et d'autre part par sa précocité surprenante de deux ans et demi avant le scrutin présidentiel de 2012.

Pour le responsable du PS, parti qui a dirigé le Sénégal de l'indépendance en 1960 à l'alternance de 2000: «Le fil de confiance est définitivement rompu avec les populations et il sera battu, Faute de trouver un candidat pour leur formation politique, les militants du Parti démocratique sénégalais (PDS) se sont rabattus encore sur Me Wade pour presque le supplier de briguer un troisième mandat. Une candidature qui rallumera inéluctablement la problématique de la limitation de l’âge du président de la République au Sénégal, mais aussi de sa santé» a-t-il déclaré.

La presse sénégalaise pour sa part trouve la clé de cette annonce au sein du camp libéral du Parti Démocrate Sénégalais (PDS). En faisant cette déclaration de candidature, Abdoulaye Wade fait taire les ambitions qui ont commencé à diviser sa mouvance politique. Il fait passer un message fort entre les lignes: sa succession n’est pas encore ouverte. En se projetant dans l’avenir, Abdoulaye Wade remet dès maintenant de l’ordre dans ses propres rangs. Quelle que soit d’ailleurs la décision qu’il prendra finalement à l’approche de 2012.

D'autant plus qu'il avait jusqu'à là tenté de mettre son fils, Karim, sur orbite, d'en faire son successeur. Mais celui-ci a été sévèrement battu lors des élections municipales de mars 2009, il a échoué dans sa tentative de conquête de la mairie de Dakar et fait l’objet de polémiques pour sa gestion de l’Agence nationale pour l’Organisation de la conférence islamique (ANOCI). Une gestion épinglée dans le livre: Contes et mécomptes de l’ANOCI publié cet été par le journaliste Abdou Latif Coulibaly. Un pamphlet qui accuse le régime de malversations financières et qui s’arrache dans le pays.

Dans cette polémique qui accable principalement le fils que de nombreux journaux traitent de petit «toubab» (blanc en wolof).Abdoulaye Wade donne une interview pour défendre la façon dont son fils Karim Wade a géré l’ANOCI: «Ce sont des voix de mauvaise foi», a-t-il estimé, c'est «Simplement pour s’attaquer à moi, on s'attaque à Karim».

«Si Wade ne veut pas quitter le pouvoir, c'est parce qu'il a peur de la prison. Pas tellement pour lui, il est trop vieux pour ça. Mais pour les membres de sa famille», affirme un directeur de journal dakarois.

En effet, le pays est sur un volcan, au bord de l'insurrection avec des émeutes récurrentes dans les quartiers populaires où des jeunes descendent régulièrement pour affronter la police. Ils protestent la mal-vie, la cherté de la vie, les coupures d'électricité, les inondations…

Les banlieues de Dakar sont victimes de terribles inondations à chaque mousson. La colère populaire est d'autant plus grande que ces quartiers sont inondés depuis 2005. Les eaux ne sont plus pompées souvent du fait de détournements de fonds.

Et la révolte gronde d'autant plus que le régime a dépensé des sommes considérables pour embellir les quartiers résidentiels. En bord de mer, sur la Corniche, là où vivent les nouveaux riches du régime, des routes, des ponts et un tunnel parfaitement bitumés servent de terrain de jeu aux derniers modèles de Porsche ou de BMW.

Pendant ce temps-là, les charrettes tirées par des ânes et chevaux squelettiques et Peugeot 404 déglinguées pataugent dans les eaux stagnantes dans ces quartiers souvent sans électricité. La moitié des Dakarois ont du mal à faire plus d'un repas par jour. Au Sénégal comme sur les contrées du contient, les populations accusent la famille Wade d'avoir fait main basse sur les richesses du pays.

Quand à l'opposition; le parti socialiste au pouvoir pendant quarante ans qui n'a pas encore retrouvé un réel crédit, notamment auprès des plus jeunes, suspecte le régime d'être tenté par le modèle gabonais. L'entourage de Wade père travaille sur un projet de réforme de la loi électorale. Une présidentielle à un tour comme au Gabon.Comme le Sénégal compte plus d'une centaine de partis politiques, l'opposition aurait bien du mal à faire triompher son candidat avec ce type de scrutin. Pays où Ali Bongo a succédé à son père. Comme d'ailleurs M. Wade l'a laissé entendre ces jours-ci dans une déclaration à la fois sérieux et ironique: «Ce serait drôle d'ailleurs s'il se présentait contre moi (parlant de son fils, Karim) et qu'on se retrouve au deuxième tour». «Cela serait intéressant et inédit d'ailleurs. Il n'y a que des choses inédites qui se font au Sénégal»

Ces affirmations cocasses et inédites n’ont pas amusé les Sénégalais qui, selon la presse dakaroise, ont perdu le sens de l'humour...

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