M. CHALLALI (avatar)

M. CHALLALI

Abonné·e de Mediapart

115 Billets

1 Éditions

Billet de blog 19 octobre 2009

M. CHALLALI (avatar)

M. CHALLALI

Abonné·e de Mediapart

Iran : Attentat fâcheux contre des Gardiens de la révolution

M. CHALLALI (avatar)

M. CHALLALI

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

C’est l’une des attaques les plus meurtrières qui a frappé hier le puissant corps des Pasdaran, armée idéologique du régime, unité d’élite et l’un des piliers du régime de Téhéran. L’attentat, commis dans la ville de Pishin, a fait au moins 35 morts dont des hauts responsables des Gardiens de la révolutions et plusieurs dizaines de blessées, selon un communiqué du Conseil de la sécurité nationale, qui dépend du ministère de l’Intérieur. «Les responsables de cette action inhumaine et tragique seront arrêtés et punis», ajoute le texte.

L’attentat s’est produit à 08h00 (04h30 GMT) dans la ville de Pishin, à la frontière avec le Pakistan, alors que les commandants des Gardiens de la révolution participaient à une réunion avec les chefs de tribus de la province du Sistan-Balouchistan destinée à renforcer «l’unité entre les chiites et les sunnites». «Dans cette action terroriste, le général Nour-Ali Shoushtari, l’adjoint du commandant de l’armée de terre des Gardiens de la révolution, le général Mohammed Zadeh, commandant des Gardiens de la révolution pour le Sistan-Balouchistan, le commandant des Gardiens pour la ville d’Iranshahr (sud-est), et le commandant de l’unité Amir-al Momenin ont été tués», a précisé l’agence presse Fars. Des chefs de tribus ont également péri dans l’attentat selon la même source. «Un homme portant des explosifs sur lui, les a fait exploser lors d’une réunion des chefs de tribus» de la province avec les commandants des Gardiens de la révolution, a indiqué l’agence de presse officielle Irna.

Qui sont les gardiens de la Révolution ?

Les gardiens de la Révolution passent pour la garde loyale de la République islamique et de son guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei. Le corps du Pasdaran est une organisation paramilitaire de la République islamique d'Iran dépendant directement du guide de la Révolution, le chef de l'Etat iranien. Le Sepah-e Pasdaran est séparé de l'armée iranienne régulière et lui est parallèle.

Ils sont très bien équipés avec leur propre marine, leur armée de l'air et forces terrestres. La force est aussi responsable des missiles d'Iran sur lesquels l'armée régulière n'a aucun contrôle. Son quartier général se situe sur la base aérienne de Doshan Tappeh, siège également du commandement de l'armée de l'air iranienne.

Des efforts récents ont été faits afin de créer un commandement conjoint entre l'armée régulière et les gardiens de la Révolution, mais ils ont été limités par leur nature et n'ont pas eu d'impact significatif.Le corps des gardiens de la Révolution a été fondé par décret le 5 mai 1979, en tant que force soumise à l'autorité de l'Ayatollah Khomeini. Ils sont en fait placés sous l'autorité du guide de la Révolution, actuellement Ali Khamenei. Ils sont devenus une force armée à part entière pendant la guerre Iran- Irak (1980 à 1988), où ils ont joués un rôle prééminent en utilisant, majoritairement, des adolescents inexpérimentés contre l'armée irakienne.

En 2000, on estime que les GRI regroupent 130 000 hommes dans une vingtaine de grandes formations, dont des unités parachutistes, d'opérations spéciales ou d'infanterie de marine. Les gardiens de la Révolution ont pris un poids croissant dans l'Etat ces dernières années, non seulement en politique mais aussi en économie et disposent de leur propre université et sont réputés avoir la main haute sur le programme balistique iranien. L'actuel président Ahmadinedjad a fait partie de leurs rangs. Ils sont aussi devenus actifs dans les secteurs de la construction et du pétrole, par le biais de sociétés qui leur sont affiliées et qui ont décroché de très gros contrats.

Souvent considérée comme une armée parallèle forte de sa propre aviation et de sa marine, ils sont étroitement associés à l'armée régulière dans les opérations de défense. Ils partagent avec cette dernière la surveillance des frontières mais disposent d'un équipement beaucoup plus sophistiqué, notamment avec les batteries de missiles à longue portée Shahab-3. Ils ont aussi pris leur part dans la lutte contre les groupes armés de «l'opposition» et disposeraient de services de renseignement d'une efficacité redoutable, dirigés par le général Mohammad Ali Jafari, et les miliciens islamistes des Bassidjis qui ont joué un important rôle dans la répression des manifestations de contestation qui ont suivi la réélection contestée du président ultraconservateur Mahmoud Ahmadinedjad.

Récemment, les autorités ont annoncé que le corps des Bassidjis allait être intégré directement dans les forces terrestres des gardiens de la Révolution avec une organisation et un commandement unique. Mais les autorités n'ont pas annoncé quels seraient les effectifs de la nouvelle force qui est appelée force de la résistance terrestre des gardiens de la Révolution.

L'IRAN PROMET DE SE VENGER

Le président du Parlement, Ali Larijani, a accusé les Etats-Unis. «Nous considérons que les dernières actions terroristes résultent de l’action des Etats-Unis et montrent l’animosité américaine à l’égard de notre pays», a déclaré M.Larijani. «Le président Barack Obama avait dit qu’il tendait la main à l’Iran, mais avec cette action il s’est brûlé la main. Le peuple iranien a raison de ne pas croire aux changements promis par le gouvernement américain, ce qui est contre leurs intérêts», a-t-il ajouté.

«Les insurgés ont traversé les frontières du Pakistan et d’Afghanistan et ont été aidés par les Etats-Unis pour commettre cet acte terroriste» le plus meurtrier de ces dernières années contre le corps d'élite des gardiens de la Révolution, a déclaré un responsable iranien. Le président de la Commission des Affaires étrangères du Parlement, Allaeddine Boroujerdi, accuse «Les Etats-Unis d’être derrière les groupes terroristes».

Les médias iraniens ont précisé que l'attaque avait été revendiquée par un groupe sunnite, les Jundollah « Soldats de Dieu », qui lutte depuis 2005 contre Téhéran dans cette province du Sistan-Baloutchistan. Et la télévision d'Etat iranienne a mis en cause « une implication directe du gouvernement britannique qui organise, aide et équipe des terroristes professionnels».

Les Gardiens de la révolution, eux, accusent dans un communiqué « l’oppression mondiale, c’est-à-dire les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, d’avoir provoqué les éléments à son solde pour commettre cet attentat».Le quartier général des forces armées iraniennes a lui aussi accusé «le Grand Satan américain et son alliée la Grande-Bretagne de soutenir les terroristes». «Dans un avenir qui n'est pas lointain, nous nous vengerons et les Baloutches nettoieront cette région des terroristes et des criminels », est-il dans un communiqué.Le président Mahmoud Ahmadinejad a ordonné aux autorités iraniennes « de traquer et de punir les commanditaires de cet attentat. Nous allons nous occuper sérieusement des criminels qui commettent de tels crimes contre l'humanité, a-t-il promis.

Washington a condamné l'attentat et démenti toute implication. «Nous condamnons cet acte de terrorisme et nous déplorons la perte de vies innocentes. Il est totalement faux de parler d'une implication américaine», a dit Ian Kelly, porte-parole du département d'Etat.

A Londres, le Foreign Office a également condamné cet attentat : «Le terrorisme est odieux où qu'il se produise. Nos sympathies vont aux victimes et à leur famille », a-t-il dit.

L’auteur de l’attentat, le kamikaze en question, faisait partie d'un groupe d'artisans locaux avec lesquels une délégation de haut rang des gardiens de la Révolution était venue s'entretenir, en marge d'une conférence avec des dirigeants tribaux à Sarbaz. Il a déclenché les explosifs qu'il portait autour de son corps, tuant notamment le numéro deux des forces terrestres des Pasdaran, le général Nourali Shoustari, également responsable de la force d'élite Al Qods, selon la chaîne Press TV.

Le procureur général de la province, Mohammad Marzieh, a affirmé que Jundallah, « les Soldats de Dieu », avait revendiqué l'attentat. « Ce n’est pas la première attaque du groupe contre des cibles chiites et les Gardiens de la révolution au Sistan-Baloutchistan », en évoquant Abdolmalek Rigi, chef de file des Jundollah.

Pour l'Iran, majoritairement chiite, «Les Jundollah, qui affirment défendre les droits bafoués de la minorité sunnite sont liés au réseau Al Qïda».

Les Jundollah, qui se font aussi appeler « Mouvement de la résistance populaire iranienne », ont été fondés en 2002 et ont lancé la lutte armée en 2005. Leurs effectifs ne dépassent probablement pas la centaine d'hommes, équipés d'armes de petit calibre et d'explosifs.Le 14 décembre 2005, une tentative d'assassinat avait visé le président Mahmoud Ahmadinejad en visite dans la région. Le 28 mai dernier, un kamikaze a fait 25 morts et plus de 120 blessés dans une mosquée chiite de la ville de Zahedan.

Deux jours plus tard, trois hommes accusés d'implication dans cet attentat étaient pendus en public, puis deux autres le 2 juin. En juillet, 15 autres membres présumés des Jundollah ont été exécutés.Le groupe a aussi revendiqué l'enlèvement en décembre 2006 de sept soldats iraniens dans le secteur de Zahedan. Il voulait échanger leurs vies contre la libération de plusieurs de ses membres, mais les a relâchés un mois plus tard, apparemment après une médiation menée par des responsables tribaux.

Ce groupe Jundollah a également attaqué des soldats iraniens et d'autres forces au cours des dernières années, tuant notamment onze Gardiens de la révolution dans un attentat à la voiture piégée près de Zahedan en février 2007.

Le 28 mai dernier, un kamikaze a fait également 25 morts et plus de 120 blessés dans une mosquée chiite de Zahedan.

Un casse-tête supplémentaire à la veille de la réunion qui s’ouvre aujourd’hui à Vienne sur le dossier nucléaire entre l’Iran et les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’Onu (Etats-Unis, France, Russie, Grande-Bretagne, Chine) et l’Allemagne, sous l'égide de l'Agence internationale de l'énergie atomique (Aiea).

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.